SUCCESSIONCharles III sera-t-il le King écolo qu'il nous faut ?

Mort de la reine Elisabeth II : Charles III sera-t-il le King écolo qu'il nous faut ?

SUCCESSIONCharles deviendra officiellement le roi Charles III ce samedi matin lors d’une réunion du Conseil de succession à Londres
Camille Poher

Camille Poher

L'essentiel

  • Ce jeudi 8 septembre la reine Elisabeth II a poussé son dernier souffle à 96 ans et après soixante-dix années de bons et - très - loyaux services.
  • Qui dit mort de la reine mère dit succession au trône et c’est l’aîné de ses fils, le Prince de Galles, qui est devenu le nouveau roi d’Angleterre, répondant à présent au sobriquet de Charles III.
  • Connu pour ses frasques sentimentales et son amour de Shakespeare, le roi Charles III est aussi un fervent défenseur de l’écologie et de la lutte contre le réchauffement climatique. Mais son règne en sera-t-il plus vert pour autant ?

Bientôt soixante-dix ans que Charles attendait de fait sauter sa cuti de prince pour celle de roi. Succédant à sa mère la reine Elisabeth II, décédée ce jeudi 8 septembre dans son château de Balmoral, le roi Charles III accède aux trônes à l’âge de 73 ans. Connu pour ses frasques, ses scandales et ses excentricités, peu connaissent de l’ancien Prince de Galles son appétence toute particulière pour écologie. Dans un monde qui brûle et qui clairement court à sa perte si l’élite - ou les joueurs du PSG - n’arrête pas tout net de prendre des jets à tout va, un king écolo ne serait-il pas complètement dans son temps ?

« La monarchie britannique a depuis toujours une grande sensibilité à la nature », répond d’emblée à 20 Minutes Victoria Pinoncely, doctorante franco-britannique à l’Ecole normale supérieure (ENM). « Le Prince de Galles est dans la continuité de cette sensibilité mais sur un plan plus écologique », poursuit celle qui a consacré ses travaux à urbanisme au Royaume-Uni. En effet, durant toutes ses années de principauté, le fraîchement baptisé Charles III, n’a pas caché sa sensibilité à l’environnement et à l’urgence climatique.

Grand défenseur de l’agriculture bio, des médecines douces ou encore des circuits courts, le prince a même créé son propre jardin et sa ferme entièrement biologique dans son domaine de Highgrove, situé à l’ouest de l’Angleterre. « Féru d’urbanisme et d’architecture responsable il a également fait l’acquisition d’un village tout entier nommé Poundbury, au sud-ouest du pays », ajoute Victoria Pinoncely. Une « new town » écologique, village modèle en somme, d’une société dans lequel le vivre ensemble se ferait dans le sens d’une planète en bonne santé.

Prince écolo, pas franchement dans le tempo

Cet attrait pour la nature et pour les questions environnementales a pourtant longtemps été source de moqueries, rappelle de son côté Charlotte Gould, professeure de civilisation britannique à Paris Nanterre. Au Royaume-Uni, on riait souvent de ce prince qui "embrassait les arbres" et "mangeait sa pelouse". »

Bon, il est vrai qu’on ne peut pas non plus nier une certaine forme de dissonance cognitive chez le Prince de Galles, entre son intérêt pour l’écologie et sa famille royale pas très « verte » dans la pratique. Rappelons tout de même que la queen Elisabeth est la monarque qui a le plus voyagé au monde avec plus de 100 nations visitées et 150 passages dans les pays du Commonwealth.

« Et l'approche de l’écologie du futur roi est tout de même très traditionnelle, tranche Charlotte Gould. Entre le Prince de Galles et les membres du mouvement écologiste "Extinction Rebellion", par exemple, il y a tout de même un monde ». La passion pour la botanique de Charles III n’empêche ainsi pas le futur roi de faire scandale au sujet, entre autres, de ses nombreux déplacements en hélicoptères.

Mais plus encore que les railleries de son peuple et ses convictions vertes à deux vitesses, c'est courroux de la royal family sur le sujet qui pourrait plus le freiner. « Il lui a longtemps été reproché par ses proches, de trop s’exprimer sur ces questions d’écologie, alors que le formalisme de la fonction de prince pousse à ne pas trop s’exprimer, à ne pas sortir du rôle et à respecter l’étiquette », explique à 20 Minutes Charlotte Gould.

Prince écolo, mais pas trop

Car oui, la question se pose, est-ce le rôle d’un monarque d’émettre un avis sur le sort de la planète ? Si rouler en jaguar électrique ou devenir végétarien est à la portée de tout bon roi qui se respecte, prendre officiellement position sur des questions d’ordre socio-économique, ça serait un peu s’emballer. « Sa position de roi va peut-être lui donner plus de marge de manœuvre, mais il ne faut pas pour autant négliger le devoir de réserve », prédit ainsi la professeure de civilisation britannique.

Pour rappel, un droit de réserve c’est synthétiquement l’obligation de bien garder ses opinions personnelles pour soi lorsque l’on est une personnalité publique. Un art que la reine Elisabeth, on ne peut pas lui enlever, a extrêmement bien manié durant ses 70 ans de règne. Et c’est pour cette unique raison que, selon Victoria Pinoncely, « le roi Charles III pourra faire de l’écologie, oui, mais de l’écologie soft ». Comprenez faire avancer doucement le sujet via des déplacements dédiés ou des inaugurations dans ce sens, mais pas vraiment faire bouger les lignes (vertes).

Parce que, selon nos experts, ce n’est pas ce que le Royaume-Uni demande à son monarque mais aussi parce que le contexte politique du pays - la récente arrivée au commandement du gouvernement Truss - n’est pas franchement propice au bouleversement écologique. Avec une Première Ministre opposée aux énergies renouvelables et repoussant la date butoire pour la neutralité carbone, le projet de permaculture à Buckingham Palace devra peut-être attendre…