Hérault: Douze jours après l'orage de grêle, les vignerons du Pic Saint Loup sont en détresse
VITICULTEUR•Tandis que 2.000 hectares ont été touchés dans le département, les professionnels ont reçu la visite du ministre de l’Agriculture ce lundi…Nicolas Bonzom
Le 17 août dernier, un surprenant orage de grêle s’abattait sur le département de l’Hérault. Pendant 27 minutes, des grêlons « de la taille d’une balle de ping-pong », confient certains témoins, ont sévi, surprenant les habitants (et les nombreux touristes) de la région montpelliéraine, de la Basse-Vallée et du Pic Saint Loup.
2.000 hectares de vignes touchés dans l’Hérault
Et si de nombreux particuliers et entreprises ont subi d’importants dégâts, ce sont les vignerons qui ont payé le plus lourd tribut. « Dans l’Hérault, 2.000 hectares de vignes ont été touchés, dont 1.000 sont impactées de 80 à 100 %, note Jérôme Despey, président de la Chambre d’agriculture. Nous étions entre 8 et 15 jours avant les vendanges, ça fait mal aux tripes. Beaucoup de viticulteurs se trouvent dans des situations très difficiles. »
C’est au Pic Saint Loup, qui distille une appellation prisée dans le monde entier, que l’orage fut le plus dévastateur pour les vignes. Quelque 1.500 hectares y ont été touchés, sur 160 exploitations, soit 75 % des vignes impactées dans le département.
Un paysage dévasté
Pour l’heure, on estime à 100.000 hectolitres la perte de production engendrée par la grêle. A cause de la catastrophe, et de la sécheresse, le volume global de la récolte estimé cette année en Languedoc-Roussillon est inférieur à celui de l’année dernière : la préfecture évoque une chute de 9 %, soit un volume de 12,4 millions d’hectolitres.
Douze jours après l’orage, le paysage viticole du Pic Saint Loup est toujours traumatisé. Les grappes de raisins sont ratatinées, les vignes sans feuilles ou presque, comme en plein hiver. Ce lundi, Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, est allé à la rencontre de ces viticulteurs, dont certains ne savent pas de quoi leur avenir sera fait.
« J’étais dévasté, j’ai beaucoup pleuré »
« C’est la première fois que je subis une telle catastrophe, confie Fabienne Bruguière, propriétaire du Mas Thélème, à Lauret. Lorsqu’il a commencé à grêler, j’étais chez moi. J’étais dévasté, j’ai beaucoup pleuré. Je me demandais ce qu’il allait advenir de mes vignes. » Quelques minutes plus tard, lorsqu’elle se rend sur son domaine, ses vignes sont dévastées. Plus de feuilles, plus de raisins. La grêle a tout détruit.
« J’ai perdu 100 % de l’exploitation, reprend la vigneronne. Je n’ai plus de vin, je n’aurais pas de rentrée financière cette année. Ce que je demande, ce n’est pas de l’argent, mais de l’action, et de la souplesse… » Fabienne Bruguière milite notamment pour que soit possible le don de vin, pour que ses collègues vignerons puissent lui accorder quelques hectolitres, histoire de sauver son exploitation… Un dispositif, pour l’instant, interdit.
« Nous ne voulons pas sortir quelque chose qui n’est pas qualitatif »
A Fontanès, Marcelle Causse estime, de son côté, avoir perdu 80 % de sa récolte cette année. Mais les 20 % restants, elle n’est même pas sûre de pouvoir les exploiter. « On se demande si ce qui nous reste va pouvoir aboutir sur quelque chose de qualitatif, souligne la vigneronne du domaine de l’Euzière, qui évoque plusieurs centaines de milliers d’euros de pertes. Il n’y a plus de feuilles, et le raisin n’est plus protégé contre le soleil… Nous ne voulons pas sortir quelque chose qui n’est pas qualitatif. »
« Si les quelques grappes qui nous restent ne nous permettent pas de répondre à la qualité d’une appellation Pic Saint Loup, on les vendra pour faire du vin de table, reprend un autre vigneron du coin. Mais ça fait vraiment mal au cœur… »
Repenser le système d’aides
« J’en ai vu des catastrophes, a confié Stéphane Le Foll ce lundi. Mais là, c’est lourd. Je comprends que le choc psychologique soit très important. » Le ministre a dévoilé plusieurs mesures pour aider ces vignerons, dont l’exonération de la taxe foncière sur le non bâti et des cotisations sociales, ainsi des procédures de chômage partiel.
« Notre système, tel qu’il a été pensé, ne fonctionne plus, note Stéphane Le Foll. Depuis que je suis ministre, j’ai vécu plusieurs catastrophes par an. Ça va malheureusement durer, donc nous ne pouvons pas continuer à gérer comme cela est fait aujourd’hui. Nous allons lancer un audit pour trouver d’autres financements, d’autres solutions. »
De son côté, la région Occitanie a indiqué être à la disposition des professionnels « pour étudier un prêt de trésorerie ».