VIDEO. Procès d'«El Chapo»: L'avocat du narcotrafiquant dénonce une «farce»
ENQUETE•Pour Me Lichtman, Ismael « El Mayo » Zambada, le co-fondateur du cartel de Sinaloa avec « El Chapo », était le vrai patron du cartel et constitue « la véritable pièce manquante » du procès20 Minutes avec AFP
Pour l’avocat d'« El Chapo », le procès de son client est «une farce». Dans sa plaidoirie finale, ce jeudi, Jeffrey Lichtman a estimé que le vrai patron du puissant cartel de Sinaloa, lui, restait libre, et que Joaquin Guzman, le narcotrafiquant mexicain, ne pouvait pas être condamné sur la base de témoignages émanant d'« ordures ».
Le procès de Joaquin Guzman alias «El Chapo», qui s'est ouvert à New York en novembre, été « un spectacle » et « une farce » dont le narcotrafiquant n’est que la victime, a affirmé son avocat, dans sa plaidoirie de plus de quatre heures. Les 14 ex-collaborateurs qui ont déposé pour l’accusation « non seulement ont admis avoir menti tous les jours de leur vie, leur pauvre et égoïste vie, mais ils ont aussi menti devant vous, dans cette salle d’audience », a lancé Jeffrey Lichtman aux jurés, qui délibéreront à partir de lundi au tribunal fédéral de Brooklyn.
« El Mayo », le véritable chef du cartel de Sinaloa ?
Pour Me Lichtman, Ismael « El Mayo » Zambada, le co-fondateur du cartel de Sinaloa avec «El Chapo», était le vrai patron du cartel et constitue « la véritable pièce manquante » du procès. « Cela fait des décennies qu’il est le plus grand narcotrafiquant du Mexique. Il n’a jamais été arrêté. Il a payé des centaines de millions de dollars pour rester en liberté ».
Selon l’avocat, c’est « El Mayo » - 70 ans et toujours en cavale - et non « El Chapo » qui a versé 100 millions de dollars de pots-de-vin à l'ex-président mexicain Enrique Peña Nieto, contrairement à ce qu'a affirmé à la barre l'ex-trafiquant colombien Alex Cifuentes, ex-bras droit d'El Chapo. Ce dernier n’aurait pas payé une telle somme pour « se retrouver traqué comme un animal », alors qu'« El Mayo » « se dore la pilule dans les montagnes », « libre comme l’air », a encore plaidé Me Lichtman. L’ex-président Nieto a toujours nié avoir été corrompu par le cartel de Sinaloa.
Des témoignages remis en cause par la défense
Jeffrey Lichtman s’en est pris particulièrement aux témoignages selon lui mensongers des frères Cifuentes, Jorge et Alex, qui furent de grands fournisseurs de cocaïne d’El Chapo avant de collaborer avec la justice américaine. « Achèteriez-vous une voiture aux Cifuentes ? Les laisseriez-vous garder vos enfants ? Bien sûr que non ! », a lancé l’avocat. « Et vous seriez prêts à faire confiance à ces hommes pour condamner M. Guzman ? »
« Si vous ne croyez pas les témoins qui coopèrent (avec le gouvernement), vous ne pouvez pas condamner Guzman », a-t-il poursuivi. « Je vous demande de regarder votre cœur, et si vous avez un doute, de vous en emparer (..) Vous pouvez vous accrocher à ce doute et dire "Non, non, pas coupable" ». « Ce procès n’a qu’un seul but : attraper El Chapo », a-t-il martelé.
« Déclarez-le coupable de tous les chefs d’inculpation ! »
El Chapo, qui fait face à 10 chefs d’inculpation pour trafic de drogue, possession d’armes et blanchiment d’argent, risque la prison à perpétuité en cas de condamnation. Il est accusé d’avoir supervisé l’exportation de plus de 155 tonnes de cocaïne aux Etats-Unis entre 1989 et 2014. Mais l’une des procureurs a réfuté les arguments de Me Lichtman. Certes, les témoins qui ont collaboré avec le gouvernement ont « fait du mal », mais El Chapo « était leur chef », a répliqué la procureure Amanda Liskamm. Et une seule des dépositions des 14 témoins suffirait à le faire condamner, selon elle.
« Ne laissez pas (El Chapo) échapper à ses responsabilités, déclarez-le coupable de tous les chefs d’inculpation ! » avait déjà longuement plaidé mercredi une autre procureure, Andrea Goldbarg. Après deux évasions spectaculaires qui ont fait de lui une légende des cartels, El Chapo a été arrêté au Mexique en janvier 2016 et extradé aux Etats-Unis un an plus tard. Il est emprisonné à New York depuis, maintenu à l'isolement en raison des risques d'évasion.