Arabie Saoudite : Libéré, le militant Raef Badawi interdit de quitter le pays pendant 10 ans
LIBERTE D'EXPRESSION•Le journaliste a été libéré vendredi après dix ans de prison20 Minutes avec AFP
Après dix ans de prison, dix ans d’interdiction de quitter le territoire. L’Arabie saoudite a confirmé ce samedi l’interdiction de quitter le territoire saoudien pendant les dix prochaines années pour le blogueur et militant des droits humains Raef Badawi, libéré la veille.
« La condamnation de Raef Badawi à dix ans de prison a été suivie à sa libération d’une interdiction de quitter le territoire pendant la même durée. Le tribunal avait rendu sa décision et elle est définitive », a indiqué sous couvert d’anonymat une source au sein du ministère saoudien de l’Intérieur. « Il ne peut donc pas quitter le territoire pendant les dix prochaines années à moins qu’une grâce (royale) lui soit accordée », a ajouté cette source.
Arrêté en 2012 et condamné en 2014
L’ancien lauréat du prix Reporters sans frontières pour la liberté de la presse, âgé de 38 ans, avait été arrêté en 2012 puis condamné fin 2014 à dix ans de prison et à 50 coups de fouet par semaine pendant vingt semaines pour avoir plaidé notamment pour la fin de l’influence de la religion sur la vie publique.
La première séance de flagellation sur une place publique en Arabie saoudite en 2015 avait choqué le monde pour son caractère « médiéval », selon l’expression d’une ministre suédoise à l’époque. Il n’a plus été fouetté par la suite. Ensaf Haidar, la femme de Raef Badawi, avait annoncé ce vendredi que son mari était « libre », une nouvelle confirmée par un responsable de la sécurité saoudienne.
Le Québec ouvert à l’accueil de Raef Badawi
Après la libération de Raef Badawi, Amnesty a indiqué dans un mail « s’employer activement à ce que toutes les conditions » liées à sa remise en liberté soient « levées », notamment cette interdiction de quitter le territoire saoudien pendant 10 ans.
Le Québec, où vivent la femme et les trois enfants de Raef Badawi, a ouvert la voie à l’exil du blogueur au Canada en le plaçant sur une liste prioritaire d’immigrants potentiels pour raisons humanitaires. Le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, s’est dit « soulagé » de la libération du journaliste, ce vendredi sur Twitter. Plus tôt, le Premier ministre du Québec, François Legault, avait également tweeté : « Enfin ! Je ne cesse de penser aux enfants qui vont enfin retrouver leur père ! ».
La répression brutale des voix dissidentes et l’emprisonnement des militants en Arabie saoudite sont à ce jour dénoncés par des ONG internationales et l’ONU, même si le royaume cherche à améliorer son image internationale en entreprenant certaines réformes. La sœur de Raef Badawi, Samar Badawi, ainsi que la militante Nassima al-Sadah, libérées en 2021, restent bloquées dans le royaume.
Lauréat du prix RSF
Musulman sunnite comme la majorité des Saoudiens, Raef Badawi a fait des études d’économie et dirigé un institut d’apprentissage de l’anglais et des techniques informatiques, selon son épouse. Il s’est fait connaître par ses écrits en faveur de la liberté d’expression.
Le blogueur est lauréat du prix RSF 2014 dans la catégorie net-citoyen. Il a aussi été choisi en 2015 par les chefs de file des groupes politiques du Parlement européen comme lauréat du Prix Sakharov pour la liberté d’expression. En 2015 et 2016, il figurait parmi les nominés pour le prix Nobel de la Paix.