Retour sur l'opération Anfal

Retour sur l'opération Anfal

Le président irakien déchu Saddam Hussein et six autres ex-responsables seront jugés à partir du 21 août pour « génocide »

L'opération Anfal, menée à la fin des années 1980 et pour laquelle le président irakien déchu Saddam Hussein et six autres ex-responsables seront jugés à partir du 21 août pour « génocide », constitue l'apogée de plusieurs décennies d'hostilité entre les Kurdes et Bagdad.


Les juges irakiens ont qualifié l'opération Anfal d'acte de génocide contre le peuple kurde, tandis que l'ancien régime irakien a défendu ses actions comme étant une simple opération de contre-insurrection nécessaire en temps de guerre.


Selon diverses estimations, plus de 100.000 personnes ont été tuées et plus de 3.000 villages détruits pendant cette campagne qui a provoqué également un déplacement massif de la population kurde.


Entre 1987 et 1989, de nombreux assauts sont lancés contre les Kurdes dans le nord du pays, avec notamment le gazage de la population de Halabja en 1988, qui fait 5.000 morts. L'armée irakienne avait gazé cette ville en représailles à la prise de la ville par des combattants kurdes (peshmergas) soutenus par les Gardiens de la révolution iraniens. Cependant, le cas de Halabja n'est pas inclus dans l'accusation rendue publique mardi, qui vise huit opérations officielles d’Anfal.


Du nom d'une sourate du Coran signifiant "butin", Anfal consiste en des bombardements systématiques, des gazages et des assauts menés contre diverses parties de la région autonome du Kurdistan en 1988. Vers 1986, de larges secteurs de la région kurde ont été libérés du contrôle du gouvernement central, soumis à des pressions croissantes en raison de la guerre avec l'Iran. Début 1987, Saddam Hussein charge ainsi son cousin, Ali Hassan al-Majid, dit "Ali le chimique", de ramener la région sous son contrôle. Ali déclare des "zones interdites" dans la région, où il considère tous les habitants comme des insurgés.


Les villageois sont transférés vers des zones pouvant être facilement contrôlées par Bagdad, alors que les "zones interdites" sont avant tout bombardées et puis envahies.

Selon l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch (HRW), basée aux Etats-Unis, ces campagnes étaient plus que de simples opérations de contre-insurrection. Elles étaient destinées à exterminer le peuple kurde. "Il faut souligner que les meurtres n'ont pas été commis pendant les opérations de contre-insurrection : les détenus étaient tués plusieurs jours ou semaines après que les forces armées eurent atteint leurs objectifs", affirme HRW, dans un rapport détaillé sur la campagne Anfal, datant de 1993. "Finalement, il y a la question de l'intention, qui est au coeur de la notion de génocide", souligne le rapport, détaillant des documents et témoignages qui démontrent clairement cette intention.


La personne de Ali Hassan al-Majid est centrale dans l'affaire ainsi que les nombreuses accusations dont il fait l'objet, notamment d'utilisation de gaz toxiques, d'exécutions massives, et d'établissement de camps de détention pour soumettre le Nord kurde.

Les cinq autres accusés dans la vague de répression sanglante anti-kurde sont des ex-responsables du parti Baas, au pouvoir à l'époque, et un ex-ministre de l'Industrie.