Le Costa Concordia enfin à la casse, l'Italie respire
•L'Italie a pu pousser dimanche un grand soupir collectif de soulagement avec l'arrivée sans encombre à Gênes de l'épave du paquebot Concordia, dont le naufrage en janvier 2012 avait coûté la vie à 32 personnes et plongé le pays dans le malaise.© 2014 AFP
L'Italie a pu pousser dimanche un grand soupir collectif de soulagement avec l'arrivée sans encombre à Gênes de l'épave du paquebot Concordia, dont le naufrage en janvier 2012 avait coûté la vie à 32 personnes et plongé le pays dans le malaise.
La carcasse du navire, redressée et renflouée à grands frais ces derniers mois, a lentement pénétré en fin de matinée dans l'enceinte du terminal Europe de Voltri, en banlieue de Gênes (nord-ouest), tirée par plusieurs remorqueurs. Elle s'est immobilisée devant un quai où elle a été amarrée au terme d'une longue manoeuvre. La sirène d'un porte-conteneurs amarré en face lui a souhaité la bienvenue.
«Tout s'est bien passé. Je suis très content», a déclaré en mettant pied à terre le héros du jour, le Sud-Africain Nick Sloane, spécialiste mondial du renflouement de navires et stratège de l'opération. «Cela a été un défi et une expérience magnifiques. Un défi je crois bien plus grand qu'aucun de nous n'avait imaginé au début en 2012».
Le président du conseil, Matteo Renzi, était auparavant venu inspecter l'épave et féliciter les équipes chargées de l'opération. «Je suis venu dire ma gratitude pour qui a fait quelque chose que tout le monde qualifiait d'impossible», a-t-il lancé.
«Aujourd'hui ne peut certainement pas être qualifié de jour heureux. Je ne crois pas que quiconque puisse faire la fête ou se réjouir car nous tournons la page sur un événement qui a provoqué la mort de 33 personnes» (32 au moment du naufrage et un plongeur espagnol plus tard, ndlr), a-t-il dit.
- «Les Français peuvent nous faire confiance» -
Le Concordia avait quitté mercredi l'île toscane du Giglio, où il gisait depuis l'accident, survenu dans la nuit du 13 janvier 2012, alors que 4.200 personnes se trouvaient à son bord.
Au soulagement général, il a accompli sans accroc son dernier voyage jusqu'à Gênes, tiré pendant quatre jours par deux puissants remorqueurs de haute mer sur un parcours de quelque 280 km le long des côtes italiennes.
La France craignait que l'épave ne pollue les côtes corses au moment de son passage à proximité.
«Les Français peuvent nous faire confiance», a souligné M. Renzi en réponse aux préoccupations exprimées par la ministre de l'Environnement, Ségolène Royal.
Menée par l'armateur Costa (groupe Carnival) et effectuée par le consortium américano-italien Titan-Micoperi, la gigantesque opération de sauvetage a vu successivement le redressement du paquebot, son renflouement, sa stabilisation puis son remorquage jusqu'à Gênes, le tout pour une facture de quelque 1,5 milliard d'euros.
L'image de l'énorme navire, resté des mois échoué sur les rochers à quelques dizaines de mètres de la côte, penché à tribord et à moitié immergé, avait fait le tour du monde. Le naufrage avait embarrassé l'Italie en raison du comportement jugé peu glorieux de son commandant, Francesco Schettino. Le marin est actuellement jugé pour homicides par imprudence, naufrage et abandon de navire.
- Ressusciter la filière démolition -
Une nouvelle vie attend à présent le Concordia, monstre de 114.500 tonnes, dont une grande partie de l'acier devrait être cédée à des groupes sidérurgiques pour être refondue et recyclée.
Au moment même où s'achevaient les manoeuvres, le contrat cédant la propriété du navire a été signé entre le groupe Costa et le consortium Saipem/San Giorgio del Porto.
Pour la ville de Gênes, patrie de Christophe Colomb, ancienne hyperpuissance maritime, et qui a été préférée au port toscan de Piombino, l'arrivée du bateau est une aubaine. Elle devrait fournir du travail à quelque 700 personnes pendant un an et demi, a estimé le président de la région de Ligurie, Claudio Burlando.
Selon lui, cet événement peut aussi constituer un point de départ pour la relance d'une «filière» démolition, abandonnée il y a des dizaines d'années au profit des pays asiatiques comme le Bangladesh, qui opèrent dans des conditions sociales et environnementales «très discutables», selon lui.
M. Renzi est allé dans le même sens, prenant le contre-pied des nouvelles incertitudes entourant l'économie italienne : «nous ne nous résignons pas à la rhétorique du déclin. Nous pensons que nos villes sont à même d'attirer des investissements industriels et de suivre des politiques industrielles dignes de ce nom. Le port de Gênes va dans cette direction», a-t-il dit.