Marseille: Un documentaire sur l'embourgeoisement de la ville
SOCIETE•Marseille est-elle en train de perdre son caractère populaire? C'est la question que pose le documentaire «La fête est finie»...Mickael Penverne
«Marseille est en train de devenir une ville comme une autre». Nicolas Burlaud est monteur vidéo, militant associatif et membre de Primitivi, un «média libre» qui couvre l’actualité politique, économique et sociale de la ville. Il vient de réaliser son premier documentaire, intitulé La fête est finie, et dont le postulat est le suivant : l’année Capitale européenne de la culture fut le plus grand Cheval de Troie de la gentrification de la ville qui est en cours depuis des années.
«Selon moi, Marseille-Provence 2013 est une étape historique de ce processus, explique-t-il. Regardez ce qu’il s’est passé pour la rue de la République : on a expulsé des gens de façon très violente. Certains se sont mobilisés et ont dit non. Mais qui peut dire non à la culture? Personne. La culture est inattaquable. Elle est parée des vertus d’émancipation, de réflexion, de liens sociaux. Sauf que dans le cadre de l’année Capitale, elle a été mise au service d’un projet plus vaste ».
Marseille aseptisée
Euroméditerranée et son quartier d’affaires, la rue de la République et ses boutiques franchisées, la rue de Rome et son nouveau tramway, bientôt La Canebière et son hôtel 4 étoiles… Nicolas Burlaud évolue dans une ville qu’il ne reconnait plus. Celle qui cultive l’insolence et le chaos, qui se nourrit des influences africaines et maghrébines, celle dont l’histoire est émaillée de fêtes de quartier mais aussi de luttes ouvrières disparaît peu à peu, regrette-t-il. Au profit d’une ville «aseptisée (…), une ville comme les autres où le tertiaire domine tout, et où il faut être plus moderne et plus branchée» que les autres.
Ce n’est donc pas tant l’année Capitale européenne de la culture qui est pointé du doigt dans ce documentaire que ce mouvement de fond d’uniformisation commun à toutes les grandes métropoles. «Vous pouvez vous trouver à Grenoble, à Bordeaux ou à Toulouse, c’est la même chose aujourd’hui !», reprend le jeune réalisateur. Mais Marseille peut rester une ville à part. La dernière scène de «La fête est finie» se veut symbolique. On y voit un groupe d’adolescents en train de plonger sur l'esplanade du Mucem. Juste à côté d’un panneau «Interdit de se baigner».