Mexique: Le parcours tragique de deux Salvadoriens noyés dans le Rio Bravo
DRAME•Après un périple de 3.200 km, un père et sa fille ont péri, dimanche, dans les eaux boueuses du Rio Bravo en tentant de traverser des Etats-Unis depuis le Mexique20 Minutes avec AFP
Oscar Martinez, un migrant salvadorien de 25 ans, et Valeria, sa fille d’environ 2 ans se sont noyés, dimanche, en tentant de traverser le Rio Bravo pour passer clandestinement aux Etats-Unis depuis le Mexique.
Après un périple de 3.200 km, le père et sa fille ont péri dans les eaux boueuses du Rio Bravo, ou Rio Grande selon la terminologie américaine, frontière naturelle entre les deux pays. Tania Avalos, la femme d’Oscar Martinez, était présente au moment du drame. Elle n’a revu leurs corps que lundi matin.
« Ils ont eu ce rêve américain, de parvenir à une vie meilleure »
Les pompiers et les sauveteurs mexicains les ont trouvés près de la rive, deux corps flottants sur le ventre, enlacés dans une étreinte protectrice qui a ému le monde entier. L’image est devenue un symbole du drame de la migration illégale vers les États-Unis. Mais le premier acte de cette tragédie s’est joué en Amérique centrale, comme pour beaucoup de migrants fuyant la pauvreté et la violence dans leur pays pour un exil vers le nord.
Oscar était cuisinier dans une pizzeria de San Salvador. Avec Tania, ils en avaient assez de la pauvreté et des gangs criminels qui terrorisaient leur quartier. « Ils ont eu ce rêve américain, de parvenir à une vie meilleure », a raconté Rosa Ramirez, la mère d’Oscar, qui réside à San Salvador. Le 3 avril, ils ont décidé de quitter leur pays, sans visa mais avec une route précise en tête vers les Etats-Unis. Selon les autorités, environ 200 Salvadoriens ont fait comme eux ce jour-là.
La femme d’Oscar avait obtenu un visa humanitaire
La jeune famille a traversé le Guatemala jusqu’à atteindre le fleuve Suchiate, qui délimite la frontière avec le Mexique. Ils sont restés environ deux mois aux abords de Tapachula au Chiapas (sud), le temps d’obtenir un permis migratoire de la part des autorités mexicaines. Selon un document, Tania avait obtenu un visa humanitaire. Depuis le début de la crise migratoire, le gouvernement mexicain a fourni divers documents, des permis de travail limités aux seuls Etats du sud du Mexique et des visas humanitaires permettant parfois de circuler sur tout le territoire.
Avec ces papiers en poche, la famille a décidé de parcourir les 1.800 km séparant Tapachula de Matamoros à la frontière américaine. Durant ce long périple, ils étaient accompagnés d’un compatriote, Milton Paredes Menjivar, âgé de 19 ans. Selon Paredes, ils ont atteint Matamoros samedi dernier et ont passé la nuit dans un hôtel. Vers 8h du matin dimanche, ils ont pris un taxi pour se rendre au bureau des migrations situé sur le « Puente Nuevo », un des quatre points de passage permettant d’accéder à Brownsville, au Texas.
Un passage connu pour traverser la frontière
Ils souhaitaient déposer une demande d’asile aux Etats-Unis au milieu de quelque 200 personnes. Frustrés, ils sont allés manger pour « passer le temps », selon Paredes, et c’est à ce moment-là qu’ils ont décidé de traverser illégalement la rivière. Trente ans auparavant, l’endroit était isolé et envahi par la végétation, et de nombreux migrants y traversaient le fleuve illégalement. Le Rio Bravo semble calme dans cette zone. Une trentaine de mètres sépare les deux rives. Il est peu profond, environ deux mètres, mais très périlleux.
Les quatre Salvadoriens ont tenté de traverser en deux groupes. Oscar s’est engagé le premier, portant Valeria, qu’il avait glissée sous son tee-shirt, sur son dos tandis que Paredes aidait Tania. La jeune femme a raconté qu’Oscar et Valeria avaient presque atteint l’autre rive, quand Oscar a été emporté, exténué, alors qu’un vent violent soufflait. Tania et Paredes ont aussitôt rebroussé chemin avant d’aller prévenir les autorités mexicaines Les corps ont refait surface lundi vers 10h du matin.