SANTESommet télévisé de l'assurance maladie: Obama prêt à passer en force

Sommet télévisé de l'assurance maladie: Obama prêt à passer en force

SANTEAprès plus de sept heures de discussions courtoises devant les caméras, le président a durci le ton dans sa conclusion...
Philippe Berry

Philippe Berry

De notre correspondant à Los Angeles


Oubliez les JO, le match du jour se déroulait à deux pas de la Maison Blanche. Barack Obama avait invité les caméras pour le grand débat sur la réforme de l'assurance maladie. Objectif: essayer de trouver un compromis entre démocrates et républicains pour un vote au Congrès. Dans les faits, chacun a campé sur ses positions et l'éventualité d'un passage en force au Congrès semble de plus en plus probable.

Après sept heures de discussions civiles, courtoises et techniques, le président américain a envoyé un avertissement à ses adversaires dans sa conclusion. Il a appelé les républicains à faire un peu «d'introspection» en énumérant certains points de convergence. Mais si dans «un mois ou six semaines», il n'y a «pas assez d'efforts pour» trouver un compromis, alors «il faudra aller de l'avant et prendre certaines décisions» au Congrès. Traduction: passer en force avec un vote à la majorité simple, pas vraiment populaire. «Mais c'est à ça que servent les élections» comme les midterms de novembre, a conclu le président. Les électeurs jugeront.

Différence philosophique fondamentale

Ce jeudi matin, ils sont une quarantaine autour de la table de la Blair House. Au centre, Barack Obama, Joe Biden, et les quatre leaders démocrates et républicains du Congrès. John McCain est également de la partie. Les échanges sont civils et courtois, Barack Obama quittant son rôle d'arbitre pour participer pleinement aux discussions. Qui arrivent sans doute un an trop tard.

Le sénateur républicain Lamar Alexander le résume bien: il y a un clivage «philosophique fondamentalement différent» entre les deux camps. Les démocrates estiment que seul le gouvernement est à même de fixer des règles aux assureurs privés afin de permettre à plus de 30 millions d'Américains sur les 40 millions sans couverture de souscrire à une assurance. Les républicains, eux, arguent que tout doit se jouer au niveau des Etats et des entreprises. Ce qu'ils dénoncent comme une «prise du pouvoir» par Washington aurait pour seul effet, selon eux, d'augmenter les coûts des polices d'assurance.

A plusieurs reprises, Barack Obama apparait agacé et frustré. «Peut-on ne pas passer tout notre temps sur les désaccords et avancer sur ce qui nous rassemble», demande-t-il? Et ils y a plusieurs points qui font l'objet d'un certain consensus, comme la nécessité de s'attaquer au fameux problème des conditions préexistantes. Mais un représentant républicain le souligne, «être d'accord sur quelques points ne justifie pas de donner le feu vert pour forcer un plan de 2.000 pages dont les Américains ne veulent pas».

Et maintenant?

Le spectre d'un passage en force se profile, via le mal dénommé «processus de réconciliation». Il s'agit d'un mécanisme, utilisé à maintes reprises par George Bush, qui permet d'adopter un texte qui touche au budget à la majorité simple au Sénat (51 voix sur 100 au lieu des 60 de la «super majorité» dont les démocrates ne disposent plus avec la perte du siège de Ted Kennedy).

Selon un sondage CNN, les Américains sont contre cette méthode: 52% contre 39%. Plus gênant pour le président, seuls 25% souhaitent que les discussions continuent sur cette version du texte, tandis que 47% veulent repartir de zéro et 27% abandonner tout bonnement la réforme.

Face à ce mécontentement, Obama garderait dans sa manche un «plan B», selon la presse américaine. Un plan bien moins ambitieux, centré sur les positions communes entre républicains et démocrates. Problème: pas sûr que la majorité démocrate de la Chambre des représentants le suive sur une telle voie.

Pendant ce temps là, rappelle un sénateur démocrate en sortant une lettre d'un électeur, dans l'Iowa, un fermier de 57 ans diabétique, qui ne bénéficie pas d'un plan avantageux d'une grande entreprise, doit débourser 18.000 dollars (13.300 euros) par an pour couvrir toute sa famille. Et de marteler aux Républicains: «Il ne faut pas une réforme au rabais. Si ce fermier est à la dérive à 50 mètres de radeau de survie, ce que vous proposez est de lui jeter une corde de 10 mètres, puis de voir ensuite avec une plus longue. Sauf qu'entre temps, il se sera noyé.» Silence gêné dans l'assemblée.

Passe d'armes amicale entre Obama et McCain

«Je suis content que vous nous ayez invités avec les caméras», commence John McCain. «Mais il aurait fallu le faire un an plus tôt comme vous l'aviez promis. A la place, les négociations se sont déroulées dans l'ombre. Pendant la campagne, nous avions tout deux promis de changer Washington...» Barack Obama l'interrompt: «La campagne est terminée». «Je sais, chaque jour qui passe me le rappelle», rit John McCain, un peu amer.