VIDEO. Japon: Un distributeur de bitcoins pour convertir la population
JAPON•Un entrepreneur japonais, qui cherche à populariser la monnaie virtuelle dans l'Archipel, a importé la machine des Etats-Unis...Mathias Cena
De notre correspondant à Tokyo
Sa devise, il la porte au poignet, sur un bracelet en plastique où l’on peut lire «bitcoin accepted here». Depuis un an et demi, Hiroki Minematsu, un entrepreneur japonais, vit et respire au rythme de la monnaie virtuelle, une passion dévorante qu’il tente de transmettre à ses compatriotes.
Mission: difficile. Comme ailleurs, le bitcoin est relativement méconnu du grand public dans l’Archipel, où ce «machin» virtuel provoque la méfiance: «Les Japonais ont du mal à faire confiance à ce qui n’est pas palpable. Ils ont aussi de la difficulté à se représenter ce qu’est exactement le bitcoin, et ils se demandent si ce n’est pas par exemple un nouveau genre de schéma de Ponzi», raconte l’entrepreneur à 20 Minutes dans un bar-restaurant de Roppongi, un quartier branché de la capitale japonaise. C’est à l’entrée de cet établissement aux allures de lounge branché qu’Hiroki Minematsu a installé sa nouvelle «arme»: un distributeur de bitcoins.
Deuxième appareil du genre à Tokyo
La machine, qui permet de changer des yens en bitcoins et vice-versa, ressemble à un classique distributeur de banque, mais dans le premier cas, le papier qu’elle distribue est sans valeur: le bitcoin étant une monnaie virtuelle, l’appareil ne fournit qu’un simple reçu en échanges de billets japonais. Ce jour-là, l’appareil est en panne – «un problème de connexion au réseau», explique l’entrepreneur – et l’explication est donc théorique.
Après avoir fondé une entreprise qui permet aux consommateurs d’acquérir des bitcoins via un service en ligne, l’entrepreneur espère avec ce distributeur démocratiser la monnaie pour que «tous ceux qui s’y intéressent puissent l’acquérir, et non pas une poignée d’initiés». Ce distributeur de la marque Robocoin, importé des Etats-Unis, est le deuxième du genre au Japon, l’autre se trouvant aussi dans un restaurant, à quelques centaines de mètres de là. «On n’est pas en concurrence, assure Hiroki Minematsu, ça permet d’échanger des informations pratiques». Il dit d’ailleurs ne pas penser à faire du profit dans un premier temps, voulant juste aider à populariser le bitcoin. Selon lui, 10 à 20 personnes utilisent chaque jour l’appareil, du reste relativement difficile à trouver.
Beaucoup de Japonais n’ont appris l’existence de cette monnaie que le 28 février, au moment de la faillite de MtGox, la plate-forme d’échanges de bitcoins basée à Tokyo et gérée par un Français, Mark Karpelès. Quelque 127.000 utilisateurs ont perdu ce jour-là l’équivalent de 377 millions d’euros dans des circonstances encore floues: attaque informatique selon la société, et fraude massive selon ses créditeurs qui se sont tournés vers la justice pour tenter de récupérer une partie de leur argent.
«Je lui ai confié mes bitcoins donc c’est de ma faute»
Bien que MtGox fut basée au Japon, la majorité de ses utilisateurs étaient étrangers. On estime que 1.000 Japonais ont perdu des bitcoin dans «l’incident», comme le désigne Hiroki Minematsu. Lui aussi y a laissé des plumes: 72 bitcoins, soit environ 30.000 euros au cours d’alors. Mais il assure ne pas en vouloir à Mark Karpelès: «Je lui ai confié mes bitcoins donc c’est de ma faute. Même s’il était là devant moi, on serait bons amis».
En souriant, il montre sur son téléphone une photo qui le montre en compagnie du Français, avant la faillite de MtGox. Le cliché a été pris dans le bitcoin café que voulait ouvrir Karpelès, «l’endroit idéal pour installer un distributeur». Mais les deux hommes n’ont «pas pu se mettre d’accord sur les conditions».
Selon lui, au final, «l’incident» aura permis de faire connaître le bitcoin au grand public. «Il nous appartient maintenant de ne pas ternir cette image», explique Minematsu, qui se voit volontiers en prophète de la monnaie virtuelle. Il dit avoir confiance en BitFlyer, le nouveau service qui veut se positionner en remplaçant de la plate-forme déchue: «MtGox a commencé comme un hobby, ce qui explique que la sécurité était un peu légère. Mais le créateur de BitFlyer est un ancien de Goldman Sachs, plus au fait de l’aspect financier de la chose». Reste à savoir si cela convaincra les utilisateurs.