La classe américaine« Citizen Kane », Ayn Rand… Quelles sont les références culturelles de Trump ?

Investiture de Donald Trump : « Citizen Kane », Ayn Rand, « Hannibal Lecter »… Les références culturelles du président

La classe américaineA l’approche de l’investiture du président élu des Etats-Unis, on apprend qu’un roman intitulé « La Grève » (mais pas celle que vous croyez) figure en bonne place dans l’univers des références culturelles de Donald Trump (et d’Elon Musk)
Alexandre Vella

Alexandre Vella

L'essentiel

  • Ce lundi 20 janvier, à l’issue de la cérémonie d’investiture, Donald Trump deviendra officiellement le 47e président des Etats-Unis.
  • A cette occasion, 20 Minutes s’est demandé quels sont les films, livres ou chansons préférés de Donald Trump.
  • Réponse avec entre autres Ayn Rand, romancière étendard des libertariens et « Citizen Kane », qui célèbre (et critique) l’accumulation de richesse.

On imagine volontiers que Donald Trump s’imagine plus facilement sur un green de golf, putter en mains, que sur une chaise à bascule derrière un livre. Et s’il est connu pour s’exprimer avec des phrases simples, pour ne pas dire simpliste, dans un langage peu riche en vocabulaire, Donald Trump ne semble pas dépourvu de références culturelles.

Que ce soit d’authentiques passions ou des références nécessaires à sa (très) haute position sociale, voire opportunistes pour parler à un certain électorat, 20 Minutes a voulu savoir quelles sont les œuvres que Donald Trump se plaît à citer, et où il s’identifie aux protagonistes. Un moyen de mieux comprendre le 47e président des Etats-Unis, investi ce lundi 20 janvier pour un second mandat à la Maison-Blanche.

« Citizen Kane », le milliardaire sans bonheur

Monument du cinéma pour avoir notamment introduit les plans-séquences et la profondeur de champ, Citizen Kane est un film sorti en 1941, cinq ans avant la naissance de Donald Trump. Ce n’est sans doute pas pour son esthétique cinématographique révolutionnaire pour l’époque que Donald Trump cite le chef-d’œuvre d’Orson Welles comme son film favori.

Ce choix, le businessman l’expliquait en 2002 dans une interview vidéo accordée au documentariste américain Errol Morris. « Citizen Kane parle de l’accumulation de richesses et, à la fin de cette accumulation, vous voyez qu’il n’y a pas de plaisir […] Il avait la richesse mais pas le bonheur. Je crois que la richesse isole des autres personnes. Peut-être puis-je comprendre ça », analyse Donald Trump face caméra.

Donald Trump s’identifie donc fortement au héros du film, le milliardaire et magnat de la presse Charles Foster Kane, sur lequel enquête un journaliste à sa mort pour découvrir un personnage mégalomane, égoïste et solitaire. Une description qui ne figurait toutefois pas dans l’analyse faite par Donald Trump, définitivement plus friand de Citizen Kane que de Douze hommes en colère, film de 1957 qui questionne la justice.

Ayn Rand, la romancière des libertariens

Elle est peu connue en France mais « vend », plus de quarante ans après sa mort, encore plusieurs centaines de milliers de livres chaque année aux Etats-Unis. Le succès continu et croissant d’Ayn Rand, romancière russe qui a fui l’URSS pour les Etats-Unis, devient plus vivace à mesure que la pensée de celle qui a pu célébrer « l’égoïsme rationnel » gagne les « élites » américaines.

Elon Musk y fait régulièrement allusion, de même que Donald Trump. Dans un entretien donné à la journaliste Kristen Powers peu avant sa première élection de 2016, le 47e président des Etats-Unis expliquait qu’il était fan d’Ayn Rand et s’identifiait à Howard Roark, le héros du roman La source vive. Ce dernier est un architecte qui dessine des immeubles avant de les dynamiter de rage face aux règles administratives. Et lorsque la journaliste lui fait remarquer que La source vive est, en un sens, un roman qui parle de la tyrannie exercée par une pensée dominante, Donald Trump répond : « C’est ce qu’il est en train de se passer ».

L’autre grande œuvre d’Ayn Rand est un roman intitulé La grève, mais dans lequel ce ne sont pas les travailleurs et ouvriers qui cessent leur activité. Dans un renversement radical de la perception marxiste de l’économie et de l’Histoire, scientifiques, entrepreneurs ou artistes disparaissent mystérieusement, provoquant crises et catastrophes. Un moyen de dénoncer un Etat social et une société de plus en plus collectivisée et réglementée.

La romancière américaine, traduite en français seulement à partir de 2011, a été élevée au rang de maîtresse à pensée et d’étendard des libertariens, qui érigent les libertés individuelles et économiques au-dessus des autres.

« Rich men north of Richmond », on rejoue la guerre de sécession ?

Entre les titres très années 1980 des Village people, David Bowie et Elton John qui parsèment ses meetings, Donald Trump a introduit une chanson récente : celle d’Oliver Anthony. Cet homme était un parfait inconnu jusqu’à ce que son titre country Rich men north of Richmond, diffusé en août 2023 sur YouTube, ne se hisse en un instant au sommet des charts, devant Taylor Swift, à la faveur d’un relais par le très conservateur podcasteur et libertarien Joe Rogan.

Les paroles de Rich men north of Richmond parlent - en résumé - des honnêtes travailleurs aux salaires de merde, de l’Etat obèse de taxes, des élites corrompues, le tout saupoudré de complotisme QAnon. Le titre est une référence explicite à la guerre de Sécession (1861-1865), Richmond ayant été la capitale des Etats confédérés qui a fini par perdre contre l’Union et sa capitale, Washington.

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Oliver Anthony interprète sa chanson depuis sa maison de Farmville (7.000 habitants, en Virginie) qu’on devine en pleine campagne, entourée de forêts et sur une scène improvisée où ses trois chiens dorment paisiblement. Devenu un symbole de l’alt-right américaine, le chanteur a pourtant pris ses distances avec cette instrumentalisation politique, dans une vidéo publiée depuis la cabine de son vieux 4x4. « Je déteste voir ma chanson être instrumentalisée par la droite, et essayée d’être discréditée par la gauche […] Toutes mes chansons qui évoquent les classes sociales sont une défense des pauvres », explique le chanteur de 32 ans, qui ajoute que ses messages concernent d’abord « l’inefficacité du gouvernement ».

Message reçu 5 sur 5 par Donald Trump et Elon Musk, qui va diriger le département de « l’efficacité gouvernementale » (DOGE)

« Hannibal Lecter » pour haranguer la foule

Plus qu’une référence culturelle à même de témoigner de ses schémas de pensées, le 47e président des Etats-Unis a, durant sa campagne, multiplié les références à « Hannibal Lecter », ce qui lui a permis de faire un parallèle entre le tueur en série cannibale et les émigrés. « Il y a des personnes que nous ne voulons pas voir entrer dans notre pays et elles arrivent sans aucun contrôle, sans aucune vérification », détaillait-il lors d’un meeting dans le New Jersey en mai 2024 après son évocation du film oscarisé de Jonathan Demme,

Il a cité le Silence des agneaux plus d’une vingtaine de fois en l’espace d’un trimestre.