Les «Nachis», jeunesse pro-Poutine
REPORTAGE•Cette oragnisation est devenue un véritable instrument politique...Emmanuel Dalbane
Une grande maison à deux étages refaite à neuf, équipée d’ordinateurs dans toutes les pièces: les «Nachis» de la ville de Vladimir, parmi les plus actifs du pays, ont les moyens de leurs ambitions. Rien de plus normal en Russie pour une organisation de jeunesse dont le but est de faire la promotion du président Vladimir Poutine.
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Dans cette ville moyenne, située à moins de deux cents kilomètres de Moscou, ces jeunes propres sur eux et pleins de bonne volonté mènent des actions dans la rue pour appeler à donner son sang, à visiter les vétérans de guerre, à faire plus d’enfants, à aller à l’armée…
Cet activisme permanent a plu à Anton, un étudiant de dix-huit ans, qui a rejoint l’organisation il y a un mois et demi. «Au début, je n’étais pas convaincu, explique-t-il. Mais j’ai vu les campagnes qu’ils organisaient pour empêcher les magasins de vendre de l’alcool aux mineurs. Ça marchait. Je me suis dit que c’était pas des histoires, qu’avec eux, je pouvais vraiment changer quelque chose dans mon pays.»
Contrer les «révolutions de couleur»
Les Nachis forment avant tout un instrument politique de premier choix pour Vladimir Poutine. L’organisation a été créée il y a trois ans dans la foulée des «révolutions de couleur» qui ont conduit à la chute pacifique des gouvernements voisins, en Géorgie et en Ukraine. Les jeunes militants y avaient joué un rôle crucial, et les Nachis ont été créés pour éviter que la vague révolutionnaire ne s’étende à la Russie.
Lundi, une dizaine de milliers de ses sympathisants se rendront ainsi sur la place Rouge, à Moscou, pour «défendre les résultats» des élections législatives de dimanche, explique Nastia Makarova, qui à dix-huit ans dirige la section des «actions de masse» pour Vladimir.
Elle est habituée à ce genre de rassemblement: en avril, elle avait campé pendant une semaine devant l’ambassade d’Estonie à Moscou, parce que le gouvernement estonien avait déboulonné une statue à la gloire de l’Armée Rouge. Lundi, elle partira avec la délégation de six cents jeunes Vladimiriens à Moscou.
Endoctrinement
Mais les militants des Nachis ne sont que deux cents dans la ville; dans le bureau, une dizaine d’entre eux sont donc occupés à appeler des listes de téléphones pour convaincre d’autres jeunes de se joindre à eux. Anton, petit nouveau, récite le même discours que ses camarades, persuadé que l’opposition «servant les intérêts de l’Ouest» n’attend qu’un faux pas pour renverser Vladimir Poutine – «un mec bien».
Au cours des derniers mois, une cinquantaine de jeunes de 16 à 18 ans sont venus, comme lui, renforcer les effectifs locaux. A Vladimir comme ailleurs, les dirigeants des Nachis n’ont pas de mal à trouver de nouvelles recrues. Car en plus d’un abonnement gratuit de téléphonie mobile, les militants reçoivent aussi la promesse d’un futur meilleur, comme les jeunes «komsomols» de l’époque communiste. «Nous offrons des études secondaires gratuites à l’Ecole supérieure d’administration. Et après la deuxième année, on peut obtenir des stages dans les ministères, ou dans les grandes entreprises comme Gazprom ou Transneft», raconte Alisa, chef de l’idéologie de la section de Vladimir. Avec les Nachis, Vladimir Poutine ne s’assure donc pas seulement le soutien de la jeunesse, mais aussi la création d’une future élite formée selon ses règles.