Les révélations des «Panama Papers» font chuter le Premier ministre islandais

Les révélations des «Panama Papers» font chuter le Premier ministre islandais

Les "Panama Papers" ont fait leur première victime de taille: le Premier ministre islandais a démissionné mardi, emporté par la pression de la rue outrée par les révélations sur ses placements dans des paradis fiscaux.
Le Premier ministre islandais Sigmundur David Gunnlaugsson, dans la tourmente du scandale "Panama papers"
Le Premier ministre islandais Sigmundur David Gunnlaugsson, dans la tourmente du scandale "Panama papers" - HALLDOR KOLBEINS AFP
© 2016 AFP

© 2016 AFP

Les «Panama Papers» ont fait leur première victime de taille: le Premier ministre islandais a démissionné mardi, emporté par la pression de la rue outrée par les révélations sur ses placements dans des paradis fiscaux.

C'est le premier «scalp» obtenu par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), dont les membres dévoilent depuis dimanche les pratiques financières et fiscales à tout le moins opaques de personnalités, chefs d'Etat, entrepreneurs, sportifs, banques... tout un éventail de clients du cabinet d'avocats panaméen Mossack Fonseca, spécialisé dans la domiciliation offshore d'entreprises.

Sigmundur David Gunnlaugsson faisait face à la bronca depuis dimanche et les révélations sur des millions de dollars qu'il a détenus via une société ayant son siège aux îles Vierges britanniques, appelée Wintris, avec son épouse, riche héritière. Des milliers d'Islandais - mobilisation massive à l'échelle de ce petit pays - avaient réclamé sa démission lundi soir à Reykjavik.

L'affaire est extrêmement sensible dans un pays marqué par les excès des années 2000, pendant lesquelles un secteur financier euphorique ainsi que ses dirigeants et ses cadres usaient et abusaient des sociétés écrans. L'économie avait ensuite été terrassée par la crise financière en 2008.

Depuis dimanche, les médias participant à l'ICIJ distillent les noms des clients qu'ils ont trouvés en épluchant plus de 11 millions de documents confidentiels de Mossack Fonseca, provoquant des remous dans le monde entier.

- «Un énorme problème» -

Le Premier ministre britannique David Cameron était aussi sous pression mardi, mais dans des proportions bien moindres. Son père Ian, aujourd'hui décédé, ayant dirigé un fonds d'investissement dont le siège est aux Bahamas et dont les profits ont échappé au fisc britannique à la suite d'un montage effectué via Mossack Fonseca, le chef de l'opposition travailliste Jeremy Corbyn a demandé «une enquête indépendante».

Le Premier ministre Pakistanais, Nawaz Sharif, dont la famille est éclaboussée, a annoncé mardi la création d'une «commission judiciaire» qui «tranchera sur la réalité et sur le poids de ces allégations».

Réagissant à ces révélations, le président américain Barack Obama a considéré que «l'évasion fiscale est un énorme problème», insistant sur la nécessité de durcir les législations en vigueur et de renforcer la coopération internationale.

A cet égard, le gouvernement français a annoncé mardi qu'il réinscrivait le Panama sur sa liste des paradis fiscaux. Et le pays d'Amérique centrale a aussitôt annoncé envisager des représailles économiques contre la France.

En France, le quotidien Le Monde, un des participants à l'opération de l'ICIJ, a mis en cause l'entourage de Marine Le Pen, la présidente du Front National (extrême droite).

- Marchand d'armes et nucléaire -

Aux Pays-Bas, le quotidien Trouw affirme que parmi les centaines de Néerlandais ayant fait appel aux services du cabinet panaméen pour créer des sociétés dans des paradis fiscaux, figure l'ancien footballeur international Clarence Seedorf.

Et le président de la Fifa, Gianni Infantino, était mis en cause pour avoir signé des contrats avec une société offshore pour céder des droits télévisés en dessous des prix du marché alors qu'il travaillait à l'UEFA, selon le Süddeutsche Zeitung. Ce quotidien allemand a été le premier à recevoir les 11,5 millions de documents cryptés à l'origine de l'affaire, transmis par un lanceur d'alerte dont l'identité reste secrète.

Le fisc canadien a fait savoir mardi soir qu'il aimerait bien avoir accès aux documents sensibles analysés par la centaine de médias engagés dans cette enquête inédite, pour pouvoir poursuivre d'éventuels contribuables. Selon le Toronto Star, membre de l'ICIJ, quelques 350 citoyens canadiens y figurent.

Le Monde a aussi placé la banque française Société Générale dans le top 5 des banques qui ont eu le plus recours à Mossack Fonseca pour créer des sociétés offshore (une pratique qui n'est pas illicite), derrière HSBC, UBS, Crédit Suisse.

Certains noms évoquent des univers plus sulfureux. Comme celui de John Bredenkamp, un négociant d'armes zimbabwéen qui selon Trouw a eu «au moins 13 sociétés» via Mossack Fonseca, dont «au moins cinq se sont retrouvées sur des listes internationales de sanctions pour une implication présumée dans la vente d'armes au président du Zimbabwe» Robert Mugabe.

Les médias britanniques BBC et The Guardian font aussi état d'activités allant au-delà de la simple évasion fiscale, affirmant qu'une société écran nord-coréenne utilisée pour financer le programme nucléaire de Pyongyang a figuré parmi les clients de Mossack Fonseca.

Cet article est réalisé par Journal du Net et hébergé par 20 Minutes.