Espagne : Une loi proche de la loi « sécurité globale » retoquée par le Tribunal constitutionnel
DROIT•Cette loi interdit l'usage d'images des forces de l'ordre sans autorisation20 Minutes avec AFP
Ressemblant à la proposition de loi de «sécurité globale» en France, une loi controversée espagnole interdisant depuis 2015 l’usage d’images des forces de l'ordre sans autorisation a été retoquée en fin de semaine dernière par le Tribunal constitutionnel du pays.
La loi espagnole, baptisée « loi bâillon » par ses détracteurs, sanctionne « l’utilisation non autorisée » d’images des forces de l’ordre « qui peuvent mettre en danger la sécurité personnelle ou professionnelle des agents, d’installations protégées ou le succès d’une opération, dans le respect du droit fondamental à l’information ». Les amendes peuvent aller de 600 à 10.400 euros.
Une loi « inconstitutionnelle »
Or, selon la décision du Tribunal constitutionnel datant de jeudi, le fait de devoir demander une autorisation pour utiliser des images des forces de l’ordre est « inconstitutionnel ». « Il y a censure préalable proscrite par l’article 20 alinéa 2 de la Constitution quand la diffusion d’images ou de données est soumise à un examen préalable de leur contenu par les forces de l’ordre », a tranché le tribunal, cinq ans après l’adoption de cette loi sous le gouvernement de droite de Mariano Rajoy en pleine vague de manifestations anti-austérité.
Hormis cette notion d’autorisation, le tribunal a jugé que le reste de l’article contesté n’était pas inconstitutionnel « à condition » que le terme « utilisation » soit interprété par les juges comme « la publication ou la diffusion illicite » des images et non comme leur simple « captation non suivie de publication ou diffusion ». De plus, « le terme "images ou données personnelles ou professionnelles" doit aussi comprendre celles relatives à la vie privée, élément qui devra être pris en compte pour déterminer si le droit à l’information prévaut ou non », a ajouté le tribunal.
Une loi similaire au texte français
Selon Xavier Arbos, professeur de droit constitutionnel à l’Université de Barcelone, les sanctions seront donc toujours possibles dans certaines conditions. Le tribunal « ne rejette pas tout l’article mais seulement ce qui est relatif à l’usage non autorisé (…) Hypothétiquement, la possibilité de sanctions pour l’usage des images d’un policier pouvant être considérées comme une atteinte à son droit à l’intimité » ou à « son intégrité physique demeure », a-t-il dit.
En France, l’article contesté de la loi sur la « sécurité globale », adopté vendredi en première lecture par les députés, pénalise d’un an de prison et 45.000 euros d’amende la diffusion de « l’image du visage ou tout autre élément d’identification » des forces de l’ordre en intervention quand elle porte manifestement « atteinte » à leur « intégrité physique ou psychique ». Un amendement gouvernemental a spécifié que cette mesure ne peut porter « préjudice au droit d’informer ».