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« C’est une otage »… Cécile Kohler « fête » ses 40 ans détenue en Iran

Iran : « C’est une otage purement et simplement »… Les proches de Cécile Kohler manifestent le jour de ses 40 ans

InterviewSoupçonnée d’espionnage, Cécile Kohler est détenue dans une prison en Iran. Ce mercredi, elle a 40 ans. A cette occasion, un rassemblement est organisé devant l’ambassade iranienne à Paris pour demander sa libération. Sa sœur Noémie témoigne
Gilles Varela

Propos recueillis par Gilles Varela

L'essentiel

  • Cécile Kohler, professeure de lettres de 40 ans, est détenue depuis deux ans et demi dans la prison d’Evin en Iran. Soupçonnée sans raison d’espionnage, elle a été arrêtée en mai 2022 alors qu’elle voyageait avec son compagnon, un ancien professeur de mathématiques.
  • La Française est maintenue dans une section de haute sécurité dans des conditions très dures : isolement cellulaire complet, trois sorties par semaine. Elle dort à même le sol et a très peu de contacts avec l’extérieur.
  • Un rassemblement est prévu ce mercredi devant l’ambassade d’Iran à Paris à l’occasion du 40e anniversaire de Cécile Kohler afin de demander une nouvelle fois sa libération immédiate. Une autre mobilisation sera organisée samedi en Alsace à l’initiative d’Amnesty international.

Pour son quarantième anniversaire, Cécile Kohler restera en prison en Iran. Elle est détenue depuis deux ans et demi dans le centre pénitentiaire d’Evin à Téhéran. Décrite par son entourage comme une personne « profondément humaniste et altruiste », la professeure enseignant dans un lycée des Yvelines est agrégée en lettres modernes. La native du Haut-Rhin s’est rendue en Iran pour faire du tourisme, « le voyage de sa vie », avec son compagnon Jacques Paris avec qui elle a été arrêtée le 7 mai 2022. Tous deux sont soupçonnés par le régime des mollahs d’espionnage.

Sa sœur, Noémie, présidente de son comité de soutien, témoigne des conditions de détention et des espoirs de sa famille auprès de 20 Minutes alors que ce mercredi un rassemblement pour sa libération se tient devant l’ambassade d’Iran, à Paris.

Les raisons de l’arrestation de votre sœur Cécile sont-elles encore floues ?

On n’a jamais eu la moindre information officielle de la part des autorités iraniennes, on ne sait pas s’il y a un dossier judiciaire, elle n’a pas accès à des avocats indépendants, donc de ce côté-là il n’y a rien du tout. Nous, ce que l’on sait, c’est que c’est une otage purement et simplement et que cela ne se joue pas dans une cour de justice mais bien au-delà.

Quelles sont les conditions de sa détention ?

Elles sont terribles et très très dures. Non seulement elle est otage mais en plus elle est maintenue dans une section de haute sécurité, dans la section 209 de la prison d’Evin. Une section malheureusement connue en Iran. Normalement les gens qui passent par là n’y restent que quelques mois avant d’être transférés dans le quartier général, où les conditions de détention sont moins rigoureuses, mais Cécile y est détenue depuis deux ans et demi et c’est terriblement angoissant pour nous. Elle a passé plusieurs mois à l’isolement cellulaire complet. Maintenant, elle a des codétenus qui changent très régulièrement. Elle dort à même le sol, elle ne peut sortir que trois fois par semaine de sa cellule pendant trente minutes. Dans cette section-là, on sait que lorsque l’on déplace les détenus de leur cellule, on leur bande les yeux…

Quels contacts avez-vous avec Cécile ?

Les dernières nouvelles datent du 16 septembre. Un appel de sept minutes, sous haute surveillance. C’était un peu plus long que les autres fois, mais ça reste extrêmement court. Elle continue à se battre, elle s’accroche, même si c’est très très dur. Elle me pose la question récurrente de savoir si on avait des nouvelles des autorités françaises pour une date, une échéance d’une éventuelle libération, malheureusement, je n’avais rien à lui répondre car on n’a aucune information là-dessus.

L’appel s’est déroulé comme d’habitude en visio WhatsApp. Il n’était pas prévu à l’avance et comme les autres fois, elle n’était pas libre de parler. Ses appels sont très irréguliers. Par exemple entre avril et juillet, on n’a eu aucun signe de vie, il n’y a pas de règle et on n’est jamais préparé à son appel. On est tout le temps aux aguets, pour ne pas le louper. C’est parfois sur le téléphone de mon frère, le mien, celui de mes parents.

Elle essaie de nous rassurer en nous montrant qu’elle tient le coup. De notre côté on fait tout ce que l’on peut pour lui montrer qu’on est fort, qu’on tient le coup aussi. On a aussi très vite compris que ce qui l’aidait énormément à tenir c’est de lui donner des nouvelles très terre à terre de la famille. Alors on fait des listes que l’on met en commun car on ne sait jamais qui elle va appeler, des listes avec des nouvelles de la famille, des neveux, et on lui transmet.

Est-elle isolée ?

Elle n’a absolument pas accès à l’ambassade de France, elle ne peut pas la contacter. Elle n’a eu que trois visites consulaires depuis son arrestation, des visites très courtes d’une dizaine de minutes sous surveillance. Le seul contact qu’elle ait avec le monde extérieur est les appels, très rares, qu’elle peut nous passer de temps en temps. Son absence est un stress et une angoisse quotidienne qui frappe toute la famille. On avance, on ne s’habitue pas à cette situation, le combat pour sa libération fait partie de nos vies maintenant.

Comment appréhendez-vous les tensions internationales ?

Depuis deux ans et demi, on vit au rythme des actualités iraniennes. C’est vrai qu’on est très attentifs à ce qui se passe là-bas, et très inquiets forcément quand on voit comment la situation s’aggrave, mais c’est toujours difficile de décrypter l’impact que cela peut avoir sur nous. Et avec le nouveau président en Iran, jusqu’à présent, ça n’a pas fait changer les choses pour nous. Mais on se dit qu’on a un nouvel interlocuteur, une nouvelle personne à qui adresser notre demande de libération immédiate, on s’accroche à l’espoir par ce que l’on a que ça, mais on ne sait pas ce que cela peut donner.

Un rassemblement à 17 heures devant l’ambassade d’Iran à Paris a lieu ce mercredi.

Ce rassemblement ce mercredi est important pour nous, c’est le cap des 40 ans. Le fait qu’elle les passe en prison, pour nous, ça concrétise les années volées par cette situation. Autre chose, lorsqu’elle a appelé mes parents en juillet, elle leur a dit que les autorités iraniennes lui avaient assuré qu’elle serait libérée avant son anniversaire. Donc on y est aujourd’hui et bien sûr rien ne s’est passé.

C’est aussi une façon pour nous, symboliquement, d’interpeller les autorités iraniennes sur cette injustice et de réclamer à nouveau sa libération immédiate mais aussi dans l’intervalle, l’amélioration de ses conditions de détention. Une autre mobilisation est prévue en Alsace, à Erstein, samedi après-midi, à l’initiative d’Amnesty international,