Médias interdits d'accès à la Maison Blanche: Ils dénoncent «la vision autoritaire inquiétante» de Trump
ETATS-UNIS•Le «New York Times», le «Guardian», CNN ou la BBC se sont vu interdire l'accès au briefing du porte-parole de la Maison Blanche...M.C.
La rupture est consommée entre Donald Trump et une partie de la presse américaine. Le milliardaire, qui a déjà fait des violentes attaques contre les médias sa marque de fabrique, est passé vendredi à un autre stade en barrant l’accès à la Maison-Blanche à plusieurs d’entre eux.
Plusieurs institutions du journalisme comme le New York Times, le Guardian, CNN ou la BBC ont ainsi été interdites au point presse quotidien de Sean Spicer, le porte-parole de la présidence américaine, tandis que d’autres, plus proches du pouvoir, tels que Breitbart ou One America News, ont reçu le feu vert pour y assister.
Fait rare, ce point presse, qui permet de poser des questions sur l’actualité du jour, n’était pas organisé dans la salle de presse face aux caméras comme c’est le cas habituellement, mais dans le bureau de Sean Spicer.
« Une vision autoritaire inquiétante de la présidence »
La mesure a évidemment provoqué l’indignation des médias exclus : le New York Times a dénoncé « une insulte aux idéaux démocratiques », quand CNN fustigeait un développement « inacceptable ».
« Trump a laissé entrevoir une vision autoritaire inquiétante de la présidence (…); punir des organisations qui publient des articles critiques sur le président tombe exactement dans cette catégorie », a de son côté écrit le Los Angeles Times, jugeant que cet épisode avait fait monter d’un cran « la guerre de la Maison Blanche contre la presse libre ».
L’Association des correspondants de la Maison Blanche (WHCA) a elle protesté « avec force » contre cette initiative. Elle a souligné peu après que le dîner aurait lieu comme prévu et continuerait à être une célébration « du rôle important joué par les médias indépendants » dans une démocratie.
Quand était opposé à l’idée d’interdire l’accès à certains médias
Un enregistrement réalisé en décembre par Politico, à l’époque où Donald Trump avait déjà été élu mais n’avait pas encore pris ses fonctions, a rapidement refait surface. Dans cette discussion, Sean Spicer affirmait clairement qu’il était opposé à l’idée d’interdire l’accès à certains médias. « Qu’ils soient conservateurs, progressistes ou autres, je pense que c’est ce qui fait d’une démocratie une démocratie par rapport à une dictature », arguait-il.
Ari Fleischer, ancien porte-parole de George W. Bush, a jugé qu’interdire l’accès à certaines organisations à un point presse était « mal avisé et contre-productif ». Mais il a aussi appelé à mettre l’incident en perspective : « Calmez-vous », a-t-il lancé. « Les porte-parole doivent rencontrer toute la presse. Mais au-delà, il n’y a rien d’inhabituel à ce que les présidents rencontrent des journalistes qu’ils ont choisis et les équipes de la Maison Blanche le font aussi tout le temps ».
Trump snobe le dîner des correspondants de la Maison Blanche
Cette décision a pris un relief particulier car elle intervenait quelques heures après une nouvelle charge du président républicain contre les médias, qualifiés pour la énième fois de « malhonnêtes » et mis, pour certains d’entre eux, dans la case des « ennemis du peuple ».
Samedi après-midi, le président républicain a voulu enfoncer le clou de manière symbolique en annonçant, dans un tweet, qu’il ne participerait pas au dîner des correspondants de la Maison Blanche, rompant avec une tradition très ancienne.
aCe dîner de gala, prévu le 29 avril, se déroule chaque année dans un hôtel de Washington et réunit le gratin de la presse et du monde politique. Il offre l’occasion au président - quelle que soit sa couleur politique - de prononcer un discours teinté d’autodérision, mais aussi de s’exposer aux flèches moqueuses d’un humoriste.
C’est lors de ce dîner, auquel il participait en tant qu’invité en 2011, que Donald Trump avait été la cible des blagues de Barack Obama. Un épisode que des analystes jugent crucial dans la décision du magnat de l’immobilier de se présenter à la présidence.