Etats-UNisTout comprendre à la grève inédite qui frappe l’industrie automobile

C’est quoi cette histoire de grève qui paralyse l’industrie automobile en Amérique ?

Etats-UNisEn pleine renégociation des conventions collectives, le syndicat des travailleurs automobiles a annoncé une grève pour faire pression sur les trois géants du secteur (Stellantis, General Motors, Ford)
O.O avec AFP

O.O avec AFP

L'essentiel

  • Le syndicat des employés des trois grands constructeurs automobiles américains (General Motors, Stellantis, Ford) a annoncé une grève dans plusieurs usines d’assemblage.
  • Les négociations quadriennales pour dresser les nouvelles conventions collectives n’ont pas abouti. Le syndicat n’a pas obtenu les hausses salariales et les jours de repos supplémentaires demandés.
  • La dernière grande grève dans le secteur remonte à 2019. A l’époque, seul le groupe General Motors avait été touché. Le mouvement avait duré six semaines.

«Nous avons dit aux entreprises, depuis le début, que le 14 septembre était une date butoir, pas un jalon ». Shaw Fain avait prévenu. Ce vendredi matin, le président du syndicat United Auto Workers (UAW), qui réunit des travailleurs des trois grands constructeurs automobiles américains (General Motors, Stellantis, Ford), a annoncé le démarrage d’une grève. Pourquoi cette grève pourrait être historique ? Comment réagissent les patrons ? Et les responsables politiques ? 20 Minutes fait le point sur ce conflit social d’ampleur aux Etats-Unis.

Que s’est-il passé ?

Entamées il y a deux mois, les négociations pour établir de nouvelles conventions collectives quadriennales dans l’industrie automobile n’ont pas débouché sur un accord. L’UAW réclame une revalorisation salariale de près de 40 % sur quatre ans, les trois constructeurs se sont arrêtés à mi-chemin : 20 %. Les autres revendications (plus de jours de repos et de meilleures retraites) ont aussi été balayées.

Alors que le conflit social s’ancre, les patrons des trois groupes s’inquiètent des répercussions économiques d’une grève suivie. Mark Reuss, le président de General Motors a estimé qu’un mouvement social constituerait une « issue très très triste ». « Pour une personne dans nos usines qui ne travaille pas, ce sont six autres qui ne travaillent pas », a-t-il rappelé. De son côté, Ford s’est dit « absolument résolu à parvenir à un accord récompensant les employés ». Un cabinet de conseil a évalué qu’une grève de dix jours pourrait représenter plus de cinq milliards de dollars de perte de revenus pour l’économie américaine.

Pourquoi cette grève pourrait être historique ?

Face au refus du patronat, Shaw Fain a lancé la grève devant le site Ford de Wayne (Michigan), sous les applaudissements et les coups de klaxon. « Ce soir, pour la première fois de notre histoire, nous allons faire grève chez les trois gros constructeurs », a proclamé le syndicaliste. Pour l’heure, trois usines d’assemblage, dans l’Ohio, le Michigan et le Missouri, sont à l’arrêt. Environ 12.700 syndiqués vont débrayer vendredi. Le dirigeant de l’UAW a enjoint le reste de ses troupes (146.000 adhérents au total) à se préparer à agir si les négociations continuent à patiner.

« Cette entreprise se fait de l’argent sur notre travail depuis des années. Je pense qu’il est temps qu’elle rende quelque chose », a témoigné Paul Sievert, employé chez Ford depuis 29 ans. Selon le média Axios, le syndicat de travailleurs de l’industrie automobile disposerait d’un sacré matelas financier en cas de durcissement du mouvement. La caisse de grève, d’un montant de 825 millions de dollars, pourrait permettre de faire tenir la protestation pendant un peu moins de trois mois, selon le cabinet de conseil Evercore ISI, comme le rappelle BFM Business.

La dernière grève d’ampleur dans le secteur automobile remonte à quatre ans, quasiment jour pour jour. En 2019, les salariés de General Motors s’étaient mis en grève, pour une durée de six semaines.

Pourquoi cette grève embarrasse Joe Biden ?

En plein cœur de l’été, le président américain avait plaidé pour un accord « gagnant-gagnant » et « équitable » pour solidifier le droit des travailleurs de l’automobile et les accompagner pendant la transition vers les véhicules électriques. Joe Biden s’est entretenu au téléphone jeudi soir avec Shawn Fain et les dirigeants des constructeurs.

Alors qu’il s’est autoproclamé « président le plus favorable aux syndicats de l’histoire », le chef d’Etat américain se retrouve en position inconfortable. Il soutient le mouvement, mais un conflit social prolongé pourrait l’embarrasser et avoir des conséquences politiques, à l’approche de la présidentielle, d’autant que son bilan économique est critiqué.