Mineurs bloqués au Chili: comment s'organiser pour survivre?
CATASTROPHE•Les 33 mineurs vont attendre au moins quatre mois que les secouristes les sortent de leur piège. Ils doivent aussi s'organiser de leur côté...Julie Rasplus
Lundi, 33 mineurs bloqués à 700 mètres de profondeur au Chili, après un éboulement survenu le 5 août dernier, ont reçu leurs premiers aliments et médicaments. Cela faisait dix-sept jours qu’ils attendaient du secours. Après être entrés en contact avec eux, dimanche, les secouristes ont fait savoir que l’opération de sauvetage pourrait durer près de quatre mois.
Comment les mineurs ont-ils réussi à survivre pendant 17 jours?
Ils auraient survécu en buvant de l’eau de ruissellement. Mais pas seulement. Les hommes se sont apparemment réfugiés dans un abri percé dans la roche pouvant contenir 50 personnes. Ils y ont trouvé des vivres, normalement prévues pour permettre de tenir 72 heures. Pour survivre jusque là, chaque mineur a donc avalé deux bouchées de thon en boîte et un demi-verre de lait toutes les 48 heures.
Que risquent les mineurs?
Les 33 mineurs sont confinés à 700 mètres de profondeur dans un espace long d’un peu plus d’1,5 km. Défi principal? Parvenir à vivre en groupe dans cet espace clos, pendant quatre mois. «Dans une telle situation, le groupe est très important», explique Michel Siffre, scientifique et spéléologue français, à l’origine des premières expériences sur la chronobiologie humaine et auteur de Hors du temps (Ed. Julliard, 1962). «C’est avant tout un facteur de soutien» mais «il peut devenir vecteur de tensions», ajoute-t-il.
Pour éviter les scénarios catastrophes, comme ce fut le cas en 1972 avec l’accident d’avion dans la Cordillère des Andes, les mineurs doivent conserver un contact avec l’extérieur. «Les individus risquent, sinon, d’être soumis à un stress trop important, voire insupportable, puisque l’absence de contacts peut mener au suicide», prévient Sophie Lumineau, enseignant-chercheur à l’Université de Rennes 1. Garder «une dynamique positive» devrait aussi permettre aux mineurs d’oublier les troubles de sommeil, l’anxiété et l’irritabilité dont ils pourraient souffrir.
Comment vont s’organiser les mineurs pour survivre?
Les 33 mineurs doivent élire un leader, selon Michel Siffre. Le chef s’occupera d’organiser la vie de la communauté, en rationnant les vivres ou en décidant des heures de coucher et réveil. «Avoir un chef donne confiance», précise le scientifique. Il semblerait que ce rôle incombe au plus expérimenté des mineurs, à savoir Mario Gomez, le chef de tour âgé de 63 ans.
Côté physiologique, Sophie Lumineau se veut rassurante: «L’organisme s’organise seul pour générer un rythme qui lui est propre et tourne en général autour de 25 heures». L’obscurité va modifier les instants de sommeil. Mais selon la scientifique le ratio veille/sommeil sera le même qu’en surface: «Le sommeil occupe environ un tiers du temps pour 2/3 de veille».
Et si les secouristes réussissent à les sauver?
Pour Michel Siffre, les hommes ne sortiront «pas indemnes» de cet enfermement. Si l’impact psychologique semble évident, des stigmates pourront également apparaître, notamment «des problèmes de vision, après plusieurs semaines dans l’obscurité ou la semi-obscurité», précise le scientifique.