guerreQu’est-ce que le missile Kinjal, annoncé comme « invincible » par Moscou ?

Guerre en Ukraine : Le Kinjal, missile hypersonique « invincible », ou arme de propagande de Moscou ?

guerrePlusieurs missiles russes Kinjal auraient été détruits par le système de défense antiaérienne Patriot depuis le début de la guerre en Ukraine, alors que cette arme a été présentée comme « invincible » par Moscou au début du conflit
Mickaël Bosredon

Mickaël Bosredon

L'essentiel

  • Mardi, l’armée de l’air ukrainienne a annoncé avoir abattu dix missiles hypersoniques Kinjal, un « record » depuis le début de la guerre.
  • Au début du conflit, Moscou avait annoncé que cette arme « nouvelle génération » était pourtant censée échapper à tout système de défense.
  • Leurs « débuts au combat […] ont certainement été mitigés », a analysé le ministère britannique de la Défense.

L’armée ukrainienne a affirmé mardi avoir abattu dix missiles Kinjal hypersoniques tirés par la Russie, « un record » depuis le début de la guerre. 20 Minutes vous explique ce qu’est cette arme, présentée comme « invincible » par Moscou.

Qu’est-ce que le missile Kinjal ?

Le kh-47M2 Kinjal, ou Kinžal en russe (dague, poignard) est un missile balistique hypersonique air-sol de quatre tonnes, dont la vitesse selon les Russes pourrait atteindre Mach 10, soit 3.400 mètres par seconde (12.000 km/h), notamment par sa capacité à être tiré depuis un intercepteur MiG-31 k. Dans les faits, elle serait plutôt de l'ordre de Mach 5 (6.000 km/h). Le missile peut aussi être lancé depuis un bombardier Tu-160M ou Tu-22M3. Ce missile dont la dénomination pour l’Otan est AS-24 Killjoy, serait entré en service à la fin de l’année 2017, mais a été présenté pour la première fois le 1er mars 2018 par le président russe Vladimir Poutine, qui annonçait alors le renforcement de son arsenal par plusieurs armes dites de « nouvelle génération », censées échapper à tout système de défense.

Si la portée du Kinjal est parfois annoncée à 2.000 voire 3.000 km, la portée du missile seul, sans son lanceur, ne serait en réalité « que » de 800 km. Il faut en effet considérer le Kinjal comme un système, se composant d’un avion-lanceur (le MiG-31 k) et d’un missile 9-С-7760. Sa première utilisation depuis le début de la guerre en Ukraine, remonterait au 18 mars 2022, un peu moins d’un mois après le début du conflit. Le ministre de la Défense russe Serguei Choïgou affirmait alors que ce missile volerait « à une vitesse supérieure à Mach 10 » et serait « capable de modifier sa trajectoire en cours de route dans les plans à la fois verticaux et horizontaux ».

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L’engin se révèle par ailleurs particulièrement résistant. « La tête est composée à 92 % de titane et la pointe est faite d’un alliage particulièrement dur de titane et de tungstène » décrivait dans Le Monde le 19 août 2023, Oleksandr Rouvine, directeur de l’Institut d’enquête scientifique d’expertise légale de Kiev, chargé d’analyser les missiles tirés sur l'Ukraine par les forces du Kremlin.

Rapide, solide… mais pas « invincible »

« Aujourd’hui [mardi], l’armée de l’air […] a abattu les dix missiles Kinjal Kh-47M2 à l’aide du système Patriot. C’est un record », a déclaré mardi le commandant en chef de l’armée ukrainienne Valery Zaloujny sur X (ex-Twitter).

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Un record, mais ce n’est pas la première fois depuis le début de la guerre que l’Ukraine affirme avoir détruit des Kinjal. Ainsi l’Ukraine aurait abattu son tout premier Kinjal au-dessus de Kiev, le 5 mai, puis six autres le 16 mai. Après une pause de plusieurs mois, la Russie avait de nouveau lancé le 14 décembre 2023 trois missiles hypersoniques vers Kiev et l’ouest de l’Ukraine. L’armée de l’air ukrainienne avait alors annoncé que l’un de ces missiles Kinjal avait été détruit. Avec les dix missiles interceptés mardi, cela fait potentiellement dix-huit Kinjal abattus par les forces ukrainiennes depuis le début du conflit.

Alors, ces armes sont-elles vraiment « invincibles » comme le prétendent les Russes ? Depuis qu’elle a déclenché l’invasion de l’Ukraine, la Russie réserve ces ogives à « ce qu’elle considère comme étant des cibles de grande valeur et bien défendues » mais leurs « débuts au combat […] ont certainement été mitigés », a analysé le ministère britannique de la Défense. « Un grand nombre » de ces tirs « ont probablement manqué leurs cibles, tandis que l’Ukraine a également réussi à intercepter » ces attaques, a-t-il conclu.

Toujours dans Le Monde, le directeur de l’Institut d’enquête scientifique d’expertise légale de Kiev estimait le 19 août dernier que le Kinjal ne serait en réalité « qu’une variante du missile Iskander [missile balistique sol-sol à moyenne portée conçu il y a trente ans], tirée depuis un avion. » Une analyse partagée par de nombreux experts, évoquant parfois, en parlant du Kinjal, « une arme de propagande » pour Moscou.

L’Ukraine réclame un renforcement de sa défense anti-aérienne

Il n’empêche que ces armes promettent d’être très dévastatrices. « Si les missiles avaient atteint leurs cibles, les conséquences auraient été catastrophiques » a admis mardi le commandant en chef de l’armée ukrainienne Valery Zaloujny. Dans ce contexte, et face à l’intensification des attaques aériennes russes ces derniers jours, l’Ukraine a « besoin de plus de systèmes » de défense antiaérienne et de « munitions pour eux », a relevé le général Zaloujny. « Il n’y a aucune raison de croire que l’ennemi s’arrêtera ici », a-t-il prévenu.

Le 19 décembre dernier, le président Volodymyr Zelensky avait annoncé que l’Ukraine allait recevoir « plusieurs » nouveaux systèmes américains de défense antiaérienne Patriot, précieux pour contrer les attaques de la Russie. Ce sont notamment eux qui auraient déjoué les tirs de Kinjal. « Je ne donnerai pas le nombre, mais plusieurs systèmes Patriot seront envoyés en Ukraine pour protéger notre pays pendant l’hiver » assurait le président ukrainien.