Frontignan : Aux Aresquiers, les cabaniers se battent (toujours) pour conserver leurs maisons
JUSTICE•Des habitants de Frontignan (Hérault) sont sous le coup d'une demande d'expulsion de l'Etat depuis plusieurs années, car ils vivent sur une zone inondableNicolas Bonzom
L'essentiel
- Aux Aresquiers, sur la commune de Frontignan dans l'Hérault, les habitants des cabanes sont menacés d’expulsion par l’Etat.
- En 2014, la préfecture avait ordonné l’évacuation des lieux, en raison de sa situation en zone inondable. Depuis, Etat et habitants se livrent à une bataille judiciaire.
- Si les murs appartiennent bien aux habitants, aucun n’est propriétaire des parcelles, mais tous s’acquittent depuis toujours des taxes foncières et d’habitation.
Voilà des années qu’aux Aresquiers, les habitants se battent pour conserver leurs demeures. Sur ce petit bout de terre, coincée entre un canal et un étang, à Frontignan (Hérault), les cabanes de pêcheurs, dont les premières ont été construites au XIXe siècle, sont devenues, au fil des ans, de véritables maisonnettes.
Si les murs leur appartiennent bien, aucun n’est propriétaire des parcelles, mais tous s’acquittent depuis toujours des taxes foncières et d’habitation. Certains y vivent toute l’année, d’autres n’y séjournent que quelques mois. Mais aucun ne veut renoncer à ce petit paradis. Il est pourtant bien menacé : en 2014, la préfecture n’avait pas souhaité que les conventions d’occupation temporaire soient renouvelées, et avait ordonné l’évacuation des lieux, en raison de sa situation en zone inondable.
« Nous payons des impôts »
Depuis, l’Etat et les habitants des Aresquiers se livrent à une bataille jalonnée de rebondissements, où la justice a, tour à tour, donné raison à l’un et à l’autre. Dernier épisode, le 8 octobre, l’Etat a été débouté de sa demande d’expulsion en urgence des habitants des Aresquiers par le juge de référés. Une décision qui satisfait les cabaniers, et contre laquelle l’Etat peut encore interjeter appel. « Une bataille a été gagnée, mais nous n’avons pas encore gagné la guerre », note Fabrice Di Frenna, leur avocat.
« Nous ne sommes pas des squatteurs, nous avons toujours fait preuve de bonne foi et de bonne volonté, confie Jacky Campla, un habitant et président de l’association des riverains du canal des Aresquiers. Nos ancêtres ont eu des autorisations. Mon arrière-grand-père, en 1923, a obtenu le droit de construire une cabane, en bois et en briques. Les constructions sont cadastrées, et nous payons des impôts. »
« Il n’est jamais rien arrivé »
Dans ce combat, les habitants arguent également qu’il n’y a jamais eu aux Aresquiers aucun sinistre, même s’ils vivent sur une zone inondable. « Il y a eu de nombreux épisodes de fortes pluies dans la région, reprend l’avocat des habitants. Aux Aresquiers, il n’est jamais rien arrivé. » « La seule montée d’eau qu’il y a eue, c’est en 1982, reprend Jacky Campla. Il y a eu une vingtaine de centimètres d’eau sur le chemin, c’est tout. Les maisons ont toujours été préservées. » Et si, un jour, l’eau montait, certaines demeures disposent d’un étage, où les habitants pourraient s’abriter, assure Fabrice Di Frenna.
Et il y a une particularité dans cette affaire : la commune de Frontignan « est intervenue volontairement dans le cadre de cette procédure » pour soutenir les cabaniers, indique son avocate, Chantal Gil. Afin de préserver le patrimoine culturel que représente ce petit bout de terre. Patrimoine historique, aussi. « Certaines ont été détruites et reconstruites. Ma famille a touché des indemnités de reconstruction », reprend Jacky Campla.
La défense de l’Etat n’a pas souhaité répondre aux questions de 20 Minutes, et la préfecture de l’Hérault n’a pas donné suite à nos demandes de précisions.