Kosovo : Heurts, maires « illégitimes » et Otan… Tensions avec les protestataires serbes
crise•Dix-neuf soldats hongrois et onze italiens ont été blessés dans les heurts, 52 personnes ont été blessées dans les rangs des manifestants serbesC.d.S avec AFP
Des élections municipales sous tension au Kosovo. La situation est toujours tendue mardi dans le nord du pays où des manifestants serbes continuent d’affluer devant la municipalité de Zvecan. La veille, la ville a été le théâtre de violents heurts ayant fait une trentaine de blessés parmi des soldats internationaux et une cinquantaine parmi les protestataires. Le point sur les derniers événements.
Des élections entachées par la violence
Les Serbes ont boycotté les municipales d’avril dans ces localités, ce qui a abouti à l’élection de maires albanais avec une participation de moins de 3,5 %. Ces édiles ont été intronisés la semaine dernière par le gouvernement d’Albin Kurti, le Premier ministre de ce territoire en très large majorité peuplé d’Albanais, faisant fi des appels à l’apaisement lancés par l’Union européenne et les Etats-Unis.
La Serbie, soutenue par ses alliés russe et chinois, n’a jamais reconnu l’indépendance proclamée en 2008 par son ancienne province et des tensions éclatent régulièrement entre Belgrade et Pristina. Quelque 120.000 Serbes vivent au Kosovo (qui compte 1,8 million d’habitants) dont un tiers environ dans le Nord. Les manifestants réclament le départ des maires albanais qu’ils qualifient « d’illégitimes » et celui de la police kosovare.
Tensions depuis plusieurs jours
Des soldats en tenue antiémeutes de la Kfor, la force multinationale emmenée par l’Otan, ont placé mardi une barrière métallique autour de la mairie pour empêcher plusieurs centaines de Serbes d’y accéder. Trois véhicules blindés de la police kosovare, dont la présence suscite toujours l’ire des Serbes majoritaires dans quatre localités du Nord du Kosovo, étaient garés devant la mairie.
« Le déploiement de forces supplémentaires de l’Otan au Kosovo est une mesure de prudence pour s’assurer que la KFOR dispose des capacités dont elle a besoin pour maintenir la sécurité conformément au mandat qui nous a été confié par le Conseil de sécurité de l’ONU », a déclaré l’amiral Stuart B. Munsch dans un communiqué.
La situation avait déjà dégénéré vendredi lorsque les maires étaient venus prendre leurs fonctions accompagnés par les forces de l’ordre. Lundi à Zvecan, les manifestants serbes avaient été dans un premier temps repoussés par les forces kosovares qui ont fait usage de gaz lacrymogène. La Kfor avait ensuite tenté de séparer les deux parties avant de commencer à disperser la foule. Des protestataires avaient répliqué en lançant des pierres et des cocktails Molotov en direction des soldats.
Plusieurs blessés
Dix-neuf soldats hongrois et onze italiens ont été blessés dans ces heurts, a annoncé mardi la Kfor dans un communiqué, précisant qu’ils souffraient notamment de « fractures et des brûlures causées par des engins explosifs incendiaires improvisés. » « Trois soldats hongrois ont été blessés par des armes à feu », selon la même source. Ces attaques ont été qualifiées de « totalement inacceptables » par l’Otan à Bruxelles. Au moins 52 personnes ont été blessées dans les rangs des manifestants serbes, dont trois grièvement, a dit le président serbe Aleksandar Vucic.
Cinq manifestants serbes ont été arrêtés, selon la police kosovare. Belgrade a donné l’ordre à l’armée serbe de se placer en état d’alerte maximale, comme cela a été régulièrement le cas ces dernières années. La Kfor a expliqué avoir renforcé sa présence dans le Nord pour « réduire le risque d’escalade » après que les maires nouvellement élus ont tenté de prendre leurs fonctions.
L’UE prône la désescalade
Le chef de la diplomatie de l’UE, Josep Borrell, a appelé mardi Serbes et Kosovars à « désamorcer les tensions immédiatement et sans condition. » Les Etats membres de l’UE « discutent de possibles mesures à prendre si les parties continuent de résister aux mesures proposées en vue d’une désescalade », a-t-il déclaré à Bruxelles, après des entretiens téléphoniques avec le Premier ministre du Kosovo, Albin Kurti, et le président serbe, Alexander Vucic.
Josep Borrell a également demandé aux autorités du Kosovo de suspendre les opérations de police autour des bâtiments municipaux dans le nord du pays et aux manifestants serbes de se retirer.
La Russie s’emmêle
La Russie a de son côté commenté le rôle de la communauté internationale. « Nous appelons l’Occident à enfin mettre fin à sa propagande mensongère et à arrêter de rejeter la responsabilité des incidents au Kosovo sur les Serbes poussés au désespoir », a indiqué le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué. « Il faut des mesures décisives de désescalade », a-t-il demandé.