Attentat à Orlando: Comment la fusillade va peser sur la campagne présidentielle
ETATS-UNIS•Après la fusillade qui a fait 50 morts dans une boîte de nuit gay à Orlando, les réactions des favoris Hillary Clinton et Donald Trump ont un peu plus polarisé la campagne présidentielle...Laure Cometti
Orlando. Le nom de la ville de Floride plane sur lacampagne présidentielle américaine après la fusillade qui a fait 50 morts dimanche dans une boîte de nuit fréquentée majoritairement par des homosexuels et des personnes transgenres. Alors que les primaires des deux grands partis touchent à leur fin, les deux favoris - Hillary Clinton côté démocrate et Donald Trump dans le camp républicain - ont immédiatement réagi, dans deux styles bien différents.
L’éternel débat sur le très controversé contrôle des armes à feu
« Trois des sujets les plus controversés de la culture et de la politique américaines - les droits des homosexuels, le contrôle des armes à feu et le terrorisme - se sont télescopés dimanche d’une horrible manière dans une boîte de nuit d’Orlando », résume le Washington Post. Il est certain que la fusillade a relancé l’éternel et brûlant débat sur le port d’armes outre-Atlantique. Sur ce sujet, Hillary Clinton et Donald Trump sont radicalement opposés. La première veut restreindre l’obtention d’armes à feu, une position qu’elle a réaffirmé après avoir rendu hommage aux 49 personnes abattues par le tueur armé d’un fusil d’assaut.
Quant au magnat de l’immobilier, il a déclaré ce lundi sur ABC que si la clientèle du Pulse avait été armée, « nous n’aurions pas eu cette tragédie-là », une déclaration presque identique aux propos qu’il avait tenus après les attentats du 13 novembre 2015 à Paris et Saint-Denis et ceux du 22 mars 2016 à Bruxelles.
Malgré tout, le débat sur le contrôle des armes à feu ne va pas obligatoirement tourner à l’avantage des démocrates. « Barack Obama apparaît impuissant à imposer des restrictions face à un Congrès majoritairement à droite », rappelle l’historienne des Etats-Unis Nicolas Bacharan. Les puissants lobbies pro-armes, NRA (National Rifle Association) en tête, ne sont pas étrangers à ce statu quo. En outre, le discours pro-régulation « est moins populaire après des troubles violents, en général les achats d’armes augmentent », souligne Sophie Body-Gendrot, chercheure au CNRS. Selon les dernières enquêtes d’opinion du Pew Research Center, la société américaine est très divisée sur cette question. Elle risque de l’être un peu plus après l’attaque du club Pulse à Orlando.
Terrorisme et menace intérieure
Le débat sur le contrôle des armes à feu risque toutefois « d’être noyé par celui sur le terrorisme islamiste », estime Nicole Bacharan. Or la menace terroriste est depuis le début de la campagne le fonds de commerce de Donald Trump, qui a notamment déclaré vouloir interdire aux musulmans étrangers d’entrer aux Etats-Unis. Il semble continuer de miser sur cette stratégie et a annoncé qu’il consacrerait son discours prévu ce lundi à Manchester dans le New Hampshire au « terrorisme, à l’immigration et la sécurité nationale », alors qu’il avait initialement prévu de viser sa rivale.
Peu importe si le tueur d’Orlando, Omar Mateen, avait la nationalité américaine, la fusillade va alimenter la rhétorique de Trump, estime Marie-Cécile Naves, docteure en science politique de l’université Paris-Dauphine. « C’est du pain béni pour lui. D’ailleurs, il a très vite dégainé en fustigeant le "laxisme" d’Obama face à ce qu’il appelle les « ennemis intérieurs des Etats-Unis », dont les musulmans font selon lui partie ».
Donald Trump est allé encore plus loin ce lundi, accusant les musulmans américains de ne pas coopérer avec les forces de l’ordre pour dénoncer les suspects comme Omar Mateen.
aUne campagne de plus en plus polarisée
Le fait que le tueur a visé la communauté LGBTI (regroupant les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexués) a moins monopolisé les débats. Hillary Clinton a affirmé être « une alliée » de la communauté LGBTI, un électorat majoritairement démocrate selon Marie-Cécile Naves. « Moins à l’aise sur ce sujet », Donald Trump est en revanche resté très silencieux sur ce point, relève Nicole Bacharan.
Est-ce le discours clivant de Donald Trump ou celui plus rassembleur d’Hillary Clinton qui va l’emporter ? Difficile à dire à cinq mois du scrutin. Une chose est sûre : le ton s’est durci et « les débats se sont polarisés », observe Marie-Cécile Naves.