TRADITIONSPourquoi la course camarguaise se bat pour être reconnue par l'Unesco

Pourquoi la course camarguaise se bat pour être reconnue par l'Unesco

TRADITIONSLe député PS Patrick Vignal souhaite déposer un dossier pour entrer au patrimoine immatériel de l’humanité…
Nicolas Bonzom

Nicolas Bonzom

Comme la culture de la bière en Belgique, le café turc, l’équitation française, la capoeira, le yoga ou le fado portugais, la course camarguaise rejoindra-t-elle un jour le très prisé patrimoine culturel immatériel de l’Unesco ?

C’est le souhait de Patrick Vignal, député PS de l’Hérault, qui a lancé un combat depuis plusieurs mois, pour que cette discipline, pratiquée dans l’Hérault, le Gard, le Vaucluse, et les Bouches-du-Rhône, intègre la liste de traditions à sauvegarder. « Cela changerait tout, note l’élu. C’est une culture véritablement en danger. De plus en plus. »

« Reconnaître nos coutumes »

L’épais dossier aurait déjà dû être déposé, à la fin du mois de mars, auprès des services de l’Unesco. Mais pour Patrick Vignal, il faut encore « le muscler » un peu. Pour l’instant, 35 députés et sénateurs et 55 mairies ont apporté leur soutien à la démarche. « Chaque jour, on reçoit de nouveaux soutiens », souligne l’élu socialiste.

Dans le milieu taurin, cette course vers l’Unesco est vue d’un très bon œil. « C’est une excellente chose, cela contribuerait à reconnaître nos coutumes, à les sauvegarder et à mieux les protéger », souligne Franck Bertaud, président du club Lou Souleu à Vers-Pont-du-Gard (Gard), qui regrette que sa discipline soit trop souvent confondue avec la corrida. Les deux pratiques n’ont pourtant que peu de points communs : dans une course camarguaise, le taureau n’est pas mis à mort, et rentre dans son pré le soir.

50 millions d’euros d’activités économiques

« On entend dire régulièrement que ce sera interdit, parce qu’il y a parfois des blessés, regrette Jocelyn Riche, président du club taurin de Quarante (Hérault), qui organise des abrivados, des lâchers de taureaux encadrés qui symbolisent la conduite des pâturages aux arènes. Si nous étions protégés par l’Unesco, nous serions plus sereins. »

Mais c’est aussi économiquement que cette reconnaissance pourrait avoir du sens, selon ceux qui portent le dossier. Car la course camarguaise à elle seule représenterait environ 50 millions d’euros d’activités économiques, plus de 200 clubs, et quelque 20.000 bêtes vivant en semi-liberté dans 200 élevages sur les quatre départements.

Le taureau de Camargue est manipulé par l'homme à cheval.
Le taureau de Camargue est manipulé par l'homme à cheval. - ALLILI MOURAD / SIPA

« La course camarguaise est essentielle pour les éleveurs »

« Si demain, il n’y a plus de course camarguaise, le nombre d’élevages se réduira de façon conséquente, assure Magali Saumade, manadière à Saint-Laurent-d’Aigouze (Gard), présidente de l’AOP (appellation d’origine contrôlée). Si la viande, l’accueil, et la restauration sont bien sûr des moyens d’exister, la course camarguaise est essentielle pour les éleveurs. » Et pour Patrick Vignal, la conservation de cette tradition est la garantie de maintenir « des emplois non-délocalisables » et la possibilité de développer « une activité maraîchère et touristique respectueuse de l’environnement ».

Dans les manades et les clubs camarguais, tous espèrent que Patrick Vignal parviendra à décrocher la cocarde. Le pari semble cependant corsé : en 1997 et en 2004, les deux premières tentatives d’inscription à l’Unesco s’étaient soldées par un échec…