Suisse : L'initiative anti-burqa adoptée d'une courte majorité
VOTATION•Autour de 52 % des électeurs et électrices qui se sont déplacées ont voté pour l’interdiction20 Minutes avec AFP
L’initiative pour interdire de dissimuler son visage en Suisse, qui vise les rares femmes qui portent le niqab dans le pays, a été adoptée ce dimanche. Le texte, initialement proposé par le parti populiste de droit UDC, a été soutenu par des féministes et une partie des électeurs de la gauche laïque. Il a obtenu 51,21% des voix et une majorité de cantons, selon les résultats officiels publiés par le gouvernement fédéral.
Les deux autres initiatives soumises au scrutin ce dimanche donnent le oui à un accord commercial avec l’Indonésie (51 %) mais rejettent l’introduction d’une identité électronique fédérale (64 % de non). Si le oui devait se confirmer pour l’initiative anti-burqa, la Suisse rejoindrait la France, l’Autriche, la Bulgarie, la Belgique et le Danemark en bannissant le voile intégral, après des années de débat.
« Banaliser l’ambiance xénophobe et raciste »
Le texte proposé par le parti populiste de droit UDC n’évoque ni la burqa – sorte de longue pièce de tissu qui couvre les femmes de la tête aux pieds et munie d’une fente grillagée à hauteur des yeux – ni le niqab, qui couvre entièrement le corps et le visage à l’exception des yeux, mais les affiches de campagne ne laissent pas de doute sur l’intention. « Stopper l’islamisme radical » ou « Stopper l’extrémisme », peut-on lire sur les affiches qui montrent des femmes en niqab.
Le oui risque de « banaliser l’ambiance xénophobe et raciste » à l’encontre des musulmanes, a déclaré Myriam Mastour, membre du collectif Les Foulards Violets et de la grève féministe sur la chaîne publique RTS. En revanche elle se réjouit du faible écart entre le oui et le non, alors que les premiers sondages donnaient l’initiative de l’UDC largement favorite.
« C’est un immense soulagement »
« C’est un immense soulagement », a dit Mohamed Hamdaoui, député au Grand Conseil bernois et fondateur de la campagne « A visage découvert » à l’agence ATS. « Ce vote est révélateur d’une prise de conscience », selon ce membre du PS, qui se revendique musulman laïque. C’était « l’occasion de dire stop à l’islamisme » et pas « aux musulmans, qui ont évidemment toute leur place dans ce pays ».
Deux cantons ont déjà une interdiction de se couvrir le visage. Le gouvernement fédéral et le parlement s’opposaient à cette mesure en arguant que l’initiative s’attaque à un problème qui n’existe pas. En 2009, les Suisses avaient voté l’interdiction de la construction de minarets sur les mosquées, provoquant la colère dans les pays musulmans et l’approbation des partis nationalistes européens.
Courte victoire aussi pour un accord commercial
La population semble aussi avoir donné un court avantage à un accord commercial avec l’Indonésie. Le plus grand pays musulman du monde est un immense marché très prometteur, mais c’est l’huile de palme – à la réputation écologique controversée – qui focalise le débat et avait suscité une initiative populaire des opposants. Cet accord prévoit l’abolition des droits de douane sur une grande partie des produits échangés avec l’Indonésie ainsi qu’un ensemble de règles régissant les échanges de services, la propriété intellectuelle et les investissements.
Les opposants fustigent la déforestation, les violations des droits humains et de l’environnement mais aussi les critères de certification de l’huile de palme eux-mêmes, que contient l’accord. Les résultats définitifs sont attendus en milieu d’après-midi.