DÉCRYPTAGELibye: Les options sur la table pour la communauté internationale

Libye: Les options sur la table pour la communauté internationale

DÉCRYPTAGEcôté de l'option militaire, d'autres choix s'offrent aux occidentaux pour faire pression sur le régime de Kadhafi...
Bérénice Dubuc

Bérénice Dubuc

Il faut, selon les ministres des Affaires Etrangères anglais et français, faire «tout ce qui est en leur pouvoir pour augmenter la pression sur le régime Kadhafi et parvenir à mettre fin à la violence». Mais quelles sont les options dont dipose la communauté internationale pour peser face à Mouammar Kadhafi, qui a réaffirmé mercredi que «le sang coulerait à flot en cas d’intervention étrangère sur le sol libyen»? 20minutes.fr fait le point.

L’action militaire, en discussion, possible mais pas imminente

La communauté internationale, principalement les membres de l’Otan, mais également d'autres pays alliés des Etats-Unis, discutent d'options militaires concernant la Libye. Cependant, si des bâtiments de l’US Navy sont sur zone, le département d'Etat n'a toujours pas fait de demande d'intervention, et les navires pourraient n'être utilisés que pour escorter un effort humanitaire. Car non seulement les Etats-Unis ne sont pas prêts à envahir la Libye comme ils l’ont fait en Irak, indique Bruno Tertrais, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique, mais en plus de nombreux alliés sont contre l’option militaire.

Ainsi, «la France, pour ce qui la concerne, ne pense pas que dans le contexte actuel une intervention militaire des puissances de l'Otan serait bien reçue au sud de la Mediterranée et qu'elle pourrait être contre-productive», a estimé ce jeudi Alain Juppé. Idem du côté de l’Allemagne. Son ministre des Affaires Etrangères, Guido Westerwelle, a indiqué: «Nous ne participerons pas et nous ne débattrons pas d'une intervention militaire.»

La zone d’exclusion aérienne en débat

Pire, il a ajouté que l’Allemagne estimait que la situation n'était pas mûre pour décider de l'imposition d'une zone d'exclusion aérienne en Libye, ou «no fly zone», c’est-à-dire l’interdiction de vol de l’aviation de Kadhafi pour éviter les attaques contre les révolutionnaires et/ou les civils. La Ligue Arabe a également dit être opposée à une intervention militaire directe, mais a indiqué mercredi qu’elle était partisane de la mise en place d’une zone d'exclusion au-dessus de la Libye, en coordination avec l’Union Africaine. La France et la Grande-Bretagne ont pour leur part indiqué ce jeudi qu’elles étaient d'accord pour oeuvrer à la planification d'une zone d'exclusion aérienne dans le pays, «compte tenu des menaces brandies par le colonel Kadhafi» et «si la menace de l'utilisation de la force contre les populations se concrétisait au cours des prochains jours».

Le ministre anglais des Affaires étrangères, William Hague, a toutefois souligné qu'il ne s'agissait pour le moment que de «préparatifs», et non d'un feu vert pour lancer une telle opération. En effet, la mise en place d’une «no fly zone» suppose le déploiement d’un dispositif militaire conséquent, difficile alors que certains sont engagés sur d’aurtes fronts, dans le contexte de crise économique et de restriction budgétaire. De plus, de hauts responsables militaires américains ont indiqué que la mise en place d'une zone d'exclusion aérienne serait «extraordinairement compliquée». Une résolution émise par les Nations Unies permettrait d’obtenir un soutien juridique, mais la Chine et la Russie y sont opposées.

La piste de la médiation vénézuélienne

Autre piste, à laquelle le leader libyen a donné ce jeudi son accord: l’offre du président du Venezuela Hugo Chavez, sont principal allié en Amérique Latine, qui se propose de mettre en place une médiation avec les révolutionnaires libyens pour résoudre la crise politique que connaît le pays. Le ministre venezuelien des Affaires Etrangères, Nicolas Maduro, aurait discuté de l’offre avec Amr Moussa, le dirigeant de la Ligue Arabe. Ce «plan» incluerait des émissaires d’Amérique Latine, d’Europe et du Moyen-Orient pour atteindre un compromis entre les deux parties.

Problème: Mustafa Abdel Jalil, désormais à la tête du pendant politique des révolutionnaires, a indiqué qu’il refusait totalement l’idée de discussions avec Kadhafi. Et Paris et Londres ont également rejeté la proposition, le ministre français des Affaires Etrangères Alain Juppé indiquant: «Ce que nous demandons, c'est que (le colonel Kadhafi) s'en aille (...) Une médiation visant à permettre au colonel Kadhafi de se succéder à lui-même n'est évidemment pas la bienvenue.»

La pression juridique

Ultime atout de la communauté internationale, juridique celui-là, suggéré par Hasni Abidi, directeur du Centre d'études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen (Cermam) à Genève et professeur invité à Paris 1: lancer une enquête sur l’attentat de Lockerbie et demander l’arrestation de Mouammar Kadhafi, après les révélations de l'ancien ministre libyen de la Justice Mustafa Abdel-Jalil, qui a affirmé que Kadhafi avait personnellement ordonné l'attentat de 1988.

Le colonel Kadhafi, ses fils et les membres de son premier cercle pourraient également être tenus pour responsables des crimes commis par leurs forces de sécurité, selon le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Luis Moreno-Ocampo, qui a ajouté que la CPI devrait délivrer ses mandats d'arrestation dans quelques mois.