Ukraine: Moscou rejette les lois de Kiev sur le statut spécial de l'Est prorusse

La Russie et les rebelles prorusses de l'Est de l'Ukraine ont rejeté mercredi les nouvelles lois promulguées mercredi par le président ukrainien, qui offrent davantage d'autonomie à ces territoires à condition d'élections.

Le président Petro Porochenko a promulgué dans la soirée, selon son service de presse, les deux textes adoptés la veille par le Parlement dans le cadre des accords de paix de Minsk 2.

Ces nouveaux documents complètent une première série de lois sur «le statut spécial» de la zone sous contrôle séparatiste, votée en septembre pour notamment permettre à ces territoires d'obtenir des financements de Kiev, suspendus depuis fin 2014, de former légalement leur propre milices et de donner un statut plus favorable à la langue russe qui y est majoritairement parlée.

Un des textes votés mardi dresse la liste des localités qui bénéficieront de ce «statut spécial».

La deuxième loi stipule que ces localités ne pourront accéder à ce statut qu'après l'organisation d'élections locales, non seulement conformes à la loi ukrainienne, mais aussi en présence d'observateurs indépendants et après le dépôt des armes ou la départ de tous les groupes armés de ces régions. La diffusion des médias ukrainiens doit également reprendre sur ces territoires.

Selon les accords de Minsk 2, signés le 12 février, à l'issue des négociations marathon avec médiation du président français François Hollande et de la chancelière allemande Angela Merkel, et en présence des présidents russe Vladimir Poutine et ukrainien, une loi définissant le statut des zones sous contrôle rebelle devait être adoptée après l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu et un retrait des armes lourdes le long de la ligne de front.

L'organisation des élections locales, conformes «aux standards de l'OSCE» et observées par cette organisation, devait être «discutée» par Kiev avec les rebelles, selon ces accords.

- Kiev «fidèle à ses engagements» -

Or c'est sur l'organisation de ce vote qui est devenue une nouvelle pomme de discorde.

Les rebelles ont dénoncé des conditions imposées par Kiev.

«Des amendements, définissant les conditions d'organisation des élections locales et qui n'ont pas été approuvés par la DNR et la LNR, ont été apportés», ont fustigé mercredi les dirigeants des Républiques autoproclamées de Donetsk (DNR), Alexandre Zakhartchenko, et de Lougansk (LNR), Igor Plotnitski, dans une déclaration commune.

«La conclusion est claire: Kiev ne veut pas de la paix» dans ce conflit qui a fait plus de 6.000 morts en onze mois, ont-ils accusé.

De son côté, la Russie a estimé que la loi constituait une violation «grossière» des accords de paix de Minsk. «Kiev cherche à remplacer pratiquement tous les élus du peuple par d'autres personnes», a accusé le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov, appelant Berlin et Paris à faire pression sur les Ukrainiens.

Dans la soirée, M. Porochenko s'est entretenu par téléphone avec Mme Merkel et l'a notamment informé que «l'Ukraine restait fidèle à ses engagements» de paix assurant que les nouvelles lois en faisaient partie.

La diplomatie ukrainienne a également défendu la légitimé de ces textes. «La décision du Parlement permet la tenue d'élections libres et justes. (...) Les autorités nouvellement élues seront légitimes et contribueront à mener des réformes constitutionnelles en Ukraine», a assuré le ministère ukrainien des Affaires étrangères.

Ces tensions autour du «statut spécial» des zones rebelles interviennent alors que la situation reste tendue dans l'Est, malgré la trêve.

Mercredi encore, malgré l'instauration d'un nouveau cessez-le-feu il y a près d'un mois, le porte-parole militaire ukrainien Andriï Lyssenko a annoncé la mort d'un soldat ukrainien au cours des dernières 24 heures. Cinq autres ont été blessés, a-t-il ajouté.