INTERVIEW« Le mandat de maire exige de la durée », lance Estrosi candidat à Nice

Municipales 2020 à Nice : « Le mandat de maire exige de la durée », lance Estrosi candidat à sa réélection

INTERVIEWChristian Estrosi, maire sortant, a confirmé sa volonté de briguer un troisième mandat. Il se livre à « 20 Minutes » dans un long entretien
Fabien Binacchi

Propos recueillis par Fabien Binacchi

L'essentiel

  • Christian Estrosi brigue un troisième mandat à la tête de la ville de Nice.
  • Le sortant estime « toutes les communes qui réussissent sont des communes où les maires ont eu la durée pour eux ».
  • Il se livre à 20 Minutes dans un long entretien.

Il a levé un suspense qui n’en était pas un ce dimanche à midi. Officiellement candidat à sa réélection à la mairie de Nice, les 15 et 22 mars prochains, Christian Estrosi est bien décidé à repartir pour un troisième mandat.

Bilan du précédent, programme à venir, concurrence… le sortant s’est livré à 20 Minutes dans un long entretien où il estime notamment que « toutes les communes qui réussissent sont des communes où les maires ont eu la durée pour eux ».

Votre candidature ne semblait faire aucun doute, mais pourquoi l’annoncer maintenant ?

J’étais concentré sur la fin du chantier du tramway. C’est quand même l’investissement le plus lourd, le chantier le plus complexe qui nécessitait de ma part beaucoup d’attention. Puis, j’avais dit très clairement qu’il y avait un temps de réflexion nécessaire. Et j’ai estimé que, pour avoir respecté mes engagements, il était temps de proposer aux Niçois de continuer ensemble. Le mandat de maire est un mandat qui exige de la durée. Toutes les communes qui réussissent sont des communes où les maires ont eu la durée pour eux : Bordeaux avec Juppé, Lille avec Aubry, Lyon avec Collomb… Et tous sont des maires qui ont eu une vision qu’ils ont décrite d’entrée de jeu. Quand au début de 2008, je me suis présenté, j’ai dit « Voilà où nous devons conduire Nice ». A un moment où l’écologie n’était pas du tout à la mode, le titre de ma campagne était « Nice, ville verte de la Méditerranée ».

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Qu’est ce que cela va changer, en pratique, dans les trois mois à venir ?

Je serai maire jusqu’au bout. Les Niçois m’ont élu pour être maire jusqu’au dernier moment. Tous les jours, des arbitrages me sont demandés. Je dois agir au quotidien auprès des administrations sur des thèmes majeurs en matière de sécurité notamment. Et pour tout ça, le temps de maire sera plus important que le temps de la campagne.

Quel regard portez-vous sur le mandat qui s’achève ?

J’ai été élu sur la base de 102 engagements. J’en ai tenu 89. Et j’en ai réalisé 92 qui n’étaient pas prévus. Avec l’évolution de la société, certains sujets sont devenus accessoires et ont été remplacés par d’autres. En gagnant la région en 2015, entre les financements régionaux et européens que m’a apportés la région, j’ai pu réaliser 20 % de projets en plus. Mais je crois que j’ai surtout réussi à rassembler à l’issue de ce mandat.

Au-delà du tramway, quelle réalisation vous rend le plus fier ?

Ma cuisine centrale zéro plastique, la première en France, et qui sert aujourd’hui 28.000 repas par jour. C’est l’investissement le plus lourd de la municipalité parce que pour moi, la nutrition des enfants dont j’ai la charge c’est une priorité.

L’achèvement des lignes 2 et 3 du tramway signe la fin d’un cycle, comment en entamer un nouveau ?

C’est surtout la fin d’un cycle de grands travaux et de restructuration de la ville pour pouvoir maintenant se concentrer sur le contenu. Je compare ma vision des choses à une maison à trois étages et donc trois mandats. Sur le premier, il a fallu se doter des outils nécessaires, avec le lancement de l’Opération d’intérêt national [OIN] dans la plaine du Var et la création de la métropole sur un territoire cohérent. Il a fallu aussi mettre en route une grande stratégie de verdissement de la ville, avec la coulée verte, et passer d’une monoactivité – le tourisme – a deux piliers, en y ajoutant l’éco-industrie santé dans l’OIN. Et c’est aussi passer par les grands équipements qui nous faisaient défaut pour renforcer notre attractivité, dont l’Allianz Riviera. On a déposé les bases. Ensuite, avec le deuxième mandat, nous avons allié la mobilité verte, le tramway, à une stratégie économique et sociale durable, avec le classement de notre technopole en French tech et l’essor de notre université qui est passée de 23.000 à 38.000 étudiants. Il a fallu remettre Nice face aux grands enjeux environnementaux, sociaux et sécuritaires. C’est notamment passer par l’acquisition de l’hôpital Saint-Roch pour engager la suite. On a restructuré la ville, on l’a réorganisée d’Est en Ouest et donc nous sommes arrivés au moment où on peut allumer le troisième étage. Après avoir rénové la maison, on va consolider la structure et embellir le jardin.

Quel sera justement ce « contenu » que vous évoquez ?

La base du notre plan climat-air-énergie a posé les choses. Ce troisième mandat sera axé sur l’environnement et le bien-être. Face aux catastrophes annoncées, les épisodes orageux de plus en plus nombreux, l’exigence est de nous protéger encore mieux qu’ailleurs. La perméabilisation des sols est une exigence. On a déjà fait 30 ha de végétalisation, nous en ferons encore 60. Durant les deux derniers mandats, il y a plus de surfaces qui ont été végétalisées que de surfaces qui ont été bâties. Le PLU métropolitain augmente d’ailleurs la part de surfaces agricoles et d’espaces protégés. La sécurité sera aussi au centre du projet, pour contrer la radicalisation, la violence lourde, jusqu’aux incivilités. Ça passera par la réalisation de notre grand hôtel de police où on installera les dernières technologies. Je me bats aujourd’hui [la Cnil a refusé des expérimentations demandées] et j’aurai gagné la partie sous moins d’un an. Nous pourrons utiliser les technologies d’aujourd’hui et celles de demain que nous ne connaissons pas encore. Si on ne mène pas les guerres du XXIe en siècle avec les outils du XXIe siècle, on les perd. Il y aura aussi un important volet culture, que j’entends porter encore à un plus haut niveau de reconnaissance internationale. Et enfin, ce sera la dominante, nous allons porter l’attention sur des additions de petits et de moyens projets dans les quartiers de la ville. Je veux apporter des réponses pratiques dans tous les domaines à la carte.

Avec moins de gros travaux, ce troisième mandat serait donc moins spectaculaire ?

Il ne se mesurera pas de la même manière visuelle. Je planterai vraiment le décor et je détaillerai mon projet le 19 janvier à l’Acropolis. On sera sur des choses qui apportent des réponses aux problèmes climatiques et sur le plan de la santé.

Vous parlez beaucoup d’écologie. Un collectif vous a justement reproché de ne pas en faire assez en la matière…

Je ne réponds pas à ce genre de choses. Les vaines polémiques ne m’intéressent pas. Je propose aux Niçois, je parle aux Niçois. Leur ville est un livre ouvert et ils voient bien qu’elle évolue. Il y a ceux qui ont privé Nice de TGV depuis 20 ans en faisant échouer les enquêtes d’utilité publique et ceux qui ont expliqué qu’il ne fallait pas faire le tramway… Aujourd’hui, il y a plus de crédibilité pour celui qui a fait et qui fait que pour ceux qui s’y opposaient.

Philippe Pradal resterait-il à vos côtés ?

Il est un formidable partenaire et il a toute ma confiance. Il est d’une loyauté exemplaire. Il a vocation bien évidemment à continuer à se dévouer pour la ville avec moi. Mais je n’évoquerai pour le moment aucune situation personnelle.

Vous avez obtenu le soutien de LR et des Centristes et vous avez déjà indiqué que votre liste comporterait des représentants LREM…

Ma liste ne comportera que les meilleurs pour servir ma ville. Peu m’importe leur étiquette. Je ne reprendrai aucun représentant LR, LREM ou autre ou aucun membre de la société civile qui ne soit pas à la hauteur de la fonction. Je choisis les meilleurs et je ne regarde pas l’étiquette. Ce n’est pas un parti qui va expliquer au maire de Nice comment il doit administrer sa ville. Je suis émancipé de tout cas.

Sept listes sont déjà officialisées face à vous. Quel regard portez-vous sur cette concurrence ?

Elle est toujours saine. Imaginez qu’il n’y en ait pas, que dirait-on ? Mais ce qui est sûr, c’est que je ne parle qu’avec mes électeurs. L’essentiel du temps qui reste, je vais le consacrer à mes fonctions de maire. Il n’y aura que des temps de campagne et je ne vais pas les consacrer à me laisser entraîner dans de vaines polémiques. Au-delà de ça, je vois déjà apparaître certaines positions assez excessives, de radicalité, d’intolérance. Nice n’a pas besoin de ça. Surtout dans le climat actuel. La France est entrée dans une forme de radicalité. Elle est bloquée dans ses transports, il y a les « gilets jaunes », l’économie est en difficulté. Je crois qu’il est plutôt temps de rassembler.


Notre dossier Municipales 2020

Quelles sont vos relations aujourd’hui avec Eric Ciotti ?

Pendant deux ans, je n’ai pas répondu, mais j’ai toujours eu le sentiment au fond de moi qu’en ayant constamment la main tendue et en ne répondant jamais à des choses qui ont pu certaines fois me blesser, arriverait le temps de la réconciliation. Il y a une prise de conscience de sa part que nos divisions ne pouvaient que desservir Nice. Ces deux années, on aurait peut-être pu les éviter, mais elles sont riches d’enseignement.

Vous attendez-vous à un soutien personnel de sa part dans la campagne ?

Tous les Niçois, qu’ils exercent des mandats ou non, qui considéreront avoir leur place pour partager un même élan au service de Nice pendant cette campagne ont vocation à l’occuper. Eric Ciotti était à mes côtes pour l’inauguration du tramway, il sera [lundi] avec moi pour celle du parc du Ray.