Municipales 2020 à Strasbourg : Le casse-tête des candidats pour financer leur campagne électorale
MUNICIPALES•« Pour gagner, il faut dépenser », résume un candidat aux municipales. Tout en évitant quelques écueilsNils Wilcke
L'essentiel
- Pour arriver à remporter le fauteuil de maire, les candidats aux municipales doivent financer leur campagne électorale.
- Louer un local, contracter un emprunt bancaire ou faire appel aux dons... Quel que soient leurs choix, le financement d'une campagne est source de stress, comme l'expliquent les candidats à « 20 Minutes ».
- L'Etat finance certains frais et peut même rembourser les candidats pour certaines dépenses mais sous conditions.
A Strasbourg comme ailleurs, celui ou celle qui veut s’asseoir dans le fauteuil de maire doit s’en donner les moyens. Louer un local, salarier des postes, faire imprimer des tracts et des affiches, le financement d’une campagne municipales n’est pas à prendre à la légère. « Pour gagner, il faut dépenser », résume un candidat. Tout en évitant quelques écueils.
Pour se faire rembourser, il faut faire au moins 5 % des voix
« Quand on s’engage comme candidat et tête de liste, on s’investit à fond, c’est normal », résume Jean-Philippe Vetter, tête de liste pour Les Républicains. Mais attention, les dépenses qui ont vocation à convaincre les électeurs doivent rentrer dans les comptes de campagne. « La loi pose l’interdiction absolue de financer sa campagne par des personnes morales publiques ou privées pour préserver l’indépendance du candidat », rappelle Maître Rolande Placidi, avocate au Barreau de Strasbourg et formatrice pour CapCom sur le financement électoral.
C’est pourquoi l’Etat prend financièrement en charge une partie des frais sur une base forfaitaire. Le montant maximal de ce remboursement est égal à 47,5 % du plafond des dépenses de campagne. Sauf qu’il faut faire au moins 5 % des voix pour y prétendre. « Certains candidats qui n’atteignent pas ce seuil peuvent se retrouver dans une situation financière difficile », assure l’avocate Rolande Placidi.
Pour les partis qui se lancent avec des moyens modestes, ce seuil est quasi impossible à atteindre. « On ne peut pas engager de gros frais pour cette raison, explique Mathieu Le Tallec, qui porte les couleurs du parti ouvrier à Strasbourg. Nous allons concentrer nos moyens sur les affiches, les professions de foi et la location de salles », précise le candidat dont la formation affiche 33 adhérents dans le Bas-Rhin.
Ce pourcentage de voix a aussi une importance pour obtenir un prêt auprès des banques. « Les banquiers demandent des garanties solides avant de s’engager », indique le candidat LREM Alain Fontanel. Ce dernier fait savoir qu’il ne recevra pas d’apport financier du parti pour « par souci d’indépendance ». Reste qu’il lui faut emprunter comme les autres pour couvrir les dépenses. Si ouvrir un compte bancaire ne présente pas de difficultés pour la plupart des candidatures, l’obtention d’un prêt, en revanche, s’apparente à un chemin de croix administratif.
« On entraîne avec soi sa famille et ses proches »
« Il faut remplir une quinzaine de documents », explique Alain Fontanel. Certains candidats sollicités par 20 Minutes avouent qu’il s’agit d’un stress supplémentaire. « Quand on signe le document, on se rend compte qu’on entraîne avec soi sa famille et ses proches, il est clair que c’est un poids en plus », confie le candidat LREM. « Bien sûr que c’est de la pression, confirme son adversaire LR Jean-Philippe Vetter, mais c’est aussi un défi incroyable ». La candidate sur la liste écolo & citoyenne Jeanne Barseghian, elle, a contracté un prêt personnel mais « une douzaine de proches » se sont portés garants pour répartir les risques. Aussi, les appels aux dons permettent de faire gonfler la trésorerie. Avec un plafond maximum de 4.600 euros par donateur, quel que soit le nombre de candidats soutenus.
« On ne demande pas un ticket d’entrée pour venir sur notre liste »
D’autres sont moins préoccupés par les questions de trésorerie, à l'image du candidat socialiste Mathieu Cahn. Et pour cause, c’est la fédération départementale du PS qui paye la note. « On ne demande pas comme certains un ticket d’entrée pour venir sur notre liste, détaille Mathieu Cahn. Par contre, s’ils sont élus, les colistiers doivent verser 10 % de leurs indemnités au parti ». La campagne de 2014 qui a conduit à l’élection de Roland Ries a été financée de cette façon.
Gare aux dépenses de dernière minute
Se faire aider par ses colistiers représente tout de même un moyen d’éviter de tout payer de sa poche. « Je leur demande une participation en fonction de leurs moyens et de leur place sur la liste », indique Jean-Philippe Vetter.
L'ensemble des dépenses doit de toute façon passer par un mandataire financier, rappelle Maître Placidi, qui met les candidats en garde contre les coups fourrés. « On a déjà vu des seconds de liste engager des dépenses sans en informer leur tête de liste, se souvient l’avocate. Résultat, celui-ci pouvait être frappé d’inéligibilité et le second de liste pouvait passer en tête ».
De manière générale, l’avocate Rolande Placidi met en garde les candidats face aux dépenses de dernière minute. « Ce sont souvent des urgences qui génèrent des contentieux, comme du matériel informatique ou même des câbles téléphoniques, chaque euro compte ». D’autant que les sanctions pénales pour les candidats qui dépassent le plafond de dépenses ont été alourdies depuis la dernière élection présidentielle. « Le tarif est passé à trois ans de prison et à 45.000 euros d’amende pour les contrevenants », rappelle l’avocate. Un candidat averti en vaut deux.