Crise au Venezuela: Maduro, soutenu par l'armée, accuse les Etats-Unis
VENEZUELA•Le président Nicolas Maduro a remercié les militaires pour leur soutien face à ce qu’il a appelé un « coup d’Etat en marche » dirigé par « l’empire des Etats-Unis »…N.Sa avec AFP
Le bras de fer diplomatique s’est poursuivi jeudi entre Washington et le président Nicolas Maduro, qui a reçu le soutien de l’armée vénézuélienne et accusé les Etats-Unis d’inciter l’opposant Juan Guaido autoproclamé président à perpétrer un « coup d’Etat ».
Lors d’une session spéciale devant la Cour suprême, qui lui a renouvelé son appui, Nicolas Maduro a remercié les militaires pour leur soutien face à ce qu’il a appelé un « coup d’Etat en marche » dirigé par « l’empire des Etats-Unis ».
Maduro, soutenu par la Chine et la Russie
« Il ne fait aucun doute que c’est Donald Trump lui-même qui veut imposer de facto un gouvernement », a lancé le dirigeant socialiste, également soutenu par Moscou et Pékin. Peu avant, il avait annoncé la « fermeture de l’ambassade et de tous les consulats » de son pays aux Etats-Unis. Mercredi, il avait déjà annoncé la rupture des relations diplomatiques avec Washington, donnant 72 heures aux représentants américains pour quitter le pays.
Mais le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo avait répondu que Nicolas Maduro n’avait plus « l’autorité légale » pour prendre de telles décisions. Les Etats-Unis ont toutefois ordonné jeudi le départ du personnel « non essentiel » de leurs missions diplomatiques au Venezuela.
Pas de consensus de l’Organisation des Etats américains
Le président Donald Trump a été le premier à reconnaître Juan Guaido, 35 ans, qui s’est autoproclamé mercredi « président en exercice » du pays en vue d’installer un « gouvernement de transition » et d’organiser des « élections libres ». Donald Trump a été suivi par de nombreux pays d’Amérique latine.
Jeudi, les Etats-Unis ont maintenu la pression, en demandant une réunion d’urgence samedi du Conseil de sécurité sur la situation dans le pays, malgré l’opposition déclarée de la Russie à une réunion sur un sujet « interne » au Venezuela.
Plus tôt, le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo a appelé l’Organisation des Etats américains (OEA) à reconnaître Juan Guaido comme « président par intérim du Venezuela ». Ses 34 membres actifs, réunis en session extraordinaire en présence de Mike Pompeo, ne sont finalement pas parvenus à un consensus.
Le sénateur américain Bernie Sanders, candidat à la primaire démocrate pour l’élection présidentielle de 2016, a appelé de son côté à « retenir les leçons du passé et ne pas jouer le jeu des changements de régime ou du soutien des coups d’Etat ». « Les Etats-Unis sont longtemps intervenus de façon inappropriée dans les pays d’Amérique latine. Nous ne devons pas emprunter cette voie à nouveau », a-t-il ajouté.
Un soutien sans faille de l’armée
Juan Guaido, qui se trouvait jeudi « à l’abri » dans un lieu qui n’a pas été précisé, selon une source au sein de l’opposition, dit s’appuyer sur l’article 233 de la Constitution pour justifier sa proclamation. Cet article établit plusieurs cas de vacance du pouvoir, tel que le renoncement, l’incapacité mentale ou la mort. Un point controversé est la déclaration d'« abandon de mandat », déjà invoqué en 2017 par le Parlement, aux mains de l’opposition et dont les décisions sont systématiquement annulées par la Cour suprême.
« Grâce à Dieu, à la Vierge et à tous les saints, aux anges et aux archanges (…) je ne suis pas fou (…) je vais très bien (…) jamais je ne renoncerai », a lancé Nicolas Maduro. Il peut notamment compter sur la loyauté de l’armée, réaffirmée par la voix de son ministre de la Défense, le général Vladimir Padrino.
« J’alerte le peuple du Venezuela qu’un coup d’État est perpétré (…) contre notre président légitime », a lancé le ministre, entouré de tout le haut-commandement militaire, lors d’une conférence de presse. Huit généraux qui commandent des régions stratégiques du pays ont assuré également leur « loyauté et subordination absolue » au président. Lundi, une tentative de soulèvement d’un groupe de militaires à Caracas avait été rapidement réprimée.
L’UE demande des « élections libres »
Prenant ses distances avec Washington, l’UE a demandé des « élections libres » et la Haut-Commissaire des Nations unies pour les droits humains, Michelle Bachelet, a appelé depuis Davos à une « solution politique pacifique ». Une cinquantaine de pays considèrent comme « illégitime » le deuxième mandat de Nicolas Maduro, investi le 10 janvier, estimant que son élection, boycottée par l’opposition, n’a pas été transparente.
En visite au Panama, le pape François « soutient tous les efforts visant à éviter que d’autres souffrances ne soient infligées » aux Vénézuéliens, a déclaré un porte-parole du Vatican. L’aggravation de la crise politique intervient en pleine débâcle économique dans ce pays pétrolier, jadis prospère et désormais frappé par d’importantes pénuries de nourriture et de médicaments, et soumis à une hyperinflation qui devrait atteindre 10.000.000 % en 2019.