ETATS UNISPapadopoulos, le conseiller de Trump qui parlait trop avec la Russie

George Papadopoulos, le «prof», et la «nièce» de Poutine: Bienvenue dans le roman d’espionnage de «l’affaire russe»

ETATS UNISL'ancien conseiller de Trump George Papadopoulos collabore en secret avec le FBI depuis le mois de juillet. De quoi faire frémir l'entourage du président américain…
Nicolas Raffin

Nicolas Raffin

L'essentiel

  • Trois anciens conseillers ayant participé à la campagne de Donald Trump ont été inculpés lundi.
  • L’un d’eux, George Papadopoulos, est visé pour « faux témoignage ».
  • Il a minoré l’importance et la fréquence de ses rencontres avec des personnes liées au gouvernement russe pendant la campagne présidentielle de 2016.

«There is NO COLLUSION [Il n’y a pas de collusion]. » Donald Trump a vigoureusement réagi lundi après l’inculpation de trois personnes par le procureur spécial Robert Mueller, parmi lesquelles Paul Manafort, son ex-directeur de campagne. Mais dans cette enquête sur une possible ingérence de la Russie dans l’élection américaine de 2016, un autre nom, beaucoup moins connu, est aussi sorti de l’ombre : George Papadopoulos.

Son profil Linkedin le présente comme « consultant indépendant », diplômé en sciences politiques et en relations internationales. En mars 2016, c’est d’ailleurs en tant que conseiller en politique étrangère qu’il rejoint l’équipe de campagne de Donald Trump. Le candidat le décrit alors comme « un type excellent » selon le Washington Post. Mais d'après le FBI, George Papadopoulos ne s’est pas borné à rédiger des notes et à participer à quelques réunions. L’acte d’accusation, très précis, retrace la chronologie des événements. 20 Minutes vous résume le véritable roman de l'affaire russe.

Capture d'écran du profil Linkedin de George Papadopoulos.
Capture d'écran du profil Linkedin de George Papadopoulos.  - Linkedin

Chapitre I : Le conseiller et le « Professeur »

Le 14 mars 2016, George Papadopoulos, en voyage en Italie, rencontre une personne appelée « le Professeur ». Ce dernier – identifié par plusieurs médias comme étant Joseph Mifsud, un professeur spécialisé dans la diplomatie – semble particulièrement intéressé par la fonction du jeune conseiller, et lui laisse entendre qu’il a des « connexions importantes » avec le gouvernement russe. George Papadopoulos voit dans ce contact un moyen de gagner en importance dans l’équipe de Trump.

Quelques jours plus tard, « le Professeur » le rencontre à nouveau à Londres, accompagné d’une femme, qu’il présente comme la « nièce » du président russe Vladimir Poutine… ce qui se révélera totalement faux. A la suite de cette entrevue, George Papadopoulos envoie un mail à plusieurs membres de la campagne de Donald Trump pour leur dire qu’il a discuté « de l’organisation d’une réunion entre nous et les dirigeants russes afin de discuter des liens entre les Etats-Unis et la Russie sous une présidence Trump ».

En avril 2016, George Papadopoulos continue d’échanger par mail avec le « Professeur » et la « nièce » de Poutine, toujours au sujet de cette réunion. Mais le 26 avril, lors d’une nouvelle rencontre à Londres, le « Professeur » confie au jeune conseiller que les Russes ont des « milliers » de mails d’Hillary Clinton au contenu potentiellement embarrassant… six mois avant que Wikileaks ne publie des courriels internes à son équipe de campagne. Jusqu’à la mi-août 2016, George Papadopoulos tentera, sans succès, d’organiser un voyage « off the record » de Donald Trump ou de son équipe en Russie.

Chapitre II : Coup de pression

Le 27 janvier 2017, George Papadopoulos est entendu librement par les agents du FBI qui enquêtent sur une possible ingérence russe dans la campagne présidentielle. Pendant cet interrogatoire, il aurait menti à plusieurs reprises sur « la durée, la nature et l’épaisseur » de ses liens avec ses interlocuteurs proches du gouvernement russe.

Après une nouvelle audition le 16 février 2017, le conseiller adopte un comportement qui intrigue les enquêteurs. Il désactive brusquement son compte Facebook, puis change de numéro de téléphone. Le 27 juillet 2017, il est arrêté à sa descente d’avion à Washington par le FBI. Il coopère discrètement avec le Bureau jusqu’au 30 octobre, date à laquelle les poursuites le visant, pour « faux témoignage », sont rendues publiques.

Chapitre III : A qui le tour ?

De quelle façon Papadopoulos a-t-il coopéré avec les autorités depuis le mois de juillet ? A-t-il enregistré des conversations à l'insu de membres de l'équipe Trump ? Et question cruciale : George Papadopoulos peut-il entraîner Donald Trump dans sa chute ? A court terme, cette hypothèse est très peu probable d’après Jean-Eric Branaa, auteur de Trumpland, portrait d’une Amérique divisée (Ed. Privat) : « Pour l’instant, aucun lien direct n’est établi entre ce conseiller et le président des Etats-Unis, rappelle-t-il. Parler d’impeachment [procédure de destitution] aujourd’hui n’a aucun sens. »

L’enseignant pointe néanmoins une coïncidence : « La première audition de Papadopoulos a eu lieu le jour même où Donald Trump recevait James Comey [ancien directeur du FBI] pour lui dire qu’il avait besoin de « loyauté ». Est-ce que le président des Etats-Unis a cherché à interférer dans l’enquête, où s’agit-il juste d’un hasard ? » To be continued…