INTERVIEW«Le pape François a fait prendre conscience à chaque homme de sa responsabilité dans la société»

«Le pape François a fait prendre conscience à chaque homme de sa responsabilité dans la société»

INTERVIEWAprès une année de pontificat, François a commencé à réformer l’Eglise en profondeur, et lui a permis de s’ouvrir au monde...
Bérénice Dubuc

Bérénice Dubuc

Il y a un an s’ouvrait à Rome le conclave qui allait élire le Cardinal Bergoglio, archevêque de Buenos Aires, 266e pape de l’Eglise catholique. Après cette première année de pontificat, Christiane Rancé, auteur de François, un pape parmi les hommes (Ed. Albin Michel), dresse pour 20 Minutes un tableau des changements apportés par le pape François.

Quelles sont les modifications apportées au sein de l’Eglise catholique par le pape François?

On peut parler d’un grand changement. Il est en train d’appliquer les grandes directives de Vatican II, ce que tous ces prédécesseurs avaient omis de mettre en place. Sur la nature du pouvoir du pape, il a choisi la collégialité, avec la mise en place du «C8». Ce sont huit cardinaux, qui le conseillent dans la réforme de la Curie.

François a en effet compris que l’organisation de la Curie ne correspond pas à la réalité de son existence. Il a donc restructuré et simplifié les dicastères (les «ministères» du Vatican) pour éviter l’opacité et les déperditions de pouvoir. Il a créé un dicastère de l’économie pour mettre de l’ordre dans toutes les institutions financières, les harmoniser et donner plus de transparence, créé un dicastère des familles (dirigée par un couple laïc) pour aborder tout ce qui concerne les rapports de l’Eglise avec les structures sociales de la société séculière (contraception, baptêmes, divorces…).

Il a enfin opéré une réforme du code pénal: depuis le 1er septembre, il est ainsi possible pour la justice territoriale d’acter contre des membres de la hiérarchie vaticane. Enfin les crimes sexuels sont entrés dans la juridiction.

Autre révolution majeure, l’ouverture de l’Eglise vers l’extérieur…

Chaque pape a son propre style, celui de François est de rappeler que l’Eglise n’est pas uniquement la Curie, que l’histoire de l’Eglise ne se joue pas qu’à Rome mais aussi dans la grande assemblée des catholiques et chrétiens à travers le monde. Il a incité les croyants à ne pas regarder la foi de loin mais à la vivre chaque jour, tout comme lui le fait: il incarne la parole évangélique, donne l’exemple et incite les chrétiens à faire la même chose. Ce pape est révolutionnaire car il dénie une séparation totale et absolue entre les domaines séculier et religieux et entend fait tomber ces «compartiments».

Il parle aussi aux non croyants…

Sa grande force est qu’il incarne ce qu’il dit: il prône le partage des richesses, refuse les ors et le pouvoir dans ses manifestations temporelles, va voir les assemblées d’hommes souffrant sans savoir s’ils sont catholiques ou non… C’est un discours d’amour du prochain très humain, une parole de vérité qui touche tout le monde. C’est pour cela que les gens, même non croyants, sont susceptibles de l’écouter.

Ce qu’il y a d’extraordinaire dans la parole de ce pape, c’est qu’il a remis les questions essentielles de l’humanité au cœur des débats. Il a fait prendre conscience à chaque homme de sa responsabilité dans la société d’aujourd’hui et de demain. Il a également rappelé l’importance de cette vision d’amour pour le plus humble, le plus démuni, le plus pauvre.

A l’inverse, quels points n’ont pas évolué?

Il faut souligner qu’on attend beaucoup de lui, mais certaines questions, comme l’avortement par exemple, ne concernent pas le pape. Il ne faut pas oublier d’où il parle, à savoir depuis le dogme catholique, qui repose sur la défense de la vie.

Sur les autres questions qui restent en suspens, comme nous l’avons vu, François ne veut pas décider seul, et a mis en place des collégialités pour y répondre, comme le synode des familles par exemple. A ceux qui demandaient que les femmes aient plus de pouvoir dans l’Eglise, il a déjà expliqué que pour lui, il n’y a pas de compétition, parce qu’il n’y a pas de pouvoir à prendre, car le seul pouvoir qui existe est celui de servir, ce que font déjà les femmes. Quant à la question du célibat des prêtres, c’est également à l’étude.