MONDEAttentat à Tunis: Le manque de clarté des autorités critiqué

Attentat à Tunis: Le manque de clarté des autorités critiqué

MONDELe président Caïd Essebsi et le chef du gouvernement Habib Essid ont reconnu des «failles» dans la sécurité après l'attentat de mercredi qui a coûté a vie à 21 personnes…
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

Des informations contradictoires ou incomplètes distillées parfois dans la précipitation: la communication confuse des autorités tunisiennes après l'attaque sanglante au musée du Bardo soulève des interrogations et laisse le champ libre aux rumeurs.

Le président Béji Caïd Essebsi et le chef du gouvernement Habib Essid ont reconnu des «failles» dans la sécurité après l'attentat de mercredi, qui a visé des étrangers pour la première fois depuis la révolution de 2011. Revendiqué par le groupe Etat islamique (EI), il a coûté la vie à 20 touristes et un policier tunisien.

Manque de coordination entre les divers services de l’Etat

Si l'«honnêteté» de l'aveu a été appréciée, des déclarations de hauts responsables tunisiens ont en revanche donné l'impression d'un manque de coordination entre les divers services de l'Etat. «Il y a eu beaucoup de contradictions depuis l'attentat. Que la confusion règne dans les heures suivant l'attaque, c'est normal. Quatre jours après, non», dit l'avocat Ghazi Mrabet.

Deux morts tunisiens -le policier ainsi qu'un chauffeur de bus- ont ainsi été officiellement annoncés avant qu'il ne soit plus fait mention du second. La nationalité et le nombre de victimes étrangères ont aussi fait l'objet de cafouillages.

Un complice ou rescapé chanceux?

Le Premier ministre a déclaré que les assaillants étaient vêtus d'uniformes militaires. Or les images des dépouilles des deux hommes diffusées par le ministère de l'Intérieur dans une vidéo les montrent habillés en civil.

Cette vidéo, abondamment commentée, n'a fait qu'ajouter aux interrogations. Elle montre en effet les deux assaillants armés croisant un homme qui ne semble pas surpris de les voir, avant qu'un bref échange ait lieu et que l'homme reparte. Depuis, beaucoup de Tunisiens se demandent s'il s'agissait d'un complice ou d'un rescapé chanceux.

Un troisième auteur?

Enfin, le nombre d'assaillants continue de faire l'objet de rumeurs. Dimanche, le président Caïd Essebsi a évoqué un troisième auteur de l'attentat, sans en dire plus. S'agit-il d'un tireur? D'un organisateur? D'un complice? Mystère.

Et cette annonce, peut-être la plus importante depuis le début de l'enquête, le chef de l'Etat l'a réservée à des médias français. Ni le ministère de l'Intérieur ni le Parquet ne veut ou ne peut apporter des précisions. Ils n'ont pas souhaité donner les motifs des interpellations d'au moins dix personnes ces derniers jours.

«Opacité»

Toujours sans réponse aussi, la cause de l'absence de gardes devant le Parlement -mitoyen du musée- évoquée par le vice-président de l'Assemblée. Personne n'a non plus expliqué comment deux touristes espagnols et un employé du musée ont pu passer la nuit cachés au Bardo après l'attaque, alors que le bâtiment était censé avoir été passé au peigne fin par des unités d'élite. Autant d'interrogations qui devraient être abordées point par point par le gouvernement, estime Ghazi Mrabet. Mais pour l'instant, «il y a un manque de coordination et pas de communication centralisée», constate Amna Guellali de l'ONG Human Rights Watch (HRW), déplorant que les responsables communiquent «chacun de son côté». Elle critique vivement le black-out autour des personnes emprisonnées dans le cadre des investigations.

«Il y a une totale opacité (...) autour des détentions. Je peux comprendre qu'ils ne veuillent pas parler d'une enquête en cours. Ce qui n'est par contre pas normal, c'est que des personnes soient arrêtées sans que personne n'ait accès à elles», remarque-t-elle. Résultat, dans la rue ou sur Facebook, le réseau social où de très nombreux Tunisiens puisent leurs informations, la bataille des théories faisait rage. Sans porter atteinte à l'enquête, «on a le droit de connaître la vérité et le ministère de l'Intérieur gagnerait en crédibilité» en étant plus transparent, conclut Ghazi Mrabet.