Attentat de la rue des Rosiers à Paris : La Norvège donne son feu vert à l’extradition d’un suspect
ENQUETE•A Paris, rue des Rosiers, le 9 août 1982, un commando de trois à cinq hommes avait lancé une grenade dans le restaurant Jo Goldenberg dans le « Pletzl »20 Minutes avec AFP
Il est l’un des principaux suspects de l’attaque qui avait fait six morts dans le quartier juif de Paris en 1982. La justice norvégienne a jugé ce vendredi que les conditions légales d’une extradition vers la France de Walid Abdulrahman Abou Zayed étaient réunies.
« Les conditions d’une extradition vers la France sont (…) remplies », a tranché la juge Pernille Wold Ellingsen. Susceptible d’appel, la décision du tribunal d’Oslo ne porte que sur la légalité d’une telle extradition, celle d’extrader ou non Walid Abdulrahman Abou Zayed revenant en dernier ressort au ministère norvégien de la Justice, voire au gouvernement réuni dans son intégralité devant le roi.
Trois à cinq hommes, le 9 août 1982
Walid Abdulrahman Abou Zayed « peut être extradé » en vertu de la loi norvégienne, a-t-elle conclu. Arrêté le 9 septembre en Norvège où il vit depuis 1991, cet homme de 61 ans, d’origine palestinienne, clame son innocence et refuse d’être envoyé en France, où il fait face à des poursuites judiciaires. « J’y suis opposé parce que je n’ai rien à voir avec cela », a-t-il déclaré quelques heures plus tôt au tribunal.
Le 9 août 1982, un commando de trois à cinq hommes avait lancé une grenade dans le restaurant Jo Goldenberg dans le « Pletzl », quartier juif historique de Paris, puis ouvert le feu dans l’établissement et contre des passants. L’attaque avait fait six morts et 22 blessés. L’opération avait rapidement été attribuée au Fatah-Conseil révolutionnaire (Fatah-CR) d’Abou Nidal, groupe palestinien dissident de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). La justice française soupçonne Abou Zayed, naturalisé norvégien en 1997, d’avoir été « l’un des tireurs de l’attentat ». Lui assure qu’il se trouvait à Monte-Carlo au moment de l’attentat.
« Je n’aime pas la France »
La Norvège n’avait pas donné suite à une précédente demande de Paris en 2015 car elle n’extradait alors pas ses ressortissants. Mais l’entrée en vigueur l’an dernier d’un accord avec l’UE et l’Islande le lui permet désormais. Selon la loi norvégienne, une décision d’extradition juridiquement contraignante doit « si possible » intervenir 45 jours au plus tard après une arrestation. La représentante de l’accusation, Anne Karoline Bakken Staff, a indiqué ce vendredi qu’une extradition pourrait être assortie d’une exigence de voir Abou Zayed purger une peine éventuelle en Norvège. « Je n’aime pas la France », a proclamé celui-ci par la voix d’un interprète. « Je ne veux pas aller en prison en France ».
Son avocat, Ole-Martin Meland, a mis en cause la légalité d’une extradition, invoquant l’absence de réciprocité – la France n’accepterait pas d’extrader ses ressortissants vers la Norvège –, la prescription des faits en droit norvégien, ou encore la santé défaillante de son client qui présenterait « deux diagnostics psychiatriques graves ».
Quatre mandats d’arrêt
Les familles des victimes, qui espèrent un procès depuis près de quatre décennies, ont placé beaucoup d’espoirs dans cette extradition. « Nous sommes très impatients d’avoir les explications de ce monsieur et très curieux de ce qu’il aura à nous dire, en espérant que cette extradition peut débloquer les situations en Jordanie et à Ramallah », a pour sa part indiqué Romain Boulet, avocat de proches de victimes.
La justice française a en effet émis quatre mandats d’arrêt internationaux visant Abou Zayed, deux individus localisés en Jordanie et un autre en Cisjordanie, tous soupçonnés d’avoir été impliqués dans la préparation ou la perpétration de l’attaque. La Jordanie a refusé à plusieurs reprises d’extrader les deux suspects présents sur son territoire, dont le cerveau présumé de l’attentat.