Migrants: Pourquoi la route des Balkans est-elle de plus en plus fréquentée?
IMMIGRATION•La Hongrie fait désormais partie des pays les plus exposés à la crise des migrants, avec la Grèce et l’Italie, selon la Commission européenne…Laure Cometti
La Macédoine a décrété ce jeudi l’état d’urgence, notamment dans le sud du pays confronté à un afflux de migrants en provenance de la Grèce sans précédent. Chaque jour, entre 2.000 et 3.000 réfugiés arrivent dans ce pays de 2,1 millions d’habitants, une étape sur l’artère migratoire appelée « route des Balkans ».
Il y a de plus en plus de réfugiés qui arrivent en Grèce
Derrière cet afflux de migrants dans les Balkans, il y a d’abord un facteur numérique. Depuis 2015, le nombre de réfugiés arrivés en Grèce atteint pour la première fois le niveau de l’Italie, avec respectivement 54.275 et 58.763 migrants à la mi-juin, venant principalement d’Afghanistan et de Syrie. Quatre millions de Syriens ont fui leur pays depuis le début de la guerre selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). La plupart se trouvent en Turquie (1,8 million) ou au Liban (1,2 million), où « un habitant sur quatre est un réfugié syrien », souligne Louise Carr, coordinatrice du programme Personnes déplacées chez Amnesty France. Or les réfugiés n’aspirent pas à rester dans ces pays d’accueil provisoire.
Des frontières poreuses
Si la route des Balkans est de plus en plus fréquentée, elle existe depuis longtemps. « Les Macédoniens et les Kosovars notamment se rendent depuis des années dans l’Union européenne pour travailler. Les réfugiés se greffent sur cette route déjà tracée », explique Daphné Bouteillet-Paquet, conseillère juridique au Conseil européen des réfugiés et exilés (ECRE) qui regroupe 80 ONG. « Les frontières entre les pays des Balkans sont poreuses et peu sécurisées du fait du manque d’infrastructures et du relief montagneux », décrit-elle.
Le manque de contrôle aux frontières des pays des Balkans a d’ailleurs été dénoncé par le commissaire européen aux Affaires intérieures. Et les relations diplomatiques tendues entre la Macédoine et la Grèce ne facilitent pas la coopération en matière de flux migratoires.
Un manque d’infrastructures et un vide juridique
Dans chaque pays-étape de la route des Balkans, les autorités agissent sans réelle organisation ou coopération. Les migrants sont tantôt refoulés, parfois violemment, au mépris du droit international, tantôt accueillis et « aiguillés » vers le pays voisin, plus au Nord, faute de pouvoir être accueillis. En Grèce, les autorités transfèrent les migrants qui arrivent en masse sur les îles de la mer Egée vers Thessalonique, deuxième ville du pays, à environ 80 kilomètres de la frontière macédonienne. De là, « des bus sont affrétés pour les emmener en Macédoine », explique Daphné Bouteillet-Paquet.
Un rapport d’Amnesty International dénonce les mauvais traitements infligés par la police en Macédoine, qui refoule parfois violemment les migrants à la frontière grecque. Dans le même temps, l’unique centre pour migrants du pays étant saturé, les autorités laissent les migrants monter dans un train qui relie le sud du pays à la Serbie, ultime étape avant d’atteindre la Hongrie, dans l’Union européenne.
Depuis le début de l’année, 60.620 réfugiés sont entrés clandestinement dans ce pays. Des chiffres en hausse, tandis que le chantier de renforcement de la frontière doit s’achever le 31 août prochain. En outre, « le Parlement hongrois a récemment adopté une loi qui autorise les autorités à refouler les personnes en provenance d’un pays des Balkans », indique Louise Carr. « Les migrants sont pris au piège ».