VIDEO. Attentats en Catalogne: Treize ans après Madrid, l'Espagne à nouveau touchée par le terrorisme
TERRORISME•Deux attaques à la voiture bélier ont eu lieu à Barcelone et Cambrils, en Espagne, jeudi et vendredi, dans des endroits très touristiques...Lucie Bras
L'essentiel
- L’Espagne avait dajà été confronté au terrorisme en 2004, lors d’attentats très meurtriers.
- Treize ans plus tard, Daesh revendique l’attaque de Barcelone alors que le groupe djihadiste avait jusqu'à présent « épargné » le pays.
L’attaque d’une camionnette à Barcelone, revendiquée par Daesh, a fait 13 morts et une centaine de blessés jeudi dans l’après-midi. Un peu plus tard dans la nuit, un autre véhicule fonçait dans la foule de la station balnéaire de Cambrils, au sud de Barcelone. Treize ans après les attaques du métro madrilène, l’Espagne est de nouveau confrontée au terrorisme.
Une menace constante avec laquelle elle vit depuis treize ans. Depuis les attentats à la bombe de 2004 dans des trains de banlieue qui avaient fait près de 200 morts, le pays n’a jamais cessé d’être en alerte.
Pourquoi viser l’Espagne ?
Mais depuis quelques années, le niveau de vigilance s’est encore accru. « Depuis fin 2014, l’Espagne a envoyé un contingent en Irak afin d’entraîner environ mille hommes des forces gouvernementales partant combattre à Mossoul, rappelle Jean Chalvidant, spécialiste de l’Espagne joint par 20 Minutes.
Cela a valu à l’Espagne d’être le 6 juin dernier déclarée cible prioritaire par Daesh, qui a demandé à ses « loups solitaires » de lancer une vague d’attentats (ainsi qu’en France, Belgique, USA, Allemagne et Russie). Un visuel avait été diffusé, présentant deux mains tenant un pistolet avec les drapeaux des Etats visés, dont l’Espagne. Et en janvier dernier, Daesh a diffusé une vidéo de la « cyber-armée du Califat », menaçant de conquérir Paris, Rome et l’Espagne (et non pas seulement Madrid).
Le territoire perdu d'« Al Andalus »
Des messages de l’organisation de l’Etat islamique (EI) ont régulièrement menacé l’Espagne d’attentats sur son territoire afin de récupérer les terres perdues d'« Al Andalus », soit l’ensemble des territoires de la péninsule ibérique sous domination musulmane entre le 8e et le 15e siècle.
Pour tenter d’endiguer cette menace, les opérations spéciales des forces de police ont également été multipliées. Rien qu’en 2016, 24 coups de filet antiterroristes ont été menés, et 47 personnes ont été écrouées, d’après les chiffres officiels. « Il n’y a pas eu d’attaque manquée, uniquement des plans déjoués par la police en amont », assure Jesus Pérez Triana, spécialiste des questions de défense et de sécurité en Espagne.
Peu d’Espagnols partis en zone irako-syrienne
Territoire historique de l’Islam, restée jusqu’ici en marge des cibles de Daesh pendant des années, l’Espagne est tout aussi concernée par la radicalisation de certains jeunes que d’autres pays européens. « On retrouve un profil assez commun chez les djihadistes : ce sont souvent des jeunes qui connaissent une crise d’identité jusqu’à ce qu’ils trouvent leur place dans le monde en allant faire le djihad. C’est très similaire aux profils de jeunes djihadistes français, il me semble », explique Jesus Pérez Triana.
Les Espagnols sont pourtant peu nombreux à avoir pris le chemin de la Syrie. « Il y a beaucoup d’opérations antiterroristes mais finalement peu de djihadistes. Sur le territoire, on trouve surtout des diffuseurs de propagande et des recruteurs. Seuls 250 Espagnols sont partis combattre en Syrie », rappelle Ignacio Cembrero, journaliste espagnol et auteur du livre La Espana de Ala. En comparaison, en France, 700 personnes se sont engagées sous la bannière de Daesh en zone irako-syrienne. Pour le moment, le profil des personnes placées en garde à vue après les attentats de Catalogne n’a pas filtré.
Le tourisme, encore et toujours cible de Daesh
Plus encore que lors des attentats de Madrid, c’est le tourisme qui est ciblé par Daesh à travers ces deux nouvelles attaques en Catalogne. Une manne financière qui représente 11 % de l’économie ibérique, et une cible qui assure au groupe djihadiste un fort retentissement dans le monde.
« Le choix de Barcelone est tactique : en ce moment, Madrid est vide de ses habitants, tandis que les touristes s’agglutinent en Catalogne, renchérit Jean Chalvidant, docteur en Civilisation espagnole et criminologue. Daesh fait donc d’une pierre deux coups : il châtie l’Espagne tout autant que les étrangers se trouvant sur place. »
« Barcelone est de loin la ville la plus touristique d’Espagne », souligne Ignacio Cembrero. Si l’état d’alerte est déjà presque à son seuil maximum, cet attentat dans le cœur touristique de l’Espagne devrait au moins voir apparaître une série de nouvelles mesures de sécurité des badauds dans les lieux publics.