MONDEL'Iran s'enfonce «dans une stratégie délibérée de provocation»

L'Iran s'enfonce «dans une stratégie délibérée de provocation»

MONDENucléaire, pétrole, manœuvres militaires, Téhéran est revenue sous le feu des projecteurs ces dernières semaines...

Alors que la Syrie subit les foudres de la communauté internationale, l’Iran ne se fait pas oublier pour autant dans la région, ne pouvant guère compter que sur le Venezuela d’Hugo Chavez pour lui apporter un peu de soutien. 20 Minutes revient sur les points chauds de l’actualité de la république islamique qui, selon Bruno Tertrais, maître de recherches à la Fondation pour la recherche stratégique, «sont liés dans une stratégie délibérée de provocation».

Le nucléaire
Il est toujours au cœur des tensions entre l’Iran et la communauté internationale, qui accuse la république islamique de vouloir se doter de l’arsenal nucléaire. Malgré la mise sous surveillance de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), la production d'uranium enrichi jusqu’à 20% a débuté sur le site d'enrichissement de Fordo, a confirmé l’organisation ce mardi. L'uranium enrichi à moins de 20% est utilisé uniquement à des fins civiles mais si l'enrichissement est poussé à plus de 90%, il peut servir à fabriquer l'arme atomique.

Malgré les dénégations répétées de la république islamique, «personne ne sait ce qui est dans la tête d’Ali Khamenei [le Guide suprême du pays, NDLR], mais tout indique que les Iraniens veulent disposer de la bombe très rapidement» et l’utiliser à des fins de dissuasion nucléaire, explique Bruno Tertrais, auteur de L’Atlas mondial du nucléaire (Autrement, 2011). Cependant, «s’ils souhaitent la fabriquer, on ne le sait pas», précise le chercheur. «Pour beaucoup d’Israéliens, c’est une ligne rouge que l’Iran a franchie afin de se mettre à l’abri d’une frappe militaire», le site de Fordo étant souterrain, ajoute-t-il, même si, selon lui, plus ils parlent d’une riposte militaire, moins il y a de chances que cela se produise de manière concrète.

L’embargo sur le pétrole
La réponse internationale est particulièrement épineuse car, d’après Bruno Tertrais, «il n’y a que des mauvaises options et il s’agit de choisir la moins mauvaise, soit accroître les sanctions.» L’embargo sur le pétrole est l’une des sanctions majeures envisagées par l’Union européenne, qui se réunira sur le sujet le 23 janvier prochain. Du côté des Etats-Unis, Barack Obama a signé le 31 décembre dernier une loi qui impose des sanctions à toute institution financière faisant des transactions avec la Banque centrale d'Iran, principale chambre de compensation pour les revenus pétroliers iraniens.

Ces sanctions internationales, si elles ont appliquées dans leur intégralité au cours des prochains mois, pourraient empêcher l'achat de pétrole iranien par la plupart des pays et seraient «assez contraignantes et douloureuses» pour l’Iran, selon Bruno Tertrais. Le secteur pétrolier représente en effet 60% de l'économie iranienne et que les puissances occidentales disposent de plans pour compenser la perte des pays les plus dépendants du pétrole iranien comme la Chine, l’Inde ou le Japon.

Le détroit d’Ormuz
Face aux menaces d’embargo, l’Iran brandit la fermeture du détroit d'Ormuz, voie stratégique par laquelle transitent chaque jour 16 millions de barils de pétrole. La plupart des experts, dont Bruno Tertrais, «doutent» que la république islamique puisse prendre la décision d’une «fermeture délibérée». «On connaît la chanson. Aucun des deux camps ne veut la guerre. C'est une rhétorique essentiellement exagérée», a indiqué à Reuters Cliff Kupchan, spécialiste de l'Iran au cabinet de consultants Eurasia Group.

Bruno Tertrais évoque malgré tout de possibles escarmouches qui pourraient dégénérer en raison des manœuvres navales entreprises dans le détroit au début du mois et qui pourraient reprendre en février. L’Iran a également menacé de prendre des mesures en cas de retour dans les eaux du Golfe d'un porte-avions américain. Début décembre, un drone furtif américain avait été capturé par les autorités iraniennes sur leur territoire. Les Etats-Unis ont demandé en vain la restitution de l'engin,désormais «propriété de la République islamique».