Montpellier : A l'université de lettres occupée, des enseignants donnent des cours de substitution
UNIVERSITE•Des ateliers et des conférences sont proposés depuis deux semaines sur le campus Paul-Valéry, occupé pour protester contre les réformes du gouvernement...Nicolas Bonzom
Dans l’amphi A, on cause politiques redistributives, démocratie participative et écoquartiers. Dans un autre, mobilisation en Grande-Bretagne en 1994. A l’université Paul-Valéry à Montpellier, occupée de façon « illimitée » depuis mardi pour protester contre les réformes du gouvernement, des enseignants et des maîtres de conférences se succèdent pour dispenser aux étudiants des cours… substitutifs.
Depuis deux semaines, les étudiants, manifestants ou non, remplissent les salles, posent des questions, prennent des notes. Presque comme d’habitude. Mais ici, il n’est pas question de suivre le programme dicté par les UFR, mais de proposer des cours, des ateliers ou des conférences, principalement sur les enjeux sociaux, les mutations de la société ou l’histoire des luttes sociales. Mais pas seulement. Ces derniers jours, on a aussi parlé de science-fiction, de jeux vidéo ou de littérature dans les amphis A, B et C.
a« Nous ne voulons pas que le campus se vide »
« C’est très intéressant, confie une étudiante en théâtre, qui sort d’un amphi. Cela nous permet de voir autre chose, de sortir un peu de ce que l’on nous propose dans nos formations, d’ouvrir le champ des possibles. Et puis comme nous n’avons pas cours, cela permet de garder tout de même dans la tête dans les études. » « C’est l’affirmation de l’université que l’on veut, note Émile, étudiant en master-II. Quelqu’un qui n’a pas le Bac, ou qui n’a jamais mis les pieds dans une faculté, peut venir, c’est ouvert à tous. »
Les professeurs, de leurs côtés, proposent des thèmes d’intervention, qui viennent grossir le planning de ces cours alternatifs, affiché sur la porte des amphis et disponible sur le Web. « Nous ne voulons pas que le campus se vide de ces activités, il faut occuper cette faculté avec des cours, des projets. On ne peut pas dire "Allez, c’est bloqué, tout le monde à la maison !" », confie Angela, professeur d’Italien.
« Ce sont plus des discussions avec les étudiants que des cours »
Une maître de conférences, qui a officié à l’amphi A ce vendredi, se réjouit de voir que les étudiants « sont demandeurs de formations. Le blocage n’est pas un signe de désintérêt de l’université. Au contraire. Renvoyer tout le monde à la maison, ce n’est pas une bonne solution ». A ses côtés, un enseignant en urbanisme, qui a déjà vécu ce type de cours alternatifs quand il était étudiant, se réjouit de cette « occupation active ». « Ce sont plus des discussions avec les étudiants que des cours », souligne-t-il.
Même s’il trouve le dispositif intéressant, Théo, étudiant en 1ère année de philosophie, qui n’est pas « forcément pour le blocage » de la faculté, regrette cependant que les sujets traités soient « beaucoup trop orientés idéologiquement ». « C’est très extrême gauche », regrette-t-il. Dans des amphis maquillés de slogans, ces cours substitutifs vont se poursuivre. Certains étudiants et professeurs investis dans la mobilisation planchent même sur la création d’un département « autogéré », autour de « la pensée critique », qui poursuivrait ce projet, une fois que les barricades seront levées à l’université.