SANTEEbola: Et si l’épidémie se propageait par l’Inde?

Ebola: Et si l’épidémie se propageait par l’Inde?

SANTELe découvreur du virus s’inquiète du risque de contamination en Inde...
Nicolas Beunaiche

Nicolas Beunaiche

Après l’Afrique, l’Europe et l’Amérique, le virus Ebola va-t-il s’exporter en Asie? Si personne n’est a priori à l’abri d’une contamination, une interview du découvreur du virus a ravivé les inquiétudes d’une propagation de la maladie sur le continent asiatique, et en particulier en Inde.

Dans cet entretien donné au Guardian, le Belge Peter Piot se dit préoccupé par le cas indien en raison du nombre d’expatriés travaillant dans l’ouest de l’Afrique –quelque 45.000 Indiens résident dans les quatre pays touchés par le virus, la plupart au Nigeria. «Il suffirait qu’une personne soit contaminée, prenne l’avion vers l’Inde pour rendre visite à sa famille durant la période d’incubation et, ensuite, une fois malade, se rende dans un hôpital public», indique-t-il. Or à cette période de l’année, riche en fêtes religieuses, les occasions de voyages sont nombreuses.

Des médecins qui ne prennent pas de gants

Pour parer à cette éventualité, des mesures ont été prises dans tous les aéroports internationaux, a annoncé le gouvernement ces derniers mois. Des scanners thermiques ont été installés, tandis que des équipes médicales ont été déployées. Pour le moment, le dispositif a fait ses preuves: en août, six personnes ont ainsi été placées en quarantaine à leur retour du Liberia à l’Organisation de la santé de l’aéroport de New Delhi, un centre spécial établi par le ministère de la Santé pour contrôler les passagers internationaux, après que l’un d’entre eux a présenté de la fièvre et un mal de gorge. Résultat des analyses négatif.

Mais ce qui inquiète Peter Piot, c’est surtout les habitudes du personnel de santé indien. «En Inde, les médecins et les infirmières ne portent souvent pas de gants de protection. Ils seraient immédiatement infectés et propageraient le virus», prédit-il. Un détail qui a de quoi préoccuper face à une maladie profitant de la moindre faille de sécurité, comme dans le cas de l’infirmière américaine contaminée ce week-end au Texas.

Pour le magazine indien d’investigation Tehelka, qui a publié une enquête en août, le centre du problème serait le gouvernement, dont la réponse au risque resterait «dangereusement soporifique». L’auteur de cette enquête reproche notamment aux autorités d’avoir désinformé la population en publiant en mai une circulaire affirmant que «le risque de transmission dans la première phase symptomatique» est «faible».

Deux labos au point seulement

Si, depuis, une ligne d’appel nationale ouverte 24 sur 24 a été lancée, l’heure ne semble pas à la grande mobilisation. Selon Les Echos, les grands hôpitaux assurent aujourd’hui encore ne pas avoir reçu d’instructions du ministère de la Santé sur la conduite à adopter en cas d’arrivée dans leurs services d’un malade. Pire, seuls deux laboratoires, à New Delhi et Pune, sont capables de détecter le virus, ajoute le quotidien. Quant aux services de santé dans leur ensemble, le quotidien New Indian Express émet des doutes sur leur capacité à affronter une épidémie, alors qu’ils sont déjà surchargés.

En attendant de connaître le sort de la prophétie de Piot, l’Inde peut en tout cas s’enorgueillir de n’avoir recensé aucun cas de malade avéré d’Ebola. Après avoir maintenu en isolement une touriste japonaise arrivée par le Myanmar, les autorités ont finalement annoncé jeudi que la jeune femme ne portait pas en elle le virus.