ETATS-UNISFusillade en Californie: Quand les médias américains envahissent le domicile des assaillants

Fusillade en Californie: Quand les médias américains envahissent le domicile des assaillants

ETATS-UNISDes dizaines de photographes, vidéastes et de curieux se sont engouffrés dans l'appartement...
Mathias Cena

M.C. avec AFP

Vendredi, 9h15 (18h15, heure française). Le propriétaire de l’appartement de rez-de-chaussée où vivait le couple qui a perpétré une tuerie en Californie fait sauter les plaques scellant la porte d’entrée. Moins de 48 heures après la fusillade, qui a fait 14 morts et 21 blessés à San Bernardino, des médias font irruption dans l’appartement, et avec une facilité surprenante vu la sensibilité de l’enquête, fouillent les effets personnels des tireurs et de leur bébé.

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Selon MSNBC, un journaliste aurait versé 1.000 dollars au propriétaire pour qu’il ouvre la porte de l’appartement préalablement passé au peigne fin par le FBI, et le reste des médias s’est engouffré à sa suite. Aussitôt se presse une cohue de dizaines de photographes, vidéastes et de curieux, défilant de pièce en pièce.

« It's a media circus inside location on Center St in Redlands #SBShooting @KPCC pic.twitter.com/8k87CoV4iA — Maya Sugarman (@mayasugarman) December 4, 2015 »

Plusieurs télévisions lancent des directs, leurs reporters commentant leurs découvertes et filmant en gros plan les objets ayant appartenu à Syed Farook et Tashfeen Malik, tués mercredi par la police après leur fusillade mortelle.

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Dans le logis dévasté, les reporters enregistrent des images de ce qui pourrait être la première photo publiée de Tashfeen Malik, qui fait allégeance au groupe Etat islamique selon des médias américains. Ils montrent aussi des peluches de la fillette du couple, un tapis de prière, des factures adressées à la famille et jusqu’au fond d’une corbeille à papiers. Les enquêteurs avaient auparavant très vraisemblablement emporté tous les objets pouvant leur être utiles, notamment le matériel informatique. Les agents du FBI ont d’ailleurs laissé une liste détaillée de leurs saisies, comme l’exige la loi. Elle suscite un vif intérêt chez les représentants de la presse présents.

Le propriétaire de l’appartement où vivaient les auteurs de la fusillade de San Bernardino, en Californie, parle à la presse américaine le 4 décembre 2015. - ROBYN BECK/AFP

« C’est le chaos, ici ! », s’exclame le propriétaire, visiblement dépassé par les événements. Ses locataires versaient régulièrement leur loyer, explique-t-il, comment se douter qu’ils allaient commettre un massacre ? « Ils n’avaient pas d’étiquette ou de drapeau sur eux », dit-il.

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Dans l’appartement à l’électricité coupée, un journaliste met la main sur un permis de conduire, d’autres mitraillent des boîtes de conserve, un lit d’enfant, ou encore un autocollant affichant : « Prions Allah qui a soulagé mes souffrances ». « Les gens touchaient à tout, certains journalistes ont pris des albums et extrait des photos pour les photographier », relate Robyn Beck, photographe de l’Agence France Presse qui a participé à la visite non guidée.

« Ce n’est plus notre problème de savoir qui y rentre »

Une telle scène de confusion est extrêmement rare aux Etats-Unis, pays où la police est connue pour boucler très strictement les théâtres criminels. Le FBI s’est défendu de toute négligence, affirmant avoir achevé en moins de 48 heures ses analyses scientifiques dans l’appartement situé à Redlands, non loin de San Bernardino où s’est déroulée la fusillade. « Une fois que nous rendons un endroit à ses occupants, ce n’est plus notre problème de savoir qui y rentre », a déclaré David Bowdich, un responsable du FBI de Los Angeles,

Reste que ce tohu-bohu médiatique, dans un logis où les policiers ont saisi un véritable arsenal, a suscité la controverse. Les reproches visaient aussi bien les autorités, pour ne pas avoir gardé l’entrée de l’appartement, que la presse, pour son voyeurisme et manque d’éthique présumés. Très critiquée, CNN a cité un expert qui a assuré n’avoir jamais assisté à un tel scénario choquant. Un autre spécialiste interrogé sur CNN a évoqué « une connerie historique ».