Chine: Un scientifique annonce avoir fait naître les deux premiers bébés aux gènes modifiés
ADN•Le chercheur a utilisé la technique Crispr-Cas9, dite des « ciseaux génétiques », qui permet d’enlever et de remplacer des parties indésirables du génome…20 Minutes avec AFP
Pour certains chercheurs, la ligne rouge éthique a été franchie. Si cette annonce n’a pas encore été vérifiée ou certifiée, un scientifique chinois a affirmé, ce lundi, avoir fait naître les premiers bébés génétiquement modifiés.
He Jiankui, un professeur d’université à Shenzhen, dans le sud de la Chine, a diffusé sur YouTube une vidéo annonçant la naissance il y a quelques semaines de jumelles dont l'ADN aurait été modifié pour les rendre résistantes au virus du sida. Il y précise que le père est séropositif.
Une première médicale qui n’a pas encore été vérifiée de façon indépendante
Le chercheur, qui dirige un laboratoire spécialisé dans le génome à Shenzhen, explique avoir employé la technique Crispr-Cas9, dite des «ciseaux génétiques», qui permet d’enlever et de remplacer des parties indésirables du génome. Les bébés, surnommés « Lulu » et « Nana », sont nés après une fécondation in vitro, à partir d’un embryon modifié avant d’être implanté dans l’utérus de la mère.
« Juste après avoir injecté le sperme du mari dans l’ovule, un embryologiste a également injecté une protéine Crispr-Cas9 chargée de modifier un gène afin de protéger les petites filles d’une future infection par le VIH », indique He Jiankui. Cette première médicale autoproclamée n’a pas encore été vérifiée de façon indépendante, les résultats de l’équipe chinoise n’ayant pas fait l’objet d’une publication dans une revue scientifique.
Un acte qui suscite de « graves préoccupations éthiques »
« Annoncer ces résultats par une vidéo sur YouTube est une pratique scientifique très problématique », a ainsi déploré Nicholas Evans, professeur assistant de philosophie à l’université du Massachusetts Lowell, aux Etats-Unis, qui travaille notamment sur les questions bioéthiques. « Cela écarte les processus de contrôle sur lesquels reposent de nombreuses avancées scientifiques, telles que l’évaluation par les pairs », a-t-il ajouté.
Que l’expérience soit avérée ou non, elle suscite de « graves préoccupations éthiques », souligne aussi Dr Sarah Chan, de l’université d’Edimbourg, citée par le Science Media Centre. « Faire de telles affirmations, de façon à, semble-t-il, délibérément chercher à provoquer un maximum de controverses (…) est irresponsable », ajoute-t-elle. Son annonce intervient à la veille d’une conférence d’experts mondiaux du génome à Hong Kong, au cours de laquelle le chercheur doit présenter ses résultats plus en détail.