Montpellier : Après le stade de rugby, du naming pour la piscine olympique et la salle de handball
FINANCES•La métropole envisage de proposer à la publicité le nom des équipements sportifs, afin de trouver des solutions de financement pour les clubs. Mais ça ne plaît pas à tout le mondeNicolas Bonzom
L'essentiel
- Après le stade de rugby, la piscine olympique de Montpellier va bénéficier d’une opération de naming : appelez la désormais la piscine olympique Angelotti.
- Une façon de permettre aux clubs d’aider les clubs, dans une situation compliquée, indique Christian Assaf (PS), vice-président de la métropole de Montpellier.
- Mais si l’idée séduit les clubs, dans les rangs politiques, même au sein de la majorité de Michaël Delafosse (PS), l’opération est loin de faire l’unanimité.
En 2014, le stade de rugby était la première enceinte sportive à Montpellier (Hérault) à s’offrir un naming. Nommé Altrad Stadium, du nom de l’entreprise du patron du club, il porte aujourd’hui le nom d’un poids lourd de l’immobilier, GGL. Mais le chaudron du MHR ne sera bientôt plus seul à bénéficier d’une telle opération : la piscine olympique Antigone va être rebaptisée du nom d’un autre aménageur, Angelotti.
Une façon, pour la métropole, d’aider les clubs d’élite, éprouvés par la crise. « Ils sont dans une situation catastrophique, pointait le vice-président de la métropole, Christian Assaf (PS), lors du conseil métropolitain, le 17 décembre. Il faut trouver des solutions, dans l’urgence, pour permettre aux clubs de trouver des recettes financières supplémentaires. Nous n’avons pas de planches à billets. » Pour s’offrir le fronton de la piscine, Angelotti devra débourser 120.000 euros par an jusqu’à fin 2026. La somme permettra de soutenir financièrement les clubs qui utilisent l’équipement.
« Réorienter une partie des financements » pour réinventer la politique sportive
D’autres infrastructures pourraient bientôt être rebaptisées. Car la métropole veut « réinventer » sa politique sportive, en donnant une chance aux sports émergents ou aux jeunes espoirs, note Christian Assaf. « Cela nécessite de réorienter une partie des financements, indique l’élu. L’idée n’est pas que la collectivité soit nécessairement à la manœuvre, les clubs pourront prendre directement à leur charge ce naming. »
A Lattes, Cyril Meunier (divers gauche) a également annoncé son intention d’offrir prochainement un naming à la salle communale où évoluent les basketteuses du BLMA. En évitant toutefois les sociétés « qui porteraient des valeurs que nous ne partageons pas », promet le maire, et en exigeant de l’entreprise choisie qu’elle mène « actions sociales de découverte du sport, dans les quartiers » et les publics prioritaires.
Les clubs y sont favorables…
Du côté des clubs concernés, le naming est vu d’un très bon œil. Philippe Jamet, le président du MUC Natation, y est favorable : « Je le suis d’autant plus que je suis le président d’un club de sport individuel. Malheureusement, les sponsors, on n’arrive pas à en avoir, contrairement aux sports collectifs qui arrivent à en attirer et peuvent réunir régulièrement du public, avec une billetterie, des salons VIP… Donc tout ce qui peut nous aider, c’est une bonne chose. Et je suis bien conscient que les finances des collectivités, c’est de plus en plus compliqué. »
Au Montpellier Handball, on y est, aussi, favorable. La métropole a donné son feu vert pour que le palais des sports René-Bougnol soit rebaptisé. Le club doit rédiger un cahier des charges, avant le lancement d’un appel d’offres. « Dans la condition où nous pouvons, nous-mêmes, gérer le naming, contractualiser avec une entreprise, et percevoir les fonds, cela permettra de développer les ressources, c’est très important dans ce contexte, indique son président, Julien Deljarry. L’autre raison pour laquelle nous y sommes favorables, c’est pour donner une identité supplémentaire au club. »
… mais les rangs politiques sont divisés
Mais dans les rangs politiques, le naming est loin de faire l’unanimité. Pour le mouvement Nous sommes, c’est même « une honte » : « Les noms de nos stades, de nos salles de sport et de spectacle sont des repères qui participent à la construction culturelle de notre métropole, ils ne peuvent être un vulgaire support à la publicité. Après la piscine, pourquoi ne pas vendre la médiathèque à Amazon ? »
Mais, plus étonnant, le naming fait des vagues, aussi, au sein de la majorité. « Le "nommage", c’est associer les valeurs du sport à celles de la banque, comme la Caisse d'épargne à Charleville-Mézières, à d’autres états, comme l’Emirates Stadium à Londres, à la bagnole, comme Skoda à Morzine, en Suisse, et, le plus beau, Kinder, à Rouen », déplore Bruno Paternot (EELV), qui a voté contre le projet, et qui a appelé la métropole à éviter de sélectionner des partenaires liés à « la malbouffe ou aux états étrangers ».
Hervé Martin (PC), élu au sport à la mairie, est lui aussi opposé au naming. « Je partage le point de vue selon lequel les grands clubs doivent arriver à avoir leurs ressources propres, surtout si cela permet de dégager des financements pour les clubs amateurs », mais, note-t-il, « si nous ne réagissons pas à propos des équipements sportifs, demain, l’ensemble de notre patrimoine urbain pourrait devenir un support à la publicité ».