Départ d’Angela Merkel : « La chancelière n’a jamais lutté activement contre la crise climatique », dénonce Isi, jeune activiste
AUF WIEDERSEHEN MERKEL (2/3)•Sur le camp des activistes décidés à interpeller le futur chancelier sur l’urgence climatique, « 20 Minutes » a rencontré Isi, une jeune militantePropos recueillis par Marie De Fournas
L'essentiel
- A la tête de l’Allemagne depuis près de 16 ans, Angela Merkel quittera le pouvoir à l’issue des élections fédérales organisées dimanche 26 septembre.
- Pour le second volet de la série « Auf Wiedersehen Merkel », la rédaction de 20 Minutes a rencontré des militants écologistes qui ont installé, fin août, un campement en plein cœur de Berlin pour faire pression sur les principaux candidats à la Chancellerie.
- « Pour moi, le gouvernement n’a jamais lutté activement contre la crise climatique. Angela Merkel a fait beaucoup de greenwashing », dénonce Isi, jeune militante qui s’est installée sur le camp dès les premiers jours.
De notre envoyée spéciale à Berlin
Ils n’ont qu’une vingtaine d’années. Depuis le 30 août dernier, de jeunes activistes écologistes ont installé un camp sur la pelouse du Spreebogenpark, à Berlin, à deux pas de la Chancellerie et du Bundestag – le Parlement allemand. Entourés par une équipe de soutien, six d’entre eux ont même entamé une grève de la faim pour mettre la question climatique au cœur des élections fédérales de ce dimanche, qui doivent désigner le successeur d'Angela Merkel. Leurs revendications : des mesures plus fortes pour le climat ou encore la mise en place d’une convention citoyenne. Lorsque nous sommes allés à leur rencontre, à trois jours du scrutin, ni Annalena Baerbock (Verts), ni Armin Laschet (CDU-CSU), ni Olaf Scholz (SPD) n’étaient encore venus à leur rencontre. Cela fait donc 24 jours que certains ont cessé de s’alimenter.
Parmi les soutiens des grévistes de la faim, nous avons rencontré Isi. A seulement 19 ans, cette activiste venue de Dortmund nous explique les revendications de ces manifestants pour le climat. Interview.
Quel bilan climatique dresses-tu du mandat d’Angela Merkel ?
Pour moi, le gouvernement n’a jamais lutté activement contre la crise climatique. Angela Merkel a fait beaucoup de greenwashing. Elle a pris des décisions en disant que c’était bon pour le climat et l’environnement. C’était des mesures assez symboliques et simples à comprendre pour une majeure partie de la population mais, quand on prend le temps de gratter un peu, on se rend compte que ce n’est pas très approfondi. La sortie du nucléaire , c’était bien, mais il y avait encore beaucoup à faire.
Angela Merkel a eu plusieurs fois l’occasion de changer les choses pendant son mandat. Il y a dix ans, déjà, elle aurait pu décider que l’Allemagne utilise davantage d’énergies renouvelables, que le pays réduise l’exploitation de charbon et d’autres énergies fossiles. Elle aurait aussi pu adopter une politique pour contraindre les industries polluantes à réduire leurs émissions de CO2. Mais elle ne l’a pas fait. Le gouvernement a évoqué des mesures, mais l’économie du pays, la croissance et surtout les lobbys ont toujours eu le dernier mot.
Pourquoi les jeunes présents ici ont-ils choisi de faire une grève de la faim pour se faire entendre ?
Ce que certains font ici est très dangereux, mais la situation actuelle l’est aussi. Pendant le mandat d’Angela Merkel, beaucoup d’entre nous sont allés manifester dans la rue, ont multiplié les actions de désobéissance civile, sont montés en haut d’immeubles… Mais ça n’a rien changé. Ce n’était pas assez. On en est arrivés à un point où on ne savait plus comment faire pour se faire vraiment entendre. Faire une grève de la faim, c’est une façon de montrer à quel point les jeunes sont désespérés. Cela a un impact, ça touche les gens. On a beaucoup de personnes plus âgées et des parents qui viennent nous voir sur le camp parce qu’ils s’inquiètent pour nous.
Pourquoi mener cette action maintenant ?
Le changement de gouvernement, c’était le bon moment pour mettre en lumière la crise climatique. C’est notre chance d’avoir une influence. Aucun des programmes des candidats ne va assez loin. Nous vivons une période historique, car c’est maintenant que nous devons décider de notre futur. C’est maintenant qu’il faut agir, pas dans plusieurs années, sinon ça sera irréversible. L’Allemagne est un pays qui a de l’influence et des privilèges. Ici on ne va pas en prison si on manifeste. Nous avons donc aussi, nous, militants, cette responsabilité de nous faire entendre.
Aucun candidat n’a, pour l’instant, accepté de vous rencontrer. Qu’allez-vous faire ?
Certaines personnes qui avaient entamé une grève de la faim depuis le début ont dû s’arrêter car cela devenait trop dangereux. Les autres sont vraiment très faibles. Ils restent allongés presque toute la journée, ils peuvent à peine marcher sur quelques mètres. Il devient urgent que les trois candidats acceptent de nous rencontrer et d’avoir un débat public. C’est le seul moyen pour stopper ça.