VIDEO. Affaire Carlos Ghosn: Dans une vidéo filmée avant son arrestation, l'ancien PDG accuse des dirigeants de Nissan de «trahison»
DEFENSE•L’ex-dirigeant de Nissan, de nouveau arrêté à Tokyo jeudi dernier, s'est exprimé devant la presse via une vidéo pré-enregistréeMathias Cena
De notre correspondant à Tokyo (Japon),
« Vous allez voir », avait prévenu Carole Ghosn lundi soir sur RTL, en se disant « sûre et certaine » de l’innocence de son mari. Carlos Ghosn, de nouveau arrêté jeudi dernier à Tokyo après avoir déjà passé 108 jours en prison de novembre à mars, ne pourra pas prendre la parole en direct devant les journalistes cette semaine, comme il l’avait annoncé sur Twitter.
Mais cette fois, l’ex-dirigeant de Renault et Nissan n’entendait pas confier entièrement son récit à d’autres. Après les interventions dans les médias français ces derniers jours de son épouse, rentrée à Paris, et de son avocat dans l’Hexagone, celui qui est devenu l’un des détenus les plus célèbres du Japon a pu s’adresser directement – bien qu’en différé – aux journalistes, mardi à Tokyo, par l’intermédiaire d’un message vidéo diffusé par son avocat japonais.
« Le premier message est que je suis innocent », affirme Carlos Ghosn dans le document filmé la veille de son arrestation. En costume sombre et chemise blanche, sans cravate, il dénonce les accusations « biaisées, hors contexte, déformées pour brosser le portrait d'un personnage cupide, d'un dictateur ».
Noms coupés au montage
L’air calme et posé, les mains croisées sur la table, il répète son attachement à Nissan et au Japon, rappelant au passage sa contribution à l’économie nipponne avant de dénoncer de nouveau « un complot ». « C’est une histoire de conspiration, de trahison », provoquée selon lui par « la peur que l’étape suivante de l’Alliance [entre Renault, Nissan et Mitsubishi], se dirigeant vers une fusion, menace certaines personnes ou l’autonomie de Nissan, ce qui n’a jamais été le cas au cours des 19 dernières années », assure l’ex-dirigeant, qui se présente comme un « fervent défenseur de l’autonomie » du constructeur Nippon.
Se disant inquiet de « la performance déclinante, du manque de vision pour l’avenir » de Nissan, il dénonce « les jeux malsains d’un petit nombre de responsables » de l’entreprise, qui auraient agi selon lui pour « leur propre intérêt, leurs peurs égoïstes ». Contrairement à ce que son épouse avait laissé entendre, ces responsables qu’accuse Carlos Ghosn ne sont pas nommés dans le document. Selon son avocat, Junichiro Hironaka, « 20 à 30 secondes » du document ont été coupés, pour des « questions juridiques ».
Un recours devant la Cour suprême
Pour conclure son intervention de sept minutes trente, Carlos Ghosn répète son « grand espoir » d’avoir droit à « un procès équitable ». « J’ai la chance d’avoir autour de moi trois avocats très compétents, qui ne partagent pas beaucoup ma sérénité » sur ce point, lâche-t-il. Me Hironaka a par ailleurs annoncé son intention d’aller déposer mercredi un recours devant la Cour suprême japonaise pour obtenir la libération de Carlos Ghosn.
L’avocat vise particulièrement la quatrième arrestation de Carlos Ghosn, jeudi dernier, « problématique » dans son origine et son déroulement, et qui provoque « d’incommensurables dégâts psychologiques et physiques à la personne qui avait été libérée ».
« Nous estimons, martèle-t-il, que les allégations pour lesquelles il a été arrêté ne sont pas nouvelles mais font partie d’une série de problèmes déjà couverts par la presse. » Selon lui, il avait été établi au moment de sa libération sous caution début mars « qu’il n’y avait aucun risque de fuite ou de destruction de preuves ». La motivation de cette arrestation est donc, affirme-t-il, « d’appliquer une pression injuste » sur son client.
Déjà inculpé pour dissimulation de revenus aux actionnaires de Nissan entre 2010 et 2018 et abus de confiance, Carlos Ghosn est cette fois soupçonné par les enquêteurs japonais de s’être approprié des fonds de Nissan par l’intermédiaire d’une société basée au sultanat d’Oman. Sa garde à vue a été prolongée jusqu’au 14 avril au moins, et le procès, dont la date n’a pas été fixée, ne devrait pas commencer avant plusieurs mois.