Italie : L’auteur de « Gomorra » condamné pour avoir diffamé Giorgia Meloni
liberté d’expression•L’écrivain Roberto Saviano s’était insurgé de la politique de la Première ministre sur la crise des migrants20 Minutes avec agences
Le journaliste et écrivain italien Roberto Saviano a été condamné jeudi à 1.000 euros d’amende avec sursis pour avoir diffamé la Première ministre d’extrême droite. L’auteur à succès de Gomorra avait injurié Giorgia Meloni en 2020 en raison de ses positions anti-migrants.
A l’époque, Roberto Saviano avait été interrogé dans une émission télévisée sur la mort dans un naufrage d’un bébé de six mois venant de Guinée. Ce nourrisson, Joseph, était l’un des 111 migrants secourus par le navire humanitaire Open Arms. Il était décédé avant d’avoir pu recevoir des soins médicaux. Dans une vidéo tournée par des sauveteurs et montrée à l’écrivain, on peut entendre la mère du bébé pleurer.
« Vous êtes des salauds ! »
L’homme, visiblement bouleversé, avait alors pointé du doigt Giorgia Meloni et Matteo Salvini, le chef de la Ligue anti-immigration aujourd’hui vice-Premier ministre. « Je veux juste dire à Meloni, et à Salvini, vous êtes des salauds ! Comment avez-vous pu ? », s’était insurgé Roberto Saviano.
Giorgia Meloni avait déclaré en 2019 que les navires d’ONG humanitaires qui secourent les migrants « devraient être coulés », alors que les migrants sauvés par les ONG ne représentent que 5 % du total arrivant en Italie. Matteo Salvini, en tant que ministre de l’Intérieur la même année, avait bloqué l’arrivée de ces navires en Italie.
Une peine symbolique
Lors du procès, les avocats de la Première ministre avaient réclamé 75.000 euros de dommages-intérêts, estimant que l’écrivain avait « utilisé un langage excessif, vulgaire et agressif ». Roberto Saviano encourait également trois ans de prison. Il a finalement été condamné à une peine symbolique, puisque le parquet avait requis une amende de 10.000 euros.
L’avocat de l’auteur du best-seller international sur la mafia napolitaine a aussitôt annoncé son intention de faire appel. A sa sortie du tribunal, Roberto Saviano a dénoncé « ce procès (qui) est une intimidation » du gouvernement dirigé par Giorgia Meloni. Avant d’ajouter : « Il n’y a pas d’honneur plus grand pour un écrivain que de voir ses propres paroles portées devant un tribunal ».
« Une attaque contre la liberté d’expression »
L’association d’écrivains PEN International, qui défend la liberté d’expression, voit dans ce jugement « une attaque contre la liberté d’expression ». Sa porte-parole Sabrina Tucci a dénoncé dans un communiqué « un dangereux avertissement pour tous les écrivains et journalistes, un message invitant à mesurer ses propres paroles pour ne pas risquer de longues batailles juridiques, des difficultés financières, des souffrances psychologiques et la prison ». L’Italie est au 41e rang du classement mondial de la liberté de la presse 2023 publié par Reporters sans frontières.