Mais qui est « Fito », le criminel le plus recherché d’Equateur ?
Portrait•Adolfo Macias, dit « Fito », s’est évadé de prison dimanche20 Minutes avec AFP
L’Equateur est en proie à une véritable crise sécuritaire. Au cœur du chaos, lors duquel les gangs de narcotrafiquants ont déjà tué 10 personnes, se trouve un nom. Celui d’Adolfo Macia, alias « Fito ». Mais pourquoi ce nom revient-il ? Qui est cet homme ? 20 Minutes fait le point pour vous.
Pourquoi son nom fait-il la une des journaux ?
Adolfo Macia est le chef des Choneros, un gang d’environ 8.000 hommes. Or, il s’est enfui dimanche de la prison de Guayaquil, dans le sud-ouest du pays. Après l’évasion du criminel le plus recherché du pays, plusieurs mutineries et prises en otage de gardiens ont touché diverses prisons, relayées par d’effrayantes vidéos diffusées sur les réseaux sociaux montrant les captifs menacés par les couteaux de détenus masqués. Mardi, de nouvelles vidéos ont montré l’exécution d’au moins deux gardiens, par arme à feu et pendaison. L’administration pénitentiaire a fait état de 139 membres de son personnel retenus en otage dans cinq prisons du pays, sans commenter les vidéos.
Qui est « Fito » ?
Fine barbe, bouche serrée et sombre regard, Adolfo Macias est un narcotrafiquant de 44 ans. L’homme, photographié également avec de longs cheveux hirsutes et barbe proéminente lors d’un récent transfert de prison, purgeait depuis 2011 une peine de 34 ans de privation de liberté pour crime organisé, trafic de drogue et meurtre. « Fito » s’était déjà évadé en 2013 d’une prison de haute sécurité mais avait été repris au bout de trois mois.
Le chef de gang dirige Los Choneros, apparu dans les années 1990 dans la province côtière de Manabi (sud-ouest), stratégique pour l’exportation de la cocaïne vers les Etats-Unis et l’Europe. On sait peu de choses sur « Fito », si ce n’est son humble passé de chauffeur de taxi et sa capacité de nuisance poussant le gouvernement équatorien à le décrire comme un « criminel aux caractéristiques extrêmement dangereuses ».
Le nom de « Fito » a fait la Une de la presse ces derniers mois après l’assassinat début août de l’un des principaux candidats à l’élection présidentielle : Fernando Villavicencio, ancien journaliste et parlementaire. Abattu par un tueur à gages colombien, il avait fait état peu avant son exécution de menaces de mort de la part du chef des Choneros.
Que sait-on de son temps en prison ?
Dans le quartier du centre pénitentiaire de Guayaquil, où s’affichent des peintures murales à sa gloire, des dessins d’armes, de dollars et de lions, c’était aussi lui le chef. Des vidéos le montrent en train de faire la fête à l’intérieur de la prison avec des musiciens et des engins pyrotechniques. Derrière les hauts murs où l’administration pénitentiaire ne fait pas toujours la loi, il a même enregistré un clip vidéo sur un « narcorroccido » (chanson populaire en l’honneur des narcotrafiquants) à sa gloire : « El corrido del Leon ».
Il apparaît large chapeau sur la tête saluant et riant avec quatre détenus dans la cour de la prison, caressant un coq de combat, sur un air chanté notamment par sa fille, connue sous le nom de Queen Michelle. « Fito » exerçait « un contrôle interne important sur la prison », a souligné la Commission interaméricaine des droits humains (CIDH) dans un rapport en 2022.
Elle soulignait qu’Adolfo Macias, ainsi que Junior Roldan, un autre dirigeant de Los Choneros tué l’année dernière en Colombie, bénéficiaient en prison d’un « traitement différencié et préférentiel de la part des autorités ». Réputé très charismatique, « Fito » a suivi derrière les barreaux des études de droit jusqu’à obtenir son diplôme d’avocat.
Comment s’est-il hissé à la tête du gang Los Choneros ?
Dans le monde de « Fito », s’applique le dicton : « Le roi est mort, vive le roi ». Son ascension à la tête du gang est due aux décès successifs des chefs précédents. Elle s’est accompagnée de la fragmentation du gang qui, jusqu’à récemment, était composé d’une myriade de petits gangs réunis. Les récents changements à la tête de Los Choneros « ont entraîné des luttes intestines au sein du groupe et de ses sous-groupes », selon le centre de recherches Insight Crime. Les Tiguerones et les Chone Killers se sont ainsi désolidarisés et sont devenus de puissants rivaux.
Los Choneros ont établi des liens avec les puissantes organisations criminelles colombiennes (Clan del Golfo) et mexicaines (Cartel de Sinaloa), mais aussi avec des réseaux des Balkans, selon l’Observatoire équatorien du crime organisé. Sur les réseaux sociaux, Los Choneros se présentent comme des bienfaiteurs, des sortes de Robin des Bois, avec des clips vidéo vantant le trafic de drogue. En ligne, ils menacent les journalistes et, sur des rythmes de musique urbaine, lancent des avertissements aux autres gangs rivaux. « Choneros, nous sommes des lions. Avec l’oncle Fito contrôlant le quartier, nous sommes les patrons », dit l’une des nombreuses chansons sur leur chaîne YouTube JF Music Entertainment.