Ethiopie : Le gouvernement et les rebelles du Tigré signent un « accord de cessation des hostilités »
processus de paix•Le conflit a commencé il y a deux ans quand le Premier ministre a envoyé l’armée arrêter les dirigeants de l’exécutif du Tigré qui contestaient son autorité20 Minutes avec AFP
Même si ce n’est pas encore la paix, c’est tout de même un grand pas dans sa direction. Le gouvernement fédéral éthiopien et les autorités rebelles du Tigré ont conclu mercredi à Pretoria un accord de cessation des hostilités, à moins de 48 heures du 2e anniversaire du conflit meurtrier qui les opposent dans le nord de l’Ethiopie.
Les deux parties « se sont formellement mises d’accord sur une cessation des hostilités, ainsi que sur un désarmement méthodique, ordonné, en douceur et coordonné », a annoncé le haut représentant de l’Union africaine (UA) pour la Corne de l’Afrique, l’ex-président nigérian Olusegun Obasanjo qui dirigeait la troïka de médiateurs.
Le début « du processus de paix »
Les chefs des deux délégations se sont serré la main après avoir signé cet accord qui prévoit aussi « un rétablissement de l’ordre public, des services (au Tigré), un accès sans entrave des fournitures humanitaires, la protection des civils, entre autres ». « Ce moment n’est pas la fin du processus de paix, mais son début », a averti Obasanjo.
Les détails des dispositions de l’accord et de sa mise en œuvre n’ont pas été dévoilés dans l’immédiat. Les médiateurs n’ont ainsi pas indiqué ce que prévoit le document concernant les autres acteurs du conflit, particulièrement l’armée de l’Erythrée voisine : Ennemie jurée des dirigeants tigréens, elle épaule l’armée fédérale éthiopienne au Tigré qui lui est frontalier.
Un « engagement constructif » selon l’Ethiopie
Les deux parties signataires « ne sont pas les deux seuls groupes ayant un rôle à jouer pour la paix en Ethiopie », a relevé l’ancienne vice-présidente sud-africaine Phumzile Mlambo-Ngcuka, membre de la troïka, demandant aux signataires de « partager cet accord » afin que « de nombreux autres y adhèrent ».
Le chef de la délégation du gouvernement éthiopien, Redwan Hussein, conseiller à la Sécurité nationale du Premier ministre Abiy Ahmed, a pour sa part salué « l’engagement constructif » des belligérants « pour mettre fin à cet épisode tragique ». Cet accord montre « la volonté des deux parties de laisser le passé derrière eux », a abondé Getachew Reda, qui dirige la délégation des autorités rebelles du Tigré, disant espérer que « les deux parties respectent leurs engagements ». Troisième membre de la troïka, l’ex-président kényan Uhuru Kenyatta a estimé que « beaucoup reste à faire. La confiance doit se construire. Nous y aiderons ».
Des discussions depuis le 25 octobre
Dans la soirée, le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a fait part de son engagement « fort » à mettre en œuvre l’accord. Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres, a lui salué « une première étape vraiment bienvenue ». Cela « représente une importante étape pour la paix », a par ailleurs souligné le porte-parole du département d’Etat américain Ned Price.
Les délégations du gouvernement fédéral éthiopien et des autorités rebelles du Tigré discutaient depuis le 25 octobre à Pretoria sous l’égide de l’UA. Pendant les discussions, les combats ont continué au Tigré, où progressent depuis mi-octobre les forces fédérales éthiopiennes et alliées. Soutenues par des bombardements d’artillerie et aériens, elles se sont emparées récemment de plusieurs villes d’importance de la région rebelle. La presse n’a cependant pas accès au nord de l’Ethiopie et les communications y fonctionnent de façon aléatoire, rendant impossible toute vérification indépendante.
Une catastrophe humanitaire
Le bilan du conflit, marqué par d’innombrables exactions et qui se déroule largement à huis clos, est inconnu, mais l’International Crisis Group et Amnesty International le décrivent comme « l’un des plus meurtriers au monde ». Le conflit a commencé le 4 novembre 2020 quand Abiy Ahmed a envoyé l’armée fédérale arrêter les dirigeants de l’exécutif du Tigré qui contestaient son autorité depuis plusieurs mois et qu’il accusait d’avoir attaqué une base militaire fédérale.
La guerre a provoqué une catastrophe humanitaire dans le nord de l’Ethiopie, déplaçant plus de deux millions d’Ethiopiens et plongeant des centaines de milliers de personnes dans des conditions proches de la famine, selon l’ONU. Le Tigré est largement privé d’électricité, de télécommunications et de services bancaires depuis plus d’un an. La reprise des combats a également interrompu le gros de la livraison d’aide humanitaire vers la région.