Tafta: Pourquoi les négociations n’avancent pas entre les Etats-Unis et l'Europe
COMMERCE•Les négociations sur le TTIP reprennent ce lundi à New York, au moment où Barack Obama vient défendre le traité en Europe...C’est reparti. Ce lundi s’ouvre à New York un nouveau cycle de négociations sur le traité de libre-échange transatlantique, également connu sous le nom de Tafta ou de TTIP. C’est le treizième round organisé depuis 2013. Il faut dire que les discussions entre Washington et la Commission européenne n’en finissent plus de patiner. Ce qui agace le président Barack Obama, qui veut profiter de son passage à Hanovre (Allemagne) pour convaincre ses partenaires européens de boucler les négociations d’ici à la fin de l’année.
Qu’est-ce que le Tafta ?
C’est un vaste accord commercial qui vise à supprimer les barrières douanières et réglementaires entre les Etats-Unis et l’Union européenne. Il rencontre une forte résistance dans la société civile, qui critique notamment son opacité, ainsi que l’impact qu’il pourrait avoir sur l’agriculture et sur l’environnement. Le peuple allemand est particulièrement remonté : seuls 17 % des citoyens le considèrent comme « une bonne chose », selon un sondage de la fondation Bertelsmann. Samedi, des dizaines de milliers de personnes ont encore manifesté contre le projet dans les rues de Hanovre. Rappelons qu’en octobre, le pays avait déjà vu défiler entre 150.000 et 250.000 personnes à Berlin contre le TTIP. Le peuple étasunien est lui aussi sceptique : le Tafta séduit seulement 15 % des Américains. Les Français sont un peu plus convaincus, avec 50 % de citoyens favorables.
Qui défend ce traité ?
Les Etats-Unis, en tout cas le président Barack Obama et son actuelle administration. Pour faire avancer ce dossier, qu’il espère voir bouclé avant la fin de son mandat en janvier 2017, il a « invité » ce lundi après-midi la chancelière allemande Angela Merkel, les chefs de gouvernement britannique et italien David Cameron et Matteo Renzi et le président français François Hollande à un mini-sommet entre autres consacré au Tafta – les discussions porteront également sur le mouvement djihadiste Etat islamique, sur la morosité économique en Europe, le Brexit ou encore, la crise migratoire. Côté européen, le gouvernement allemand, à la tête d’un Etat champion de l’exportation, est le plus fervent défenseur de l’accord. Si Obama et Merkel défendent le traité, c’est parce qu’ils pensent que le Tafta redynamisera les économies américaines et européennes et qu’il créera de l’emploi sur les deux continents. Mais aussi parce qu’ils croient qu’en parvenant à s’entendre, les Etats-Unis et l’UE pourront par la suite imposer leurs normes à toute la planète. Et donc continuer à dominer le monde.
Qui bloque les discussions ?
Les négociateurs européens, selon les Américains. Les négociateurs américains, selon les Européens. En fait, les Européens, y compris les Allemands, estiment que Washington ne fait pas assez de concessions. Autrement dit, que l’administration américaine fait tout pour parvenir à un accord qui incitera les peuples américains et européens… à acheter seulement américain. Deux points posent particulièrement problème. Primo, la réglementation. Les négociateurs européens veulent que le futur traité se fonde sur les exigences les plus élevées, que ce soit en matière sociale, environnementale ou encore de sécurité. Secundo, les marchés publics. Les Européens estiment que les Etats-Unis ne proposent pas, pour l’heure, une ouverture suffisante de leurs appels d’offres aux PME européennes.
Que dit la France ?
Elle essaye de hausser le ton. D’après l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, François Hollande aurait carrément refusé d’aborder le sujet du Tafta ce lundi après-midi lors du mini-sommet. Il aurait expliqué que ce sujet est « trop impopulaire en France ». Mais plus que la sensibilité de l’opinion publique, c’est le manque d’égard des Etats-Unis qui fâche la France. Dimanche, Matthias Fekl, le secrétaire d’Etat au Commerce extérieur, a d’ailleurs déclaré sur France Inter : « Un accord est bon s’il apporte des avancées et sur les intérêts de notre économie et sur les principes que nous portons », or, a-t-il encore affirmé, « vous prenez l’ensemble des sujets, aujourd’hui aucun intérêt n’est pris en compte de la manière que nous souhaitons ». La semaine dernière, François Hollande avait quant à lui dit que la France pouvait « toujours dire non » si les conditions qu’elle a posées, concernant la transparence ou encore l’accès aux marchés publics, n’étaient pas respectées.