Irak: Qui sont les Peshmergas, les combattants kurdes à qui la France livre des armes?
IRAK•C’est à eux que la France et les Etats-Unis ont décidé de livrer des armes pour combattre les djihadistes de l’Etat islamique…Anissa Boumediene
Ils sont chargés de lutter contre les forces de l’Etat islamique (EI). Puisque les grandes puissances occidentales n’ont pas souhaité intervenir au sol pour contrer l’avancée des djihadistes de l’EI, la communauté internationale s’en est remise aux Peshmergas, plutôt qu’à la faible armée irakienne, pour assurer les combats dans le nord de l’Irak.
Des gardes-frontières en première ligne
Ils sont 150 à 200.000, hommes et femmes, à aller «au-devant de la mort», la signification kurde de «peshmerga», le terme qui désigne les combattants kurdes. «Ce n’est pas une armée», précise Karim Pakzad, chercheur spécialiste de l’Irak à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris). «A la base, les Peshmergas ont vocation à assurer la sécurité des 5 millions de Kurdes, notamment en gardant les frontières de la région autonome du Kurdistan irakien», dans le nord du pays. Des gardes-frontières qui se retrouvent en première ligne face à l’assaut des djihadistes de l’EI.
Des soldats professionnalisés
Dans le passé, les Peshmergas se sont déjà illustrés dans de lourds combats. «Durant la première guerre entre les Kurdes et Saddam Hussein, ils ont pris les armes et combattu. Les Peshmergas étaient forgés à la lutte et à la guérilla, ils étaient des bénévoles engagés pour la cause kurde», raconte Karim Pakzad. Un profil qui a changé, notamment depuis que le Kurdistan est devenu autonome, en 2004.
Aujourd’hui, ce sont des soldats professionnalisés, salariés, «une nouvelle génération, jeune, qui n’a pas connu ces combats», explique le chercheur. «Ce sont des forces de défense, mais ils sont entraînés et impliqués: on note un regain pour la cause kurde, qui fédère les Kurdes par-delà les frontières», poursuit-il. A l’instar des combattants du PKK, les Kurdes de Turquie, qui sont venus prêter main-forte du côté de la frontière irakienne.
Les Peshmergas: petits poucets face à l’EI
Organisés, les djihadistes de l’EI sont à la tête d’un trésor de guerre colossal. Avec la prise de Mossoul et la fuite de l’armée irakienne, l’EI a mis la main sur un énorme arsenal: hélicoptères de combat, chars, véhicules blindés et Humvee (gros 4x4), laissés par les Américains après leur retrait du pays en 2011. Ils se sont aussi copieusement servis dans les entrepôts de munition de la deuxième ville d’Irak en récupérant des missiles antichars, des fusils d’assaut de type kalachnikov et M16 et quelque 4.000 mitrailleuses. Sans compter un bas de laine estimé à 2 milliards d’euros, utilisé aussi pour gonfler les stocks d’armement.
Avec leurs kalachnikovs et leurs quelques lance-roquettes, les Peshmergas ne disposent que d’un armement léger. Et font figure de petits poucets face à la puissance de l’EI, puisque la Constitution irakienne ne leur permet pas d’acheter des armes sur le marché international sans l’accord de Bagdad.
L’implication de la communauté internationale pour changer la donne
Un déséquilibre qui pose la question de savoir si les combattants kurdes ont une chance de vaincre les soldats de l’EI. «Assurément, estime Karim Pakzad, s’ils ont l’armement nécessaire». C’est là que les livraisons d’armes fournies par la communauté internationale peuvent changer la donne. Depuis plusieurs semaines, le président kurde Massoud Barzani réclamait des armes à la communauté internationale, un appel finalement entendu.
«Les Kurdes sont largement capables de combattre. Si au début, ils n’ont pas pu résister contre l’offensive des djihadistes de l’EI, c’était par manque de moyens, pas d’hommes, poursuit le chercheur. Avec les armes de la France et du Royaume-Uni et les frappes américaines, les Peshmergas sont dans un rapport de combat plus équilibré, et ont déjà pu reprendre deux villes».