C’est quoi le mystérieux « syndrome de La Havane » qui frappe les diplomates américains ?
SANTÉ•Dans une enquête internationale publiée ce lundi, trois médias affirment que les diplomates auraient été victimes d’une arme sonique utilisée par les agents du service de renseignement militaire russeC.G. avec AFP
L'essentiel
- Nausée, troubles de la vision, migraines… Depuis 2016, des dizaines de diplomates américains ont été frappées par des « incidents anormaux de santé » appelés « syndrome de la Havane ».
- Si les premiers cas ont été répertoriés à Cuba, d’autres ont été détectés un peu partout dans le monde lors de ces huit dernières années.
- Ce lundi, une enquête internationale affirme que la Russie serait mêlée à l’affaire. Les diplomates auraient été victimes d’une arme sonique, avancent-ils. Ce que dément Moscou.
On l’appelle le « syndrome de la Havane ». Un mal mystérieux qui a commencé par frapper les diplomates installés à Cuba. Depuis, il s’est répandu un peu partout dans le monde. Une enquête, menée par plusieurs médias et publiée ce lundi, révèle que les services de renseignements militaires russes pourraient y être étroitement liés. 20 Minutes vous explique tout.
De quoi parle-t-on ?
Migraines, vertiges, nausées, troubles de la vision… En 2016, des dizaines de diplomates américains et canadiens, installés à Cuba, ont été successivement frappées de maux soudains et surtout inexpliqués. D’où l’expression « syndrome de la Havane ».
Ces « incidents anormaux de santé », selon la terminologie employée aux Etats-Unis, ont ensuite été signalés ailleurs dans le monde : en Chine, en Allemagne, en Australie en Autriche mais aussi en Russie et à Washington.
Est-ce dangereux ?
Des examens poussés réalisés sur des patients n’ont pas révélé de lésions cérébrales « notables ». A l’exception de « symptômes de fatigue », de « stress post-traumatique » ou de « dépression », note une agence de santé américaine.
Ces résultats ont pourtant été remis en cause par d’autres chercheurs estimant que la technologie actuelle d’IRM, utilisée lors de ces examens, est « potentiellement insensible, ou mal calibrée » pour détecter les caractéristiques des mystérieux troubles.
« Il est important de reconnaître que ces symptômes existent bel et bien. Ils provoquent d’importantes perturbations dans la vie de ceux qui en sont touchés, et peuvent être assez durables, handicapants, et difficiles à traiter », estime Leighton Chan, chercheur pour l’INH (instituts nationaux de santé).
Comment l’expliquer ?
L’affaire a entraîné dès le début de vastes spéculations sur son origine. Certains responsables américains ont minimisé au départ les symptômes parfois attribués au stress. D’autres ont évoqué en privé de possibles attaques, soupçonnant déjà des pays comme la Russie, même si le renseignement américain avait estimé, en mars 2023, « très improbable » qu’une puissance étrangère ou une arme soit à l’origine des troubles mystérieux.
Ce lundi, une enquête internationale révèle que la Russie serait étroitement liée à l’affaire. Le journal russe indépendant The Insider, le magazine allemand Der Spiegel, et la chaîne américaine CBS, affirment que ces diplomates ont pu être la cible d’une arme sonique utilisée par le service de renseignement militaire russe. Une arme maniée par les membres de l’unité 29155.
Cette unité, chargée des opérations à l’étranger, s’est déjà retrouvée au centre de plusieurs affaires. Elle a notamment été accusée de la tentative d’empoisonnement de l’ancien espion russe Sergueï Skripal au Royaume-Uni en 2018. « Leur champ d’action est mondial pour la conduite d’opérations létales et d’actes de sabotage », estime un ancien haut responsable de la CIA auprès de The Insider.
Que répond la Russie ?
Moscou a aussitôt rejeté cette « accusation sans fondement ». « Ce sujet a été gonflé dans la presse depuis plusieurs années déjà. Et depuis le début, c’est souvent associé à la Russie », a regretté le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov lors d’une conférence de presse. « Mais personne n’a jamais publié de preuve convaincante », ajoute-t-il.