Corée du Nord: Pourquoi Kim Jong-Un convoque un congrès du parti unique
KIM JONG-UN•Kim Jong-Un a ouvert ce vendredi le septième congrès du parti unique nord-coréen...William Pereira
C’est à l’abri des regards de la centaine de journalistes internationaux invités à l’occasion que s’est tenue l’ouverture du septième congrès du parti unique dans le grand palais du 25 avril, le premier depuis 1980. A l’époque, Kim Il-Sung avait profité de l’occasion pour désigner Kim Jong-Il comme son héritier. Celui convoqué par Kim Jong-Un dès vendredi est quant à lui destiné à consacrer le règne absolu du « Grand Soleil du XXIe siècle » et de faire le point sur la politique intérieure qui sera menée dans les années à venir. La stratégie de Byungjin, à savoir le fait de mener en tandem développement économique et programmes nucléaire et balistique, devrait notamment être confirmée dans les jours à venir.
Pas d’annonce majeure sur le nucléaire
Pour autant, la politique extérieure adoptée par le régime en termes de nucléaire ne devrait pas occuper une place importante lors du congrès du parti au pouvoir. « Il n’y a pas d’annonce à faire sur le nucléaire en Corée du Nord, où le terme de nucléaire a été institutionnalisé [par le régime] en 2012 », analyse Antoine Bondaz, chercheur à l’Asia Centre et spécialiste de la Corée du Nord. Il faut dire que la politique nucléaire interne ne passionne pas suffisamment les Nord-Coréens au point d’en faire le sujet central de l’événement politique majeur de ces 30 dernières années. « Dans les restaurants, quand la télé est allumée et que les chaînes d’informations diffusent des rapports sur les essais nucléaires du régime, personne n’y prête réellement attention », confirme Nicolas Levi, chercheur sur la Corée du Nord au sein de l’Académie Polonaise des Sciences, qui ajoute que « la population est intéressée par l’évolution économique du pays et la libéralisation du marché. »
Le parti unique plus que jamais au centre de la vie politique
Si la première journée du congrès a pris la forme d’un vaste bilan du premier quinquennat du leader suprême, les prochaines devraient faire l’objet d’une redistribution des cartes au sein du parti unique. « L’hypothèse la plus plausible serait d’assister à une normalisation de la vie institutionnelle, de revenir à la vie politique des années 60-70 » après deux décennies marquées par la forte présence des cadres de l’armée au sommet de la hiérarchie, explique Antoine Bondaz.
Pour Nicolas Levi, ce changement se veut plus symbolique que stratégique. « Dans les faits, l’armée a toujours été l’armée du parti. Elle a un poids important mais pas vital. Ce n’est pas le cœur du système. En revanche, il sera intéressant d’observer s’il y aura de nouvelles nominations et si, parmi les gens nommés l’on trouvera des personnes issues du civil, du militaire voire directement de la famille de Kim Jong-Un. »
Attirer les investisseurs privés
Au-delà de toute interprétation, Nicolas Levi rappelle que l’organisation d’un tel congrès est, de fait, avant tout « la preuve que le parti unique est stable. » « S’il n’y a pas eu de congrès pendant les dernières années, c’est que la Corée du Nord était en crise et que l’environnement n’était pas propice à la tenue de l’événement. Aujourd’hui, le pays a retrouvé son niveau économique des années 80 », souligne quant à lui Antoine Bondaz. Stabilité politique et embellie économique devraient donc être mises en lumière par le dirigeant nord-coréen tout au long du congrès, et ce, dans le but de « convaincre les investisseurs privés étrangers de venir s’installer en Corée du Nord », prédit Nicolas Levi.
Mais l’ouverture économique voulue par le « Grand Soleil du XXIe siècle » dans le cadre du Byungjin est-elle vraiment compatible avec un programme nucléaire agressif envers l’occident ? « Ce n’est pas contradictoire. Le progrès économique est possible dans cette configuration, mais il sera beaucoup plus long », estime Antoine Bondaz.